Dolmen de la Pierre aux Fées, au hameau de Hez, commune de Villers-Saint-Sépulcre Photographie Eugène Durand (1891) |
Après dix-sept ans de recherches aléatoires et vaines à Ixelles, à Londres, à Paris, à Reims et à Rouen, pour trouver le lieu du décès du relieur Théodore Hagué, tout indiquait néanmoins qu’il était mort en Normandie. Au matin du 15 mars 2018, après une nuit anormalement agitée, je me suis retrouvé devant une carte du département de la Seine-Maritime, qui me désignait les 708 communes dont il fallait explorer les archives de l’état civil. Même avec l’aide des tables décennales, et pour la seule année 1891, l’épreuve me parut insurmontable. C’est alors que - ne me demandez pas pourquoi - je commençais, au hasard et sans grande conviction, par une commune proche de Rouen … Le jour même du 127e anniversaire de sa mort, je découvrais ce que les historiens de la reliure cherchaient depuis autant d’années. Devrais-je croire aux forces de l’esprit ?
En guise d’introduction
« Il est très difficile, pour ne pas dire impossible, d’imiter les reliures des dix-septième et dix-huitième siècles. En admettant que l’on puisse arriver à obtenir le ton du maroquin ancien, ce qui me parait impraticable avec les peaux nouvelles, les ors ont du moins une patine déroutant les plus habiles. Puis, nos graveurs actuels ne peuvent, dans leurs reproductions, approcher de ces admirables fers à dorer qu’employaient les maîtres de l’époque.
Un homme qui ne doute de rien a voulu cependant
essayer. Mais, dans une vente faite il n’y a pas longtemps, les Pompadour et les
Dubarry qu’il avait préparés, énoncés comme authentiques, ont été accueillis
par des éclats de rire et des enchères dérisoires, tellement la supercherie
était grossière. Ce résultat a dû le guérir à tout jamais de ses velléités de
contrefaçon.
On se borne à employer d’anciens fers à dorer que
l’on pousse sur de vieux plats jansénistes. C’est ainsi que les fers de la
reliure du Sacre de Louis XV, ayant
été sauvés de la fonte, ont servi plusieurs fois à orner certains grands
in-folio sur lesquels ils font une assez bonne figure. – Les fers aux armes des
Rohan-Chabot, retrouvés également, sont entre les mains d’amateurs qui s’en
servent pour leur usage personnel. – C’est leur droit, et, cette fois, il n’y a
pas lieu de signaler ces faits à la vindicte publique.
Ne pouvant donc contrefaire, on retape, on
raccommode les vieilles reliures, comme les vieux souliers. On passe au carmin
et à l’encaustique les plats des maroquins usés pour effacer les traces
blanchâtres du temps. Aussi il sera bon, lorsque vous achèterez un livre relié
en maroquin rouge, de frictionner légèrement le dessus avec votre doigt, après
l’avoir mouillé, et de regarder à son extrémité s’il ne s’est pas coloré au
frottement.
* * *
Pour les reliures du seizième siècle, c’est autre
chose.
A cette époque, les incrustations de maroquins
qui ont fait la fortune des Padeloup et des Derome étaient remplacées par des
badigeonnages qui se retrouvent sur la plupart des reliures italiennes. Il est
très facile de les reproduire en leur donnant un cachet d’antiquité auquel les
plus habiles se sont souvent laissé prendre.
Le maître faussaire en ce genre est un nommé
Hagué, longtemps employé, à Londres, par le duc d’Aumale aux restaurations de
sa bibliothèque. Cet homme, qui exerce aujourd’hui en Belgique, après avoir
opéré en Angleterre, a poussé l’art de l’imitation jusqu’à ses dernières
limites. Il a mis une telle science dans son travail, qu’il a plus d’une fois,
par ses procédés parfaits, désespéré les érudits, auxquels il est toujours
arrivé à écouler ses productions étonnantes.
A la première vente Double, en 1862, tous les
bibliophiles présents se disputèrent chaudement trois recueils de Chansons ou Motets, d’une fraîcheur remarquable, et pour cause.
Aux armes et aux chiffres de Diane de Poitiers et
de Henri II, en or, argent et couleur, sur une magnifique reliure française du
seizième siècle, dorée et gaufrée sur la tranche, ces manuscrits furent vendus
4,500, 4,600 et 5,250 francs.
