Jean-Paul Pittion. Le Livre à la Renaissance. Introduction à la bibliographie historique et matérielle. Turnhout [Belgique], Brepols, 2013, in-8 [150 x 250 mm], XXXI [i.e. xxxi]-[1 bl.]-429-[1]-[1 bl.]-[1] p., 32 ill.
Sommaire. p. v-vii
Préface. Frédéric Barbier, École pratique des hautes études. p. ix-xv
Symboles & abréviations. p. xvii
Avant-propos. p. xix-xxiv
Introduction. p. xxv-xxxi
1 Les matériaux du livre. p. 1-67
1 Le papier.
2 Les caractères typographiques.
3 Identifier et dater.
2 La fabrication du livre. p. 69-107
1 Composition, imposition, corrections, tirages.
2 Du colophon à la page de titre.
3 Cataloguer, décrire, transcrire.
3 La structure du livre. p. 109-149
1 Format, cahiers, signatures.
2 Collationner.
3 Lire un catalogue d’incunables.
4 Le décor du livre. p. 151-233
1 Les marques typographiques.
2 L’essor de l’illustration.
3 La reliure.
5 Le livre, objet de commerce. p. 235-306
1 L’espace européen du livre.
2 Le régime de l’édition.
3 L’économie de la production imprimée.
6 Le livre, objet culturel. p. 307-355
1 L’auteur devant l’imprimé.
2 Lecteurs, lectures, bibliothèques.
Conclusion. Vie, mort et survie de l’imprimé depuis la Renaissance. p. 357-369
Bibliographie générale. p. 371-430
*****
Comme l’écrit Frédéric Barbier dans sa « Préface », les compétences du savant Jean-Paul Pittion « seront bien difficilement prises en défaut ». Son ouvrage, dense, quasi exhaustif, agréablement construit, pédagogique et efficace, devrait effectivement s’imposer comme l’ouvrage de référence pour tous les chercheurs travaillant sur les xve et xvie siècles.
Dans la même « Préface », Frédéric Barbier rappelle, à juste titre, que la consultation des éditions anciennes numérisées, utile pour accéder au texte, ne remplacera jamais celle de l’exemplaire réel, et le plus grand nombre possible, pour l’étude de l’objet livre : ces livres anciens, qui ont résisté pendant quatre ou cinq siècles à toutes les agressions imaginables, résisteront bien à quelques consultations supplémentaires, le livre en main et sans gant.
L’ « Avant-propos » précise que cet ouvrage « