mercredi 28 septembre 2022

Le « Père Rouquette » (1833-1912), éditeur d’ouvrages de bibliographie

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Espalion, au bord du Lot


Pierre-Jean Rouquette est né le 12 novembre 1833, à Espalion [Aveyron], pays de Léon Conquet (1848-1897), dont il était le cousin. Ses parents, Joseph Rouquette, tourneur, né à Espalion le 16 janvier 1811, et Marie-Jeanne Garrousse, née aussi à Espalion, le 27 février 1813, s’y étaient mariés le 27 janvier 1833.


 

Pierre Rouquette vint à Paris vers 1844, pour entrer comme apprenti chez Aimée-Nicole Lepetit (1793-1880), qui tenait alors un cabinet de lecture place de l’Odéon [VIe] : elle était veuve de Jean-Léon-Fortuné Foucault (1784-1839), qui avait édité la Collection des mémoires relatifs à l’histoire de France de Petitot et Monmerqué (1819-1829, 130 t. en 132 vol. in-8), et mère de Léon Foucault (1819-1868), inventeur en 1851 du « pendule de Foucault », qui démontra la rotation de la Terre autour de son axe.

En 1855, Pierre Rouquette entra chez son oncle maternel Antoine Garrousse (1821-1885), 15 boulevard de Bonne Nouvelle [IIe], en face le théâtre du Gymnase [Xe], près de la porte Saint-Denis.

Le 7 mars 1859, il épousa Marguerite-Adelina Jourdan, née le 1er septembre 1833 au 13 rue Saint-Thomas-du-Louvre [Ier, supprimée], quartier des Tuileries, fille de Pierre Jourdan, piqueur de la Maison du Roi, et de Marie-Françoise-Célestine-Caroline Malhanche.

Il passa ensuite chez Alphonse Leclerc, 13 rue Soufflot [Ve], puis chez Hector Bossange, 25 quai Voltaire [VIIe], où il fit son dernier stage de commis libraire, habitant alors 10 rue de Seine [VIe].

Passage Choiseul
Photographie Charles Lansiaux. Musée Carnavalet

 

Breveté libraire le 4 mai 1861, il reprit à son propre compte la librairie d’Eugène Delaroque (1821-1874), alors 81 passage Choiseul [IIe], près la rue Neuve-Saint-Augustin ; le frère, Henri Delaroque, tenait alors une librairie 21 quai Voltaire [VIIe].

« Rouquette, gascon gasconnant, est un malin. Il avait imaginé de faire de sa librairie, qui était alors à l’entrée du passage Choiseul, un lieu de réunion et de causerie pour les bibliophiles. Pour rien au monde aucun de nous n’aurait manqué un seul jour d’y venir faire sa petite tournée, entre cinq et six heures.

Le libraire trouvait là, d’abord, une occasion toute naturelle de vendre ses livres. Mais il tirait mieux que cela de l’hospitalité qu’il nous offrait : en homme avisé, il écoutait. Il écoutait tous les jours une heure d’une conversation technique, dans laquelle les bibliophiles les plus compétents discutaient avec feu, se renseignaient les uns les autres, - et le renseignaient du même coup, - sur les points délicats du métier. »

(Henri Beraldi. Mes estampes. Lille, L. Danel, 1887, p. 76)

Dès 1862, il prit chez lui Léon Conquet (1848-1897), qui entra en 1870 chez Antoine Garrousse, pour lui succéder en 1874.  


 
1er mars 1879

Spécialisé dans la librairie ancienne et moderne, Pierre Rouquette publia tous les mois un catalogue de livres anciens et modernes, rares et curieux, et, dans le Journal des Libraires, des listes de desiderata.

« Rouquette est peut-être resté l’un des derniers libraires de Paris, qui sachent demeurer à leur place, sans affecter, comme tant d’autres d’une génération plus récente, des prétentions éditoriales, artistiques et littéraires que rien souvent ne pourrait justifier. Il n’a peut-être point son pareil, cependant, pour connaître les Livres des trois derniers siècles, non moins que les modernes ; mais il ne les juge qu’au point de vue exclusivement marchand, comme simples valeurs négociables. – Il a le mérite de ne pas prendre des airs entendus sur le fond littéraire ni sur la forme artistique, dont, on le sent tout de suite à son gros rire franc, il n’a vanité ni souci de s’occuper.