Ce n’est que trois ou quatre ans plus tard que
ces reliures ont été reconnues fausses. Et cependant les amateurs les plus
raffinés, les libraires les plus experts assistaient à la vente, et pas une
seule protestation, pas même un simple doute ne s’était élevé sur leur
authenticité.
Ces trois volumes sortaient de l’officine Hagué.
On prétend qu’ils appartiennent maintenant à M. Moreau, ancien syndic des
agents de change de Paris, et qu’ils sont le plus bel ornement de la splendide
bibliothèque du château d’Anet.
* * *
Tout récemment il se fit grand bruit, dans le
Landerneau des bibliophiles, autour de la découverte d’un manuscrit de
Charles-Quint.
Toujours heureux dans ses rencontres, ce
chercheur passionné qui s’appelle M. Quentin-Bauchart avait fait cette
trouvaille. On lui en avait demandé 20,000 francs ! – un morceau de pain.
Le petit volume de format in-16, dans son vieil
étui en cuir doublé de velours passé, était tout bonnement une merveille. On
attribuait la conservation miraculeuse du manuscrit à cet étui adorable.
Tout ce qu’il y a de fins connaisseurs dans
Paris, d’experts infaillibles et de marchands s’extasiaient sur ce merle blanc.
Feu Pottier, un pur cependant, la première fois
qu’il vit le manuscrit, le regarda amoureusement comme un joli bijou. Le
fermoir surtout, simulant deux C entrelacés, le plongea dans une douce extase.
Il tint le livre de ses mains tremblantes d’émotion et s’écria en regardant M.
Quentin-Bauchart :
“ Carolus ! le grand Carolus ! ”
M. de Ganay, un bibliophile estimé et regretté de
tous, offrit en jurant un prix fantastique à son confrère, en lui montrant la
place qu’il réservait à Charles-Quint dans sa belle vitrine, véritable musée
des souverains.
Cependant une inspiration venue d’en haut
conseilla à l’heureux propriétaire de ce trésor d’aller chez Lefebvre, l’habile
ouvrier de la Bibliothèque nationale, pour éclaircir un dernier doute.
Lefebvre est un grand artiste parmi les
réparateurs connus. Avec lui, il n’y a plus de maroquins anciens à coiffes
brisées, plus de coins écornés, plus de plats éraillés, plus de solution de
continuité dans les dorures. Le vieux père Monlien, aujourd’hui à la retraite,
n’a jamais été qu’un élève à côté de lui. Bénard l’admire et n’ose, après lui,
faire des retouches.
La consultation de Lefebvre ne fut pas de longue
durée. Il n’hésita pas une minute. Du premier coup il s’écria :
- Encore un coup de Hagué ! Cette reliure
est fausse, archifausse.
M. Quentin-Bauchart se sentit tressaillir.
Adieu, veau, vache, cochon, couvée…
Le maroquin avait été sali avec art, les couleurs fort adroitement calquées sur une vieille reliure du temps, et les armes, empruntées à un autre volume, admirablement rapportées.
Ce fut une cruelle déception. Mais le manuscrit
était si joli que, vendu trois ans plus tard dans une collection de curiosités,
il atteignit encore 3,000 francs. »
(Paul Eudel. Le
Truquage. Les Contrefaçons dévoilées. Paris, E. Dentu, 1884, p. 271-274)
Origines et formation
Au hameau de Hez, à un kilomètre au nord-ouest de Villers-Saint-Sépulcre [Oise], une partie des terres étaient cultivées par Jacques Hagué, comme l’avait fait son père. Il avait été baptisé le 20 janvier 1656 en l’église Saint-Martin de Villers-Saint-Sépulcre et fut inhumé au cimetière le 3 mars 1700.
Son fils Charles Hagué, né et baptisé le 1er
août 1679 fut aussi laboureur et se maria deux fois : le 13 février 1703 à
Montreuil-sur-Thérain [Oise], puis, devenu veuf, à Bailleul-sur-Thérain [Oise]
le 8 juillet 1720. Du second mariage, Étienne Hagué fut baptisé le 23 février 1722
à Villers-Saint-Sépulcre et y mourut le 25 germinal An XI [15 avril 1803] ;
devenu cordonnier à Hez, il avait épousé Catherine Legros (1725-1807), à
Berthecourt [Oise], le 19 novembre 1743, qui lui donna trois fils, Jean, Pierre
et Charles, cordonniers comme lui.
