dimanche 28 février 2021

Les Rapilly, cousins pirouais, libraires et marchands d’estampes

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Château fort de Pirou (juillet 2013)
Depuis le XVIIe siècle, les Rapilly étaient cultivateurs au village de Le Moitier, sur la commune de Pirou [Manche], sur la côte qui fait face à l’île de Jersey.

Michel Rapilly (1740-1797), fils de François Rapilly et de Louise Ybert, mariés à Pirou le 8 octobre 1726, fut baptisé en l’église Saint-Martin de Pirou le 31 mars 1740. 

In Octave Uzanne. Les Quais de Paris (Paris, May et Motteroz, 1896, p. 37)

Arrivé à Paris, il devint étaleur de vieux livres sur les quais. En 1770, il s’associa avec un collègue étaleur, Jacques-Jean Esnauts [exceptionnellement Énault ou Hénaut] (1739-1812), baptisé le 16 mai 1739 en l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Magny-le-Désert [Orne], pour éditer et vendre des estampes, 259 rue Saint-Jacques [Ve], « À la Ville de Coutances ». Esnauts et Rapilly furent, en particulier, les éditeurs de 



la célèbre Gallerie des modes et costumes français (1778-1785), 



du Nouveau Plan routier de la Ville et Faubourgs de Paris (1780) 



et des Vues des plus beaux édifices publics et particuliers de la ville de Paris (1787).

En 1787, Michel Rapilly épousa Marie-Jeanne Esnauts, fille de son associé. À la mort de Rapilly, la raison sociale continua entre Esnauts et la veuve Rapilly, mais en 1798, il y eut dissolution de Société et cessation de commerce entre eux deux, et une vente eut lieu à partir du 13 floréal An VI [2 mai 1798] : 

Catalogue de planches gravées (Paris, F. L. Regnault, An VI, in-8, 15-[1 bl.] p., 109 lots)
Photographie INHA


Un cousin de Michel Rapilly, Charles-Alexandre Rapilly, naquit à Pirou le 18 germinal An IV [7 avril 1796], fils de Charles-Thomas Rapilly, cultivateur, et de Madeleine Hacquebet. Libraire sans boutique à Paris dès 1818, il finit par s’installer deux ans plus tard 23 rue Vivienne [IIe] et fut breveté le 21 juin 1820. 

Il déménagea 23 boulevard Montmartre [IIe] en 1822, 



puis 43 passage des Panoramas [IIe] en 1825, et décéda à Paris le 21 juin 1833.   

« Le magasin de librairie de M. Rapilly, situé passage des Panoramas, est l’un des plus beaux que l’on puisse recommander à l’attention publique. On s’y procure à un juste prix les livres les plus estimés qui puissent être offerts en étrennes. Son assortiment se compose et des éditions les plus distinguées de nos classiques, et de tous les livres contemporains d’un mérite éprouvé, d’ouvrages d’utilité, d’éducation et d’agrément. Ce beau magasin referme des éditions de tous les formats, et présente un ensemble très varié de livres confectionnés en demi-reliures d’une élégante simplicité de goût, ou d’éditions superbes reliées avec un luxe précieux. Aussi ce magasin est il très-visité. »

(Journal de Paris et des départements, 31 décembre 1825, p. 2)

La maison Rapilly qui a existé sous ce nom sur le quai Malaquais [VIe], n’était point la suite de Esnauts et Rapilly, ni de Charles-Alexandre Rapilly, malgré l’allusion « À la Ville de Coutances » figurant sur une de ses cartes de commerce, mais bien du fonds de Lenoir, créé en 1808.

Musée Carnavalet

Cette maison fut fondée par François-Alexandre Rapilly, né à Pirou le 3 septembre 1820, qui était venu à Paris à l’âge de 17 ans, pour entrer dans la maison de l’un de ses cousins, Louis-Charles Lenoir, marchand d’estampes. Ce Lenoir était né à Pirou le 11 mars 1764, fils de Gilles Lenoir, laboureur, et de Jeanne Esnouf ; 

1 quai Malaquais (1917)
Musée Carnavalet

en 1808, il avait quitté sa boutique du 1 quai Malaquais [détruit], à droite de la porte cochère en entrant, qu’il louait 886 francs depuis 1803, 

5 quai Malaquais (1904)
Photographie INHA

pour le 5 quai Malaquais ; après sa mort, arrivée en 1822, la direction de la boutique fut assurée par sa veuve, Vorlette Sauveneau, puis, à partir de 1838, par Lenoir « neveu ».

En 1850, François-Alexandre Rapilly épousa, le 12 janvier, Claudine-Pauline Piltan, née à Paris le 8 décembre 1827, et reprit la maison Lenoir. Il occupa les deux boutiques, à droite et à gauche de la porte cochère, une remise et un appartement lambrissé au troisième au-dessus de l’entresol, moyennant un loyer de 3.500 francs, qui passa à 6.500 francs en 1880. 

Collection Grolier Club de New York

Breveté depuis le 29 avril 1852, Rapilly déménagea en 1884 au 53 bis quai des Grands Augustins [VIe], y publia un Catalogue de livres sur les beaux-arts et y demeura jusqu’en novembre 1891, à la tête d’une librairie spécialisée en livres d’art. 



Il mourut le 18 janvier 1892 en son domicile, 40 rue Saint-André-des-Arts [VIe]. Son épouse lui survécut jusqu’au 23 juillet 1904.


 

Depuis plusieurs années, François-Alexandre Rapilly avait associé son fils Georges-Alexandre-Frédéric Rapilly à son commerce. Georges Rapilly était né le 19 août 1863 au 5 quai Malaquais. Il avait épousé, le 28 novembre 1891, à Paris [IIe], Marie-Geneviève Boutard, née à Paris [IIe] le 22 mai 1868, fille de Aline-Virginie Henry (1847-1928) et de Jacques-Louis-Jules Boutard (1836-1897), tapissier.

Marie-Geneviève Boutard était la petite-fille de Charles-Auguste Henry (1822-1897) : marié à Céline Dubois (1823-1900) le 11 août 1846 à Paris, il avait succédé à son père, Antoine-Charles Henry (1789-1847), successeur lui-même de son beau-père, Simon Arrachard, fondateur en 1809 d’un célèbre magasin de nouveautés, « La Pensée », 5 rue du Faubourg-Saint-Honoré [VIIIe

Enseigne de la maison Henry, par Adolphe Willette
Musée Carnavalet

après la Commune de 1871, l’enseigne devint « Henry à la Pensée » ; Charles-Auguste Henry et Céline Dubois terminèrent leur existence à Meudon [Hauts-de-Seine].

N° 13, 1er juin 1895


Après la mort de son père, Georges Rapilly publia successivement un Catalogue trimestriel de livres d’art, un Bulletin mensuel de livres d’art et un Catalogue de livres d’art





Le 10 mai 1897, jour de la naissance de son fils, Georges Rapilly, domicilié alors 243 rue Dauphine [VIe], transféra sa librairie au 9 quai Malaquais, à côté des salles d’exposition de l’École des Beaux-Arts.

En 1927, Georges Rapilly était domicilié 9 rue des Beaux-Arts [VIe]. Il mourut le 23 juillet 1943 en son domicile, 4 rue Jean Bart [VIe; son épouse lui survécut jusqu’au 25 février 1944.

Son fils Daniel-Jules Rapilly est né le 10 mai 1897 au domicile de ses parents. Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, son courage lui valut la croix de guerre avec citation à l’ordre du régiment en juin 1918. Démobilisé en septembre 1919, il exerça la librairie avec son père jusqu’en 1943, puis seul jusqu’à la liquidation de la librairie Rapilly et Fils en 1966.

Le 14 juin 1927, il épousa Louise-Hubertine-Éva Moncouët, née le 2 mars 1904 à Castelnau [Gironde]. Il habitait 4 place Monge [Ve] et avouait être plus attiré par le Museum national d’histoire naturelle que par la librairie. En 1942, il entra à la Société mycologique de France, puis à la Société des Naturalistes parisiens, dont il devint un membre influent. Il passait ses lundis, jour de fermeture de la librairie, au Museum.

Daniel Rapilly mourut le 30 mars 1971, à Paris [Ve], son épouse le 22 février 1989.  

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