Mais, s’il s’agit de la belle condition d’un livre, de sa curiosité ou de sa rareté, des détails nécessaires pour le monter à sa plus haute valeur, tels que : états de planches, particularités d’impression, provenances historiques, prix précédents, etc., le bon Rouquette est Général sur son dada et nul parmi ses confrères ne lui dame le pion. »

(« Les Libraires de bibliophiles. Silhouettes parisiennes. J.-Pierre Rouquette ». Dans Le Livre moderne. Paris, Maison Quantin, 1890, Premier volume, p. 252)

Ancien receveur de l’administration de l’enregistrement et des domaines à Orgelet [Jura], Honoré-Joseph-Fortuné Roustan (1821-1901), libraire à Versailles [Yvelines], 12 rue d’Anjou, breveté le 12 janvier 1864, fit irruption un jour dans la vie du « Père Rouquette » :

« L’auteur présumé de l’ouvrage sur les Subtilités de la librairie parisienne, s’appelle NATSUOR (à rebours).

Un de ses confrères de Paris, avantageusement installé, depuis bientôt trois ans, dans le passage Choiseul, et, avec son caractère très aimable et son esprit toujours gai, assez bon enfant pour entendre la plaisanterie et ne jamais se fâcher de rien, un confrère de NATSUOR s’appelle ROUQUETTE.

La Bande noire a fait un rapprochement singulier de ces deux noms, en changeant dans le premier l’a en o et en enlevant, dans le second nom, certaine lettre [q] pour la remplacer par une autre [p] qui ne vaut pas mieux ; car, par une espèce de fatalité drolatique, la lettre substituée représente la chose subtile [pet] qui sort de l’objet désigné [cul] par la lettre supprimée.

La Bande noire, en cette circonstance seulement, a fait preuve d’un peu d’esprit, mais d’un esprit bien digne d’elle. La Bande noire a prétendu que NATSUOR et ROUQUETTE devraient s’associer sous la raison commerciale R…., R…. et Cie, et que cette maison serait appelée, à bon droit, la plus immorale et la plus féconde de toutes les Bandes noires ou sociétés illicites.

Lorsque Natsuor et Rouquette se trouvent ensemble dans les ventes publiques de livres, ce qui arrive assez souvent, on fait donc ce rapprochement malhonnête et bizarre ; et, lorsqu’ils sont déclarés adjudicataires, le crieur quelquefois, le plus souvent beaucoup d’autres personnes affiliées à la Bande noire ou qui lui sont étrangères, estropient méchamment leur nom et commettent à dessein cette fade équivoque.

Natsuor et Rouquette préviennent leurs confrères de Paris, spécialement la fameuse Bande noire, que cette plaisanterie de très mauvais goût ne saurait être tolérée plus longtemps, car elle a pour but secret de couvrir de honte et de ridicule l’honorable maison R…, R… et Ce, et d’empêcher ses membres de se présenter avec décence et la tête haute dans les ventes publiques de livres ; ce qui, indépendamment d’une grave injure personnelle, constitue deux autres délits, celui d’attentat à la morale publique et d’entraves apportées à la liberté des enchères.

Ceux de MM. Les membres de la sacro-sainte et invincible confrérie normande-parisienne qui, après cet avertissement public à eux dûment notifié, persisteraient à commettre sciemment ce triple délit correctionnel, seront livrés impitoyablement à toutes les rigueurs de la justice ; et l’on sait, par expérience, que lorsque Natsuor fait des menaces sérieuses, il tient religieusement et obstinément sa parole. »

* « Bande noire ou association contraire aux lois, et qui, par ses opérations et ses manœuvres secrètes et déloyales, et en poussant plus d’une fois les livres au-delà de leur valeur réelle, finit par dégoûter d’assister aux ventes les libraires et les particuliers, se rend ainsi maîtresse des prix qu’elle élève ou abaisse d’après ses seuls intérêts, et prélève dès lors tous les jours, surtout dans les ventes à domicile ou après faillite ou décès, des bénéfices énormes et immoraux au préjudice de la veuve et de l’orphelin, au préjudice encore des amateurs et des libraires, et au détriment même du trésor public et de l’utile et honorable corporation des commissaires-priseurs ; [sic]