Charles Hagué naquit à Villers-Saint-Sépulcre le
26 mars 1766 et y épousa, le 10 fructidor An II [27 août 1794],
Marie-Catherine-Victoire Destrée, née le 22 octobre 1774 au hameau de
Chateaurouge, sur la commune de Cauvigny [Oise]. Leur fils Joseph-Ferdinand
Hagué naquit à Villers-Saint-Sépulcre le 7 ventôse An VII [25 février
1799] : installé relieur à Beauvais [Oise], il y épousa, le 23 mai 1821,
Marguerite Brille, couturière en robes, née le 20 frimaire An V [10 décembre
1796] à Crèvecœur-le-Grand [Oise].
Pierre-Étienne-Théodore Hagué, fils de Joseph-Ferdinand Hagué et de Marguerite Brille, est né à Beauvais, rue Saint-Pantaléon [détruite en 1918], le 2 août 1822.
Rue de l'Echaudé. Photographie Charles Marville (1867) |
Il installa son atelier de reliure à Paris [VIe], 6 rue de l’Échaudé.
En 1852, il vint se perfectionner à Reims [Marne],
25 rue Saint-Symphorien, chez le relieur Nicolas-Jean-Baptiste-Augustin Tinot,
né à La Malmaison [Aisne] le 15 mars 1824, formé à Paris par Charles-François
Capé (1806-1867) et dont la spécialité était la « Reproduction de Reliures
Antiques de toutes les époques ».
Devenu veuf de Joséphine Pol, Hagué épousa à Paris, le 31 décembre 1853, Eugénie Coutin, née à Reims, 6 rue Féry, le 11 août 1836, fille de Jean-Nicolas-Étienne Coutin (1803-1845), fossoyeur, et de Marie-Nicole Baudart (1802-1869). Des amateurs de généalogie, qui ne lisent pas les actes de l’état civil, ont confondu l’épouse de Hagué avec une homonyme, Eugénie Coutin, née à Rethel [Ardennes] le 3 décembre 1846, qui a épousé à Rethel, le 25 février 1868, Ferdinand Razetout, né à Rethel le 27 août 1843.
En 1858, Hagué partit pour Londres, où il fut
employé dans l’atelier du relieur Joseph Zaehnsdorf (1816-1886) : installé
depuis 1842 au 30 Brydges Street, Covent Garden, Zaehnsdorf était le relieur du
roi de Hanovre et réalisait des reliures « in the Monastic, Grolier,
Maioli and Illuminated styles ».
Activité délictueuse
À Londres, Hagué rencontra le célèbre Bernard
Quaritch (1819-1899), surnommé par ses collègues « le tsar des libraires
antiquaires », grand spécialiste de la reliure dite
« historique », qui entretenait des rapports ambigus avec le monde
des faussaires. Installé depuis 1847 au 16 Castle Street, Leicester Square,
Quaritch déménagea en 1860 au 15 Piccadilly. Ce fut Quaritch qui attribua à
Hagué le prénom de Louis, le confondant avec le dessinateur attitré de la reine
Victoria, Louis Haghe, ou Hagué (1806-1886).
Hagué mourait presque de faim, quand il rencontra également le fameux Guillaume Libri (1802-1869) qui, poursuivi en France pour avoir soustrait frauduleusement de nombreuses pièces des dépôts publics, s’était réfugié à Londres en 1848, avait été condamné par contumace en 1850 à dix ans de réclusion et continuait néanmoins d’organiser la vente des caisses de livres qu’il avait emportées avec lui. Guidé par Libri dans la restauration des vieilles reliures authentiques, Hagué travailla pour le duc d’Aumale, exilé à Londres depuis 1848 : mais ayant mis les livres du prince en gage, il le perdit comme client. C’est alors que Hagué se mit à fabriquer des fausses reliures.
Paris, Drouot, 11 juin 2013 : 8.000 € |
À la première vente Léopold Double (1812-1881), en 1863, tous les bibliophiles présents se disputèrent trois recueils de Chansons et motets [nos 389-391], aux armes et aux chiffres de Diane de Poitiers et de Henri II : ces manuscrits furent vendus 5.250 francs [n° 389] et 3.975 francs [n° 391] à Joseph Techener (1802-1873), et 4.600 francs [n° 390] à Ferdinand Moreau (1826-1884), qui était devenu propriétaire du château d’Anet en 1860. Ce n’est que trois ou quatre ans plus tard que ces reliures furent reconnues fausses, sorties de l’officine de Hagué.
