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Niort, par Tavernier de Jonquières (1780) Photographie BnF |
La famille Arnauldet a habité Niort [Deux-Sèvres] depuis au moins la première moitié du XVIe siècle et a donné plusieurs membres à la magistrature locale et au corps de ville.
Jean Arnauldet, seigneur de La Repoussonnière, sur la commune
de Chavagné [La Crèche, Deux-Sèvres], avocat à Niort, laissa quinze enfants de
Catherine Coutocheau.
Pierre Arnauldet, procureur à Niort, fut baptisé le 18 octobre
1627 en l’église Saint-André, épousa Catherine Le Roy le 11 septembre 1650 en l’église Notre-Dame et
fut inhumé le 27 mai 1674.
Claude Arnauldet, seigneur du Mairé, sur la commune de
Périgné [Deux-Sèvres], procureur à Niort, domicilié sur la paroisse Saint-André,
né le 24 juin 1664 et inhumé le 11 décembre 1733, épousa Radegonde Charton le
23 janvier 1690 en l’église Saint-André, puis, devenu veuf, Marianne Papineau, le 20 janvier 1705 en l’église Notre-Dame, née et décédée à Niort,
respectivement le 3 décembre 1683 et le 26 juin 1730. Son frère aîné, Jean Arnauldet,
avocat et poète, fut baptisé en l’église Notre-Dame de Niort le 1er
mai 1654, épousa Françoise Viault le 27 avril 1699 en l’église Saint-Léger de
Saint-Maixent-l’École [Deux-Sèvres], où il fut inhumé le 7 décembre 1726.
Jacques-Claude-Louis Arnauldet, seigneur du Mairé, avocat et
échevin à Niort, né le 15 février 1719
et baptisé le même jour en l’église Notre-Dame, décédé le 13 novembre 1788, épousa Marie-Magdelaine Vincent, le 23 novembre 1745 à
Aigonnay [Deux-Sèvres], née à Aigonnay le 20 novembre 1728 et décédée à Niort
le 8 messidor An IX [27 juin 1801].
Philippe-Louis Arnauldet |
Philippe-Louis Arnauldet, archiviste du département des
Deux-Sèvres, né à Niort, paroisse Notre-Dame, le 23 août 1758, mort à Niort, rue des Yvers, le 22 mars 1847, épousa le 23 germinal An IV [12 avril 1796]
Marie-Bienvenue-Catherine Lussauld, née à Niort
le 23 août 1762 et décédée dans la même ville, rue Saint-Gelais, le 20 mai 1851.
Théodore Arnauldet, est né à Niort le 5 floréal An IX [25 avril 1801] ; juge d’instruction à La Roche-sur-Yon [Vendée], puis à Fontenay-le-Comte [Vendée], où il mourut, rue Royale, le 15 mars 1860, des suites d’une longue et cruelle maladie. Il fut inhumé à Mouchamps [Vendée], où il avait épousé, le 1er octobre 1832, Célie-Louise-Esther Deladouepse, née à La Bobinière, sur la commune de Mouchamps, le 26 frimaire An XI [17 décembre 1802],
Siège de l'Institution L'Espérance (2017) |
et décédée le 5 juillet 1867 à Bourdevaire,
sur la commune de Sainte-Cécile [Vendée]. Il a
laissé des Niortéides ou Études historico-poétiques sur la Ville de Niort et
sur quelques-uns de ses Environs (Niort, A. Couquaux, s. d. [1857]).