Ce qui constitue le double délit d’entraves à la liberté des enchères et de coalition frauduleuse, délits prévus et punis par les articles 412 et 419 du Code Pénal. »

(Les Subtilités de la librairie parisienne. Versailles, Roustan, 1864)

Etiquette de Pierre Rouquette

 

« J’avais connu Rouquette quand il était chez Garrousse et je suis son plus ancien client, car je crois que c’est moi qui l’ai étrenné quand il s’est établi passage Choiseul.

Sa boutique était, il y a une douzaine d’années, le rendez-vous des amateurs qui faisaient alors la pluie et le beau temps dans les ventes et chez les libraires. Là, à l’heure de la verte [sic], on vous faisait l’autopsie d’un livre, de telle façon, qu’il était démonétisé et qu’aucun amateur sérieux n’eût voulu l’acheter. Rouquette avait une expression pour caractériser ces sortes d’exemplaires – quand ils étaient chez un confrère, - “ Ce sont des drouilles ! ”

Il faut dire tout de suite que ces jugements, sans appel, étaient rendus avec la plus entière bonne foi, ajoutée à la compétence la plus absolue. J’étais un des plus assidus de cette parlotte, mais je me trouvais alors et suis resté depuis, l’apôtre fervent des ouvrages du XIXe siècle.

Fréquentaient aussi chez Rouquette […] M. Eugène Paillet, celui de tous qui, à première vue, trouvait de suite la tare d’un livre. Amateur passionné alors et qui, depuis, s’est débarrassé de sa bibliothèque comme on se débarrasse d’une maîtresse qui a cessé de plaire ; à cette différence près que l’on met discrètement sur la cheminée de la demoiselle une liasse de billets de banque, tandis que M. Paillet, lui, en a reçu un gros paquet ; - Ernest Quentin-Bauchart, Lebarbier de Tinan, Truelle Saint-Evron, Lessore, E. Collin, Léon Mercier qui depuis ont vendu leurs livres ; Henri Béraldi [sic], notre collègue des Amis du Livre et des Bibliophiles contemporains, qui préludait alors à la remarquable collection de livres extra du XVIe et du XIXe siècle que nous avons admirée l’autre jour ; M. Daguin, quand on parle de la collection de M. Daguin, on dit : il a tout : classiques du XVe siècle [sic] ; ouvrages à figures du XVe siècle, livres illustrés du XIXe siècle, romantiques, en état parfait ; - M. Parran qui recherche surtout les romantiques ; M. Abel Giraudeau, M. Roger Portalis ; enfin le baron James-Édouard de Rothschild, vrai bibliophile, savant bibliographe, causeur charmant. Sa mort prématurée nous a tous attristés. Le baron (comme nous l’appelions familièrement) était très fin connaisseur en toutes sortes de livres ; mais en reliure moderne il était intransigeant, il n’admettait que Trautz-Bauzonnet.

On se livrait donc à des discussions quelquefois passionnées. Rouquette s’y mêlait très peu, tout en faisant son profit de ce qui se disait. On lui savait gré de son quasi-silence.

Rouquette avait ramassé (vers 1866) des grandes quantités d’ouvrages à figures du XVIIIe siècle, que personne, ou à peu près, ne recherchait alors ; je lui ai vu à la fois quatre ou cinq exemplaires des Chansons de Laborde, autant de Métamorphoses d’Ovide, des exemplaires en grand papier des Baisers et des Fables de Dorat, etc: [sic], à des prix ridicules de bon marché. Il m’a vendu, pour une centaine de francs, un exemplaire broché de Rabelais, de Le Duchat, de 1741, 3 vol. in-4°, broché – vous m’entendez, non rogné ni ébarbé. – Je l’ai encore.

C’était le bon temps !

A cette époque reculée, - il y a vingt-cinq ans, - on était acharné sur les éditions originales de Molière, Racine, La Fontaine et autres du XVIIe siècle. Aujourd’hui on n’en parle presque plus. Question de mode.