Vers 1868, Hagué quitta l’Angleterre et vint s’installer
dans le département des Yvelines, à Croissy-sur-Seine et à Chatou, 36 rue du
Chemin Vert. Tandis qu’il réparait des reliures anciennes pour les amateurs et
les libraires, il achetait discrètement des livres anciens dont la reliure
était sans ornementation et les transformait en fausses reliures du XVIe siècle pour des
personnages illustres. Il prenait les empreintes d’armoiries sur des volumes
authentiques et, par les procédés nouveaux de la galvanoplastie, il fabriquait
lui-même des fers armoriés absolument semblables aux anciens. Il travailla
ainsi pour de grands bibliophiles : Joseph Renard (1822-1882), maire d’Écully
(Rhône), l’imprimeur Ambroise-Firmin Didot (1790-1876), dont la bibliothèque
renfermait 72 reliures exécutées par Hagué, dispersées au cours des
six ventes publiques qui eurent lieu entre 1878 et 1884.
Signature de Théodore Hagué (1870) |
Ses stratagèmes finissant par être connus à Paris, Hagué voyagea alors en Champagne, où il réussit à vendre à Eugène Deullin (1827-1897), riche banquier d’Épernay [Marne], un certain nombre de reliures soi-disant historiques du XVIe siècle. Cet amateur ne tarda pas à céder ses fausses reliures à Edwin Tross (1822-1875), libraire-éditeur, 5 rue Neuve-des-Petits-Champs, à Paris [Ier], qui connaissait la supercherie et qui fit disparaitre ces reliures du marché français.
Après la guerre franco-prussienne, ses créanciers obligèrent Hagué à s’enfuir en Belgique, ce qui ne l’empêcha pas de revenir périodiquement en France. Le libraire parisien Anatole Claudin (1833-1906) rapporta :
« Sa présence fut décelée par l’apparition soudaine d’un lot de reliures princières au milieu d’une de ces ventes collectives organisées par l’entrepreneur de ventes le plus renommé de Bruxelles. Un libraire de Paris, attiré par l’annonce d’armoiries de Marie-Antoinette et de princes et princesses du sang royal, entreprit le voyage. Il reconnut aussitôt que les volumes étaient falsifiés et dénonça la supercherie. Les gens honnêtes s’abstinrent ; mais, comme à Paris, des spéculateurs et des gens sans scrupule les achetètent [sic] à de petits prix, espérant les repasser avec de gros bénéfices à des passants naïfs ou à des étrangers confiants. »
(J. Verax. « Les Faussaires de livres »
In Bulletin du bibliophile et du bibliothécaire. Paris, Techener, 1891, p. 518)
Rue Caroly, Ixelles |
Hagué était à Bruxelles sous un faux nom : « J. Caulin ». Son atelier était rue Caroly, à Ixelles, une des dix-neuf communes de la capitale. Il y réalisait des reliures rétrospectives du XVIe siècle : il se réservait le travail de décoration et confiait le lavage et le corps d’ouvrage à des artisans habiles, dont Joseph-François Dubois d’Enghien (1841-1923). Il les proposait, comme authentiques, à Quaritch, qui prenait 5 % de commission, et avec lequel il entretenait une correspondance régulière, sous forme de lettres strictement personnelles et de lettres qui pouvaient être montrées à des acheteurs potentiels.
À partir de 1882, Quaritch eut des doutes sur l’authenticité des reliures que lui fournissait Caulin : certaines avaient des couleurs trop vives pour être du XVIe siècle, d’autres présentaient des armes manifestement retouchées récemment ou dont le propriétaire était mort avant la date d’impression de l’ouvrage, d’autres encore semblaient avoir servi à un remboîtage. Quaritch contestait alors les prix trop élevés, mais Caulin continuait d’affirmer qu’il s’agissait de reliures authentiques. Parmi les clients amateurs figuraient le peintre Charles-Fairfax Murray (1849-1919), le fabricant de tapis Michael Tomkinson (1841-1921) et, « le gros client », John Blacker (1823-1896), homme d’affaires qui commerçait avec l’Amérique du Sud.
Démasqué et retrouvé
John Blacker devint le seul client à partir de décembre 1885, après qu’il eut appris la véritable identité de Caulin, lors d’un voyage en France, à Blois [Loir-et-Cher] : persuadé que Hagué voulait récupérer ses reliures à bas prix pour les revendre, il continua à acheter des reliures chez Quaritch. Celui-ci, pourtant informé de la découverte de Blacker, accepta de poursuivre les ventes, mais en dégageant sa responsabilité et en faisant passer sa commission à 10 % : il devenait ainsi complice du faussaire.