« Entré jeune dans la magistrature, il fut d’abord attaché au tribunal civil de Fontenay, où il remplit, pendant quelques années, les fonctions de juge d’instruction, avec cette droiture et ce sentiment profond de la justice et du devoir qui furent la règle invariable de sa vie entière. – Appelé ensuite à faire partie, en qualité de juge, du tribunal de Napoléon-Vendée [La Roche-sur-Yon], son intelligence des affaires et son austère probité lui gagnèrent aussitôt l’estime des justiciables et de ses collègues. Pour lui, la magistrature était un sacerdoce ; les affaires soumises à son arbitrage, tant minimes fussent-elles, avaient toujours de l’importance à ses yeux, et l’on peut assurer que jamais il ne rendit un jugement, en matière civile ou criminelle, sans l’avoir mûri dans sa conscience. Avec cela, son indulgence et la bonté de son cœur n’avaient pas de bornes. Il savait manier avec mansuétude le glaive si redoutable de la loi. “ Ne fermons pas la porte au repentir,”
Avait-il coutume de dire chaque fois qu’il s’agissait de punir un
coupable. – Nous l’avons vu déplorer le sort d’un pauvre diable frappé de six
jours de prison, et garder le lit à la suite d’une condamnation à mort. »
(B. Fillon. « Chronique locale ». Dans L’Indicateur,
17 mars 1860, p. 2)
Paul-Louis Arnauldet est né à Fontenay-le-Comte, Grande Route de Niort, le 30 juin 1833. Devenu avocat, il fut attaché au cabinet du « baron » Georges-Eugène Haussmann (1809-1891), préfet de la Seine. Resté célibataire, il mourut dans sa 45e année, le 19 avril 1878, en son domicile du 38 rue Rochechouart [IX].
Photographie Librairie du Cardinal |
Sa bibliothèque fut vendue du mardi 3 au samedi 7 décembre 1878, en
5 vacations, à l’Hôtel des Commissaires-Priseurs, rue Drouot, salle n° 5, au premier :
Catalogue de la bibliothèque, des estampes et dessins De feu M. Paul
Arnauldet (Paris, A. Voisin, 1878, in-8, 176 p., 1.203 lots), dont
Beaux-Arts, Céramique, Littérature, Histoire, Bibliographie, Réimpressions de
pièces rares et curieuses, Éditions Jouaust, Lemerre, Didot, Gay, etc.,
Reliures de Capé, Lortic, Duru, Cuzin, Allô, Amand, R. Petit.
Parmi les volumes ornés d’ex-dono ou d’autographes ajoutés :
Béranger (312), Th. Gautier (322 et 937), Auguste Barbier (336 et 340),
Alexandre Dumas fils (377), Barbey d’Aurevilly (381), Baudelaire (399),
Banville (402), Alfred de Vigny (465 et 826), Lassailly (563), Alexandre Dumas
(622), Lamartine (962).
399. Les Fleurs du
mal, par Charles Baudelaire. Paris, Poulet-Malassis et De Broise, 1857, in-12, non
rogn., mar. bleu, dos à nerfs, dent. int., tête dorée sur témoins, couv. (R.
Petit). Ed. originale, première émission. Lettre autographe de Baudelaire à
Poulet-Malassis [2 mai 1857]. Signature sur le premier plat de couv., ex-libris
gravé, chiffre aux angles des plats et en queue du dos. [passé dans la
bibliothèque de Henry Bouillier (1924-2014)]
« [1878] -
Ces jours-ci, on a fait la vente d’un nommé Arnauldet, frère d’un employé que j’ai
connu au cabinet des Estampes. Au milieu d’un fouillis immense, il y a quelques
très jolies et charmantes choses, achetées à vil prix par Burty [Philippe Burty
(1830-1890)], qui a suivi la vente, depuis les salles d’en haut jusqu’à Mazas [comme
la prison] : la salle d’en bas, où on vend la literie et les batteries de cuisine.
Ce garçon,
originaire du Poitou, et sorti d’une famille de la magistrature, en ce temps de
sensualisme grossier, était un type du sensuel délicat, et du curieux dans
les choses du boire et du manger.
Il n’aimait qu’une
certaine eau-de-vie fabriquée près de la [sic] Rochelle, et dont la provision
était vendue tous les ans, à l’Angleterre. Cette eau-de-vie donc, il la faisait
racheter en Angleterre, et il la buvait dans un petit verre, gardé dans un
étui, qu’on ne lavait jamais, et qui avait pris l’irisation d’un lacrymatoire
antique. Le café, on lui en triait un petit sac, qui était choisi grain par
grain. Il faisait venir des huîtres d’un certain marchand d’huîtres de
Marennes, et les donnait à garder dans une cave du quartier qui leur conservait
une fraîcheur particulière. Il s’était fait fabriquer une semaine de pipes d’écume
de mer, d’une minceur charmante, baptisées de noms délicieux, et qu se
succédaient l’une après l’autre.