[…] Rouquette a publié, en 1883, de compte à demi avec L. Conquet, ma Bibliographie des ouvrages illustrés du XIXe siècle. Je ne puis me rappeler sans sourire le ton narquois que quelques-uns des amateurs susdits prenaient en parlant des ouvrages que je m’apprêtais à décrire : “ Le XIXe siècle, est-ce qu’il a produit quelque chose ? Les couvertures illustrées, qu’est-ce que c’est que ça ? – Elles en ont bien rabattu depuis, n’est-ce pas ? »

(Jules Brivois. Dans Le Livre moderne. Ibid., p. 363-365)

Marque de Pierre Rouquette

 

Pierre Rouquette édita :


 

Georges d’Heilly. Dictionnaire des pseudonymes (1868, tirage à très petit nombre [228 ex.] sur pap. de Hollande, 30 ex. numérotés et signés, dont 20 sur pap. Whatman et 10 sur pap. de Chine).

Photographie BnF


Georges d’Heilly. Les Fils de leurs œuvres (1868, 400 ex. pap. de Hollande, 20 ex. pap. Whatman, 10 ex. pap. de Chine ; ces 30 derniers ex. sont numérotés et signé pas l’auteur). 


 

Henry Cohen. Guide de l’amateur de livres à vignettes du XVIIIe siècle (1870, 520 ex. sur pap. de Hollande, 15 ex. sur pap. Whatman, 15 ex. sur pap. de Chine) ; 2e édition (1873, front. eau-forte de Chauvet, 500 ex. sur pap. de Hollande, 50 ex. sur pap. Whatman) ; 



Guide de l’amateur de livres à figures et à vignettes du XVIIIe siècle. Troisième édition, entièrement refondue et considérablement augmentée par Charles Mehl (1876, titre rouge et noir, 1 ex. sur pap. de Chine, 50 ex. sur pap. Whatman, 500 ex. sur pap. de Hollande, 100 ex. sur pap. vélin ordinaire) ; 



Guide de l’amateur de livres à vignettes (et à figures) du XVIIIe siècle. Quatrième édition, revue, corrigée et enrichie de près du double d’articles, de toutes les additions de M. Charles Mehl, et donnant le texte de la deuxième édition intégralement rétabli (1880, à 2 colonnes, 3 ex. sur pap. de Chine, 100 ex. sur pap. de Hollande, 900 ex. sur gr. pap. vélin) ; 



Guide de l’amateur de livres à gravures du XVIIIe siècle. Cinquième édition, revue, corrigée et considérablement augmentée par le baron Roger Portalis (1886, 100 ex. sur pap. de Hollande, 1.000 ex. sur beau pap. vélin) :

« Cette bibliographie a, non seulement fait le succès des ouvrages illustrés du XVIIIe siècle longtemps négligés et même dédaignés, mais a provoqué des réimpressions de ces ouvrages et de nombreuses imitations. Cette vogue durera autant que dure une mode. Le feu des enthousiastes baisse déjà, demain il sera éteint. Le livre, comme l’homme, séduit par la richesse de son costume les frivoles et les ignorants mais il n’obtient la faveur et l’estime des amateurs intelligents, des vrais bibliophiles, que par sa valeur intrinsèque. La curiosité, en bibliophilie, n’est qu’une exception, elle n’est pas la règle, et quand elle porte sur une fantaisie, un caprice, un engouement, elle meurt presqu’aussi vite que l’accident qui l’avait fait naître. Les baisers de Dorat se vendaient 25 fr., il y a vingt ans, 3000 fr., il y a deux ans ; ils se vendent aujourd’hui 500 fr. ; demain ils se vendront 100 fr. ; dans deux ans 25 fr., et dans vingt ans, ils reprendront leur place insoucieuse sur les quais. »

(Antoine Laporte. Histoire littéraire du dix-neuvième siècle. Paris, F. Vieweg, 1885, t. II, p. 214)

« Les deux premières éditions furent rapidement épuisées, et lorsqu’il s’agit de faire une troisième édition, M. Cohen étant malade, l’éditeur chargea Charles Melh [sic pour Mehl] de le remplacer. Ce dernier accepta la proposition de M. Rouquette, sans faire aucune convention relative à la rémunération de son travail, et à la propriété littéraire.

Cette troisième édition épuisée à son tour, M. Cohen, qui était revenu à meilleure santé, fut chargé par M. Rouquette de faire une quatrième édition de son guide. Le jour où elle parut, M. Melh [sic] se considéra comme victime d’un plagiat littéraire et assigna devant le tribunal de la Seine MM. Rouquette et Cohen, en leur réclamant 10,000 francs de dommages-intérêts, et l’insertion du jugement à intervenir dans dix journaux. “ Vous me devez, disait M. Melh [sic], d’abord le paiement de mon travail ; ensuite la réparation du préjudice que vous m’avez causé en reproduisant ce même travail dans la quatrième édition, et ce sans mon autorisation.”

Dans son audience du 6 mai [1882], le tribunal civil de la Seine a jugé, en se basant sur un ensemble de faits, qu’en ce qui concernait l’éditeur Rouquette, il y avait lieu de le condamner à payer à M. Melh [sic], du chef de rémunération de travail pour la troisième édition, une somme de 1,000 francs, et qu’en ce qui concernait Cohen, aucune faute de nature à motiver une condamnation à sa charge envers Melh [sic] ne pouvait lui être imputée. »

(L’Art moderne, 11 juin 1882, p. 189-190)

[Voir Bertrand Hugonnard-Roche : http://le-bibliomane.blogspot.com/2022/09/la-cuisine-dans-larriere-boutique-de.html]



Charles Asselineau. Bibliographie romantique. Catalogue anecdotique et pittoresque des éditions originales des œuvres de […]. Seconde édition, revue et très-augmentée, avec une eau-forte de Bracquemond (1872, 300 ex. in-8 carré pap. vélin collé, 100 ex. in-8 Jésus, pap. vergé, 8 ex. in-8 Jésus pap. de Chine, 4 ex. in-8 Jésus pap. de couleur ; les 108 ex. in-8 Jésus sont ornés de l’eau-forte front. par Célestin Nanteuil de la première édition chez René Pincebourde, sous le titre Mélanges tirés d’une petite bibliothèque romantique, en 1866).


 

Charles Asselineau. Appendice à la seconde édition de la Bibliographie romantique (1874).  


 

A. Poulet-Malassis. Les Ex-Libris français depuis leur origine jusqu’à nos jours (1874, fac-similé du plus ancien ex-libris français connu [Dacquet], 100 ex. sur Jésus vergé, paraphés par l’auteur) ; 



Nouvelle édition, revue, très-augmentée et ornée de vingt-quatre planches (1875, 350 ex. dont 110 ex. pap. vergé, 15 ex. pap. Whatman, 12 ex. pap. de Chine).


 

Costumes du XVIIIE siècle, tirés des Prés Saint-Gervais (1874, 20 eaux-fortes de A. Guillaumot Fils).


 

Louis Dangeau [Louis Vian (1833-1884)]. Montesquieu. Bibliographie de ses œuvres (1874, 100 ex.) :

« ….. Les bibliophiles, les bibliographes, les bibliognostes, les bibliologues, les bibliomanes, les bibliopodes, les bibliotactes, les bibliotaphes et même les bibliothécaires se recherchent et aiment à se réunir dans les librairies. En effet, à quelle personne et en quel endroit l’acquéreur d’un livre précieux ou rare peut-il aussi bien faire comprendre son bonheur et espérer d’en avoir de semblable ?

Avant le déluge (ce n’est pas le 4 septembre que je veux dire), il en devait être ainsi. On connaît les gens de lettres qui se donnaient rendez-vous chez Barbin, chez Prault, chez Debure, chez Lefevre, chez Didier, chez Techener. J’ai vu depuis les modistes de D., les archéologues d’A., les nobles de B., les poëtes de L., les curieux de C., les banquiers de F. et les artistes d’H.

Votre librairie est autre, Monsieur Rouquette. On devine qu’elle est en même temps près de la bibliothèque Richelieu, du Théâtre-Italien et des Bouffes : elle est aussi variée que votre clientèle.

Chaque amateur divers vient y chercher les objets de sa prédilection. Les uns veulent des incunables, des Aldes, des Elzévirs, des Cazins exclusivement ; les autres, des écrivains du XVe, du XVIe, du XVIIe, du XVIIIe ou du XIXe siècle, exclusivement toujours. Ceux-ci ne s’attachent qu’aux papiers, soit teinté, soit whatman, soit chamois ; ceux-là ne désirent que des reliures de Le Gascon, de Derome, de Lortic ou de Trautz-Beauzonnet [sic] ; tel n’achète que les ouvrages qui n’ont pas été mis dans le commerce ; tel (membre de l’Institut, je vous le dis tout bas) préfère les livres à vignettes.

Aussi, que de bavardages sans prétention sur les menus détails de la bibliophilie : les ex libris, les errata, les cartons, les filigranes, les marques des imprimeurs, les dentelles et les petits fers à froid ! Chacun s’y montre tour à tour intéressant comme M. Paul Lacroix, expert comme M. Poulet-Malassis, causeur comme Sarcey, communicatif comme le baron Feuillet de Conches, complaisant comme M. de Lescure ; tous se donnant l’un à l’autre le goût des livres, le moins exigeant, le moins trompeur et le moins dangereux des amours.

Il vous fait de la peine que toutes ces conversations aient lieu chez vous en pure perte et vous désireriez que chaque client voulût bien écrire ce qu’il y répète souvent, trop souvent peut-être. Vous m’engagez même à donner l’exemple. […]

Monsieur Rouquette, vous croyez que mon petit fascicule rendra service aux amateurs et aux libraires ; cette perspective me flatte, parce qu’il est toujours agréable de faire des ingrats. »

(« Lettre à M. P. Rouquette, libraire », p. I-IV)


 

Mémoires et réflexions du comte de Caylus […], suivis de l’Histoire de M. Guillaume, cocher (1874, front. et fac-similé, 500 ex. pap. vergé et 10 pap. de Chine).


 

Henri Draibel. L’Œuvre de Moreau le Jeune. Notice & catalogue (1874, portr. gravé par Ad. Varin, d’après Cochin, 200 ex.).


 

Sept dessins de gens de lettres. MM. Victor Hugo, Prosper Mérimée, Edmond & Jules de Goncourt, Charles Baudelaire, Théophile Gautier, Charles Asselineau. Fac-similés Par M. Aglaus Bouvenne (1874, 70 ex. numérotés et paraphés, dont 50 seulement mis dans le commerce).  


 

Un rêve. Ballade, par Alfred de Musset (1775 [i.e. 1875], 100 ex. pap. vergé, 10 ex. pap. Whatman, 10 ex. pap. Chine).


 

Catalogue de la bibliothèque romantique de feu M. Charles Asselineau (1875, avec A. Voisin et J. Baur).


 

[Henry Harrisse]. Histoire du chevalier des Grieux et de Manon Lescaut. Bibliographie et notes pour servir à l’histoire du livre. 1728-1731-1753 (1875, 127 ex. numérotés, dont 2 sur pap. Whatman ; les numéros 1 à 27 n’ont pas été mis dans le commerce).



Lettre inédite de Philotée O’Neddy, auteur de : Feu et flamme, sur le groupe littéraire romantique dit des Bousingos (1875, 100 ex. pap. vergé, 10 ex. Chine). 


 

[A. P.-Malassis]. Théatre de Marivaux. Bibliographie des éditions originales et des éditions collectives données par l’auteur (1876, 100 ex. pap. vergé, 5 ex. pap. de Chine).


 

[Marcel Compaignon de Marcheville]. Bibliographie et iconographie des œuvres de J.-F. Regnard (1877 [1878 sur la couv.]).


 

A. Parran. Romantiques […]. Honoré de Balzac (1881, 1 fig. de Tony Johannot).


 

Jules Brivois. Guide de l’amateur. Bibliographie des ouvrages illustrés du XIXe siècle, principalement des livres à gravures sur bois (1883, 900 ex. sur pap. vergé et 50 ex. sur gr. pap. de Hollande, tous numérotés et paraphés par l’auteur, les numéros pairs portant le nom de Conquet, impairs celui de Rouquette).


 

Maurice Clouard. Bibliographie des œuvres d’Alfred de Musset et des ouvrages, gravures & vignettes qui s’y rapportent. Lettre de Charles de Lovenjoul et portrait d’Alfred de Musset, gravé à l’eau-forte par M. Charbonnel (1883, 20 ex. numérotés sur gr. pap. vélin, 300 ex. sur pap. vélin blanc ; en outre, tirage spécial pour le portrait seul : 25 ex. sur pap. du Japon en noir, 15 ex. sur pap. du Japon à la sanguine).


 

Contes et nouvelles en vers par Jean de La Fontaine, ornés d’estampes d’Honoré Fragonard, Monnet, Touzé et Milius. Édition revue et précédée d’une Notice par Anatole de Montaiglon (1883, 2 vol., 400 ex. numérotés).



Le Roman comique de Scarron, peint par J.-B. Pater et J. Dumont le Romain (1883, 150 ex. sur pap. du Japon, 25 ex. sur pap. de Chine, 200 ex. sur pap. vergé et 200 ex. sur pap. vélin à la cuve, tous numérotés et paraphés par l’éditeur).


 

Le Neveu de Rameau. Satire par Denis Diderot, revue sur les textes originaux et annotée par Maurice Tourneux. Portrait et illustrations par F.-A. Milius (1884, 150 ex. numérotés sur pap. du Japon, 350 ex. numérotés sur pap. vergé).


 

Bibliographie de Mathurin Regnier, par Henri Cherrier (1884, 200 ex.).


 

A. Privat d’Anglemont. Paris anecdote (1885, 50 dessins à la plume par J. Belon, portr. gravé par R. de Los Rios, 50 ex. numérotés sur pap. du Japon).


 

A. Privat d’Anglemont. Paris inconnu (1886, 63 dessins à la plume par F. Coindre, 50 ex. numérotés sur pap. du Japon ).  


 

R. Souhart. Bibliographie générale des ouvrages sur la chasse, la vénerie & la fauconnerie (1886, 500 ex. sur vélin, 50 ex. sur Hollande).


 

Paul Lacombe. Bibliographie parisienne. Tableaux de mœurs (1600-1880) (1887, 500 ex. numérotés sur pap. vélin).



Émile Bergerat. Enguerrande. Poème dramatique (1888, 375 ex. numérotés sur pap. vélin).



 

[Dominique Vivant-Denon]. Point de lendemain. Conte illustré de treize compositions de Paul Avril (1889).

104 boulevard Rochechouart (1902)

 

Membre de la Société des Bibliophiles bretons et de l’Histoire de Bretagne (12 juillet 1877), Pierre Rouquette décéda le 16 février 1912, en son domicile, 104 boulevard Rochechouart [boulevard Marguerite de Rochechouart, XVIIIe]. Une foule considérable, parmi laquelle de nombreux amateurs et libraires, tint à lui rendre les derniers devoirs lors de ses obsèques, qui furent célébrées le 19 février, en l’église Saint-Jean-l’Évangéliste [église Saint-Jean de Montmartre, XVIIIe].   

Son fils Émile-Alexis Rouquette, né le 9 juillet 1865 à Espalion, à la maison carrée, domicile de son grand-père paternel, se forma chez lui, au contact des bibliophiles de la génération de 1875.

« On peut dire que ce fut chez Rouquette que se forma ce fameux type du Bibliophile de 1875, dont l’ami Béraldi [sic] a si spirituellement tracé la physiologie dans l’inimitable Catalogue Paillet ; ce bibliophile de 1875 toujours fiévreux, surexcité, portant la passion du livre à son paroxysme et menant une spéculation effrénée, qui rappelait le système de Law et les plus beaux jours de la loterie. – Béraldi [sic] nous a peint ce bibliophile aimable et accueillant, remuant et agité, vendant, brocantant, échangeant, usant de tous les moyens pour parvenir à la possession de l’irréprochable et de l’exquis. »

(« Les Libraires de bibliophiles. Silhouettes parisiennes. J.-Pierre Rouquette ». Dans Le Livre moderne. Ibid., p. 254)  

Le 12 juin 1889, à Paris [XVIe], Alexis Rouquette épousa Henriette Thébault, née le 2 avril 1871 dans le XVIe arrondissement de Paris, puis s’associa avec son père en 1890, dans la Librairie Rouquette et Fils, 69-73 passage Choiseul. Les Rouquette père et fils éditèrent :


 

Georges Vicaire. Bibliographie gastronomique (1890, fac-similés, 50 ex. sur pap. de Hollande, 450 ex. sur beau pap. vélin).