12 Sussex Square, Londres (1938) |
Chaque soir après le dîner, au 12 Sussex Square [détruit], Blacker examinait seul et en secret ses chers livres. Chaque livre était placé dans un coffret en cuir tapissé intérieurement de velours, fabriqué par Leuchars, installé dans Bond Street, et dans lequel était glissé un sachet parfumé Atkinson. Le bibliopégimane gardait à portée de main un tissu de soie permettant de cacher les livres en cas de l’arrivée d’un intrus.
En 1887, ce fut au tour de l’expert de Quaritch,
le bibliographe Michael Kearney, d’avoir des doutes : il renvoya à Hagué
une reliure aux armes de Catherine de Médicis, qui lui paraissait de
fabrication récente.
En 1890, Hagué se rendit à Londres chez
Quaritch où il rencontra Blacker : malgré les aveux de contrefaçon du
relieur, Blacker continua de croire à l’authenticité des reliures qu’i
possédait, mais cessa alors d’en acheter. Il avait dépensé, au total, plus de
70.000 £.
Hagué rentra en France et s’installa en Normandie, province riche en bibliophiles. Il y arriva pour mourir le dimanche 15 mars 1891, à 21 h. 30, à 3 km au nord-ouest de Rouen, à Mont-Saint-Aignan [Seine-Maritime], en son domicile du 36 route Neuve [avenue Gallieni].
Le 7 avril suivant, de Rouen, la veuve Hagué adressa une lettre à Quaritch pour lui proposer de lui céder, contre la somme de 6.000 francs, des dessins d’ornements ayant appartenu à son mari, ce que le libraire accepta.
Vente Blacker
Cinq ans plus tard, à la mort de son père, Carlos Blacker (1859-1928) apporta des reliures au British Museum : les experts annoncèrent en dix minutes qu’elles étaient fausses.
Pour éviter le ridicule, préserver l’honnêteté de Quaritch et la crédibilité de son expert, il fit procéder à la vente publique de la collection de reliures, sans publicité, le 11 novembre 1897 : Catalogue of a remarkable collection of books in magnificent modern bindings formed by an amateur (Recently deceased) (Londres, Sotheby, Wilkinson & Hodge, 1897, in-8, 18 p. et 8 planches hors-texte, 110 lots), dont une reliure authentique [n° 16. Biblia Germanico-Latina. Wittenberg, J. Krafft, 1574] et 109 reliures de Hagué, aux armes ou devises de François Ier [14 reliures], Henri II et Diane de Poitiers [11], Jean Grolier [11], Thomas Mahieu [7], Anne de Montmorency [6], Pierre-Ernest de Mansfeldt, gouverneur de Luxembourg [4], Charles IX [4], Diane de Poitiers [4], Catherine de Médicis [4], du pape Jules III [3], Henri II [3], Charles de Lorraine [3], Henri IV [3], Henri III [3], du pape Paul III [2], Philippe II [2], Marc Lauwereins, de Bruges [2], du pape Paul IV [2], Louis de Sainte-Maure, marquis de Nesle [2], etc. L’ensemble rapporta 1.907 £ et parmi les acheteurs furent remarquées les librairies Uriah Maggs, Henry Sotheran, et même Bernard Quaritch pour 27 lots.
Chirurgia è Graeco in Latinum conversa Vido Vidio Florentino interprete. Lut., P. Galterius, 1554 Aux armes de Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois |
Fuchsius. Commentaires tres excellens de l'Hystoire des Plantes. Paris, J. Gazeau, 1549 Aux armes de Henri II et de Diane de Poitiers |
Hieronymus (S.) Expositiones in Hebraicas questiones super Genesim. Venet., Fratres de Gregoriis, 1497 Aux armes du Pape (Paul IV ?) |
Macrobius. In Somnium Scipionis lib. II. Basil., Jo. Hervagius, 1535 Aux armes de Henri IV |
Officium Beatae Virginis Mariae, secundum Usum Romanae Ecclesiae. Manuscrit du XVe s. Au nom de Th. Maioli |
Seneca (L. Annaeus) Opera. Paris, J. du Puys, 1580 |
Thucydides. L'Histoire de la Guerre qui fut entre les Peloponnesiens et Atheniens. Paris, M. de Vascosan, 1559. Au nom de Jo. Grolier |
Veterinariae Medicinae lib. II, Johanne Ruellio Suessionensi interprete. Paris, S. Colin., 1530 Au nom de M. Laurin |
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