Enfin, chez ce
garçon qui n’avait pas plus de douze à quinze mille livres de rente, toutes les
choses du boire et du manger venaient du meilleur fournisseur existant dans le
monde, qu’il fût à Paris ou aux Grandes Indes, et un jour, que le peu difficile
Bracquemond [Félix Bracquemond (1833-1914)] déjeunait chez lui, et que sa rude
nature s’impatientait de toutes ces recherches, de toutes ces provenances, il
lui jeta :
-
Et votre sel, d’où le faites-vous venir ?
-
De Morelles [i.e. Moreilles, Vendée], répondait
flegmatiquement Arnauldet.
Il vivait, cet
épicurien, dans un petit monde de jouisseurs délicats, dont était Pingard [Antonius
Pingard (1797-1885)], l’huissier de l’Académie, qu’on retrouvait à la vente des
vins, faisant de la dégustation savante avec la petite tasse d’argent des
gourmets-piqueurs de vin, et tout débordant d’indignation comique, quand l’expert
se trompait d’un an, sur la date d’un cru. »
(Journal des Goncourt. Paris,
Bibliothèque-Charpentier, 1892, 2e série, 3e vol., t. VI,
p. 25-26)
[Tous les commentateurs ont confondu
les deux frères : Edmond de Goncourt évoque ici la personnalité de Paul, décédé
en 1878 et dont il parle à l’imparfait, et non celle de Thomas]
Paul Arnauldet utilisait trois ex-libris [Burty a prétendu en connaître un quatrième, dans La Correspondance historique et archéologique. Paris, H. Champion et A. Picard et Fils, 1895, p. 157)] :
Photographie BnF |
. Un livre ouvert portant le monogramme « APL »
et encadré par les mots « NUNQUAM AMICORUM » [Jamais aux amis], qui
dénote un esprit peu partageur. 67 x 56 mm. Signé « B » [Bracquemond].
. Le cabinet des livres, avec le monogramme « APL »
sur l’un d’eux, la signature « LParnauldet » et l’adresse « 38,
rue Rochechouart, Paris. » Signé « H.[enri] GUERARD » (1846-1897).
Photographie BnF |
. Au milieu d’autres livres, un livre ouvert
portant le monogramme « APL » et sur lequel évoluent deux rats. Signé
« H. GUERARD »
Thomas-Victor Arnauldet est né le 8 septembre 1834, à La Bobinière, chez son grand-père maternel, Louis-Victor Deladouepse (1779-1850), maire de Mouchamps : ce logis fut rasé en 1892, pour construire le château actuel.
Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale, par François Courboin (1906) |
Attaché
depuis le mois de janvier 1855 au service du catalogue du cabinet des Estampes de
la Bibliothèque impériale, Thomas Arnauldet en devint employé appointé à partir
du 1er septembre 1858.
« J’avais pour compagnon de voyage mon
jeune compatriote, Thomas Arnauldet, amateur passionné des arts, qui rassemble
des matériaux pour la publication d’une Iconographie poitevine [restée
manuscrite], ouvrage entrepris sur une vaste échelle et conçu sur un bon plan,
où seront énumérés et décrits avec la plus scrupuleuse exactitude tous les
portraits peints ou gravés, les médailles, bustes et statues des personnages
dont les noms méritent à un titre quelconque d’être mentionnés dans nos annales ;
les vues, plans, cartes et toutes les autres représentations graphiques des hommes
et des choses de la province.
Entraînés vers un but presque identique, nous
venions l’un et l’autre puiser à cette source féconde. »
(Benjamin Fillon. « Souvenirs
d’un voyage à Poitiers ». Dans Études numismatiques. Paris, Jules
Charvet, 1856, p. 8)
Après avoir quitté le 3 rue des Saints Pères [VI] et s’être installé dans le IXe arrondissement, Thomas Arnauldet épousa, le 22 août 1863, Lucie-Louisa Chevallier-Puilboreau à La Rochelle [Charente-Maritime], où elle était née le 30 mars 1839, fille de Otto-Émile-Alcibiade Chevallier-Puilboreau (né à La Rochelle, le 19 brumaire An VI [9 novembre 1797]), inspecteur de l’Enregistrement et des Domaines, et de Marguerite-Édith Giraudeau (née à Montournais, Vendée, le 20 décembre 1807), mariés à La Rochelle le 30 mars 1835.