Photographie BnF


Le Banquet. Publication mensuelle (1892-1893) : « Quelques jeunes gens ont imaginé qu’il n’était pas superflu d’ajouter une ligne à la liste des Revues où s’exprime l’adolescence contemporaine. »


 

Les Éditions illustrées des Fables de La Fontaine, par le DR Armand Després (1892, 10 fig. hors texte, 270 ex. numérotés à la presse, dont 30 sur pap. du Japon avec une double suite des fig. imprimées sur Chine volant, 240 sur pap. vélin).


 

Les Illustrations des Contes de La Fontaine. Bibliographie. Iconographie. Par A. Hédé-Haüy (1893, 300 ex. numérotés, dont 250 mis dans le commerce).


 
Marque de Alexis Rouquette

Alexis Rouquette édita seul Georges Vicaire. Manuel de l’amateur de Livres du XIXe siècle, 1801-1893 (1894-1920, 8 t., 50 ex. numérotés à la presse sur pap. de Hollande, 1.000 ex. numérotés à la presse sur pap. vélin, 2 ex. numérotés I et II sur pap. de couleur non mis dans le commerce) 

Photographie Librairie Koegui


et Maurice Vaucaire. Vingt masques (1895, dessins de Louis Morin, 100 ex. sur Japon impérial).


 

Le premier livre publié par Alexis Rouquette et portant la nouvelle adresse de sa librairie transférée en 1902 du passage Choiseul au 18 rue La Fayette [IXe], 



fut La Légende de sœur Béatrix, contée jadis par Charles Nodier, avec des illustrations en couleurs de Henri Caruchet (1903, 150 ex. numérotés sur pap. du Japon, 10 ex. numérotés sur pap. vélin réimposés in-4 et aquarellés par l’artiste).

Le 3 mars 1904, à Neuilly-sur-Seine [Hauts-de-Seine], Alexis Rouquette, veuf de Henriette Thébault, épousa Alice-Jeanne Dupont, née le 10 avril 1875 à Paris [VI], fille de Louis-François Dupont (° 1839), libraire rue de Richelieu [IIe], et de Françoise-Amélie Roynot.

D’autres bibliographies furent publiées par Alexis Rouquette :


 

Comte de Rochambeau. Bibliographie des œuvres de La Fontaine (1911, portr., 300 ex.).


 

Guide de l’amateur de livres à gravures du XVIIIe siècle. Sixième édition, revue, corrigée et considérablement augmentée par Seymour de Ricci (1912, 2 parties, 50 ex. sur pap. de Hollande et 1.000 ex. sur pap. vélin, tous numérotés à la presse).

10 rue Saint-Louis, Villemomble (septembre 2020)

 

Alexis Rouquette habita Villemomble [Seine-Saint-Denis], 10 rue Saint Louis, puis se retira à Espalion, où il mourut le 7 janvier 1942. Alice Dupont mourut à Gagny [Seine-Saint-Denis], le 26 mars 1948.

Fils du premier mariage de son père, Ferdinand-Joseph-Alexis Rouquette, né le 25 juillet 1892 au 57 rue Richelieu [IIe], croix de guerre 1914-1918, reprit la librairie en 1924, après son mariage à Paris [XVIe], le 4 juin 1924, avec Marie-Antoinette Navarre, née le 13 juin 1895, fille de Eugène Navarre (° 1853), administrateur de sociétés. 

32 avenue Bugeaud (mai 2022)


Ferdinand Rouquette se retira des affaires en 1965 et mourut le 16 juin 1981 en son domicile, 32 avenue Bugeaud [XVIe]. Sa veuve lui survécut jusqu’au 13 mai 1986.