Le 1er juillet 1866, Thomas Arnauldet démissionna pour raison de santé et se retira à Bourdevaire, sur la commune de Sainte-Cécile,
Coll. Archives départementales de Vendée |
puis, en 1873, au Fossé Rouge, par les Quatre Chemins de L’Oie [Essarts-en-Bocage,
Vendée].
Nommé
bibliothécaire de la ville de Niort le 21 avril 1875, il participa en 1885,
avec Joseph Berthelé (1858-1926), archiviste du département des Deux-Sèvres, à
la fondation, par l’imprimeur Édouard Lacuve (1828-1899), de la Revue
poitevine et saintongeaise, dans laquelle il publia des articles et des
notes. Il démissionna de son poste de bibliothécaire en 1887.
Thomas
Arnauldet fut membre de plusieurs Sociétés savantes : Société des
Antiquaires de l’Ouest (1854), Société de l’Histoire de l’art français (1870), Société
d’émulation de la Vendée (1872), Société de statistique, sciences, lettres et
arts du département des Deux-Sèvres (1875), Société des Archives historiques du
Poitou (1878).
On doit à Thomas Arnauldet : Michel Lasne, de Caen, graveur en taille-douce (Caen, B. Mancel, 1856, 100 ex.), avec Georges Duplessis ; Les Artistes bretons, angeviens, poitevins, au Salon de 1857. Lettre adressée à M. Benj. Fillon (Nantes, And Guéraud et Cie, 1857) ; « Estampes satiriques, bouffonnes ou singulières, relatives à l’art et aux artistes français pendant les XVIIe et XVIIIe siècles » (Gazette des Beaux-Arts, 15 septembre 1859, p. 342-361 ; 1er octobre 1859, p. 101-113) ; « Amateurs français. Lafont de Saint-Yenne » (Gazette des Beaux-Arts, 1er octobre 1859, p. 45-51).
Photographie British Museum |
En 1866, le graveur Charles Meryon (1821-1868) lui réalisa
un frontispice pour son Thomas de Leu. Essai du catalogue de son œuvre,
qui resta inédit.
En 1895, son fils Pierre-Sidrach Arnauldet, né le 25 novembre 1864 à Paris IX, 31 bis rue Laval, marcha dignement sur ses traces. Avocat, il fut l’élève de Pierre de Nolhac (1859-1936), directeur d’études à l’École pratique des Hautes Études, et, muni d’une bourse de voyage, il entreprit en Italie des recherches bibliographiques sur les imprimeurs français, flamands, hollandais qui s’y sont établis au XVe siècle et sur les imprimeurs italiens établis en France aux XVe et XVIe siècles. Il travailla notamment dans les bibliothèques de Milan, de Florence [Magliabecchiana, Riccardiana, Laurenziana, Marucelliana, Palatina], de Parme, de Plaisance, de Modène, et releva un ensemble de 317 ouvrages, ce qui permit de compléter et de rectifier sur bien des points l’histoire de l’imprimerie tant en France qu’en Italie.
Au
château du Fossé Rouge, Thomas Arnauldet mourut le 4 mars 1908, dans sa 74e
année, sa veuve le 6 novembre 1928.
Coll. Musée d'Orsay |
En 2014, le Musée d’Orsay a acquis [pour 50.000 €] un portrait [18 x 14 cm] portant une mention ancienne au crayon, « Mr Arnauldet », déniché dans un vide-grenier l’année précédente par Serge Plantureux, spécialiste de photographie ancienne. Au second plan, une silhouette s’incline au bord de la toile servant de fond, dont l’allure évoque le célèbre portrait de Baudelaire, réalisé en 1861 par Étienne Carjat (1828-1906). Les deux frères Arnauldet étaient des amis de Baudelaire.
La main droite déformée par des tophus
[articulations métacarpo-phalangienne et inter-phalangienne proximale de l’index,
tabatière anatomique], signes de goutte chronique, appartiendrait plutôt à Paul
qu’à Thomas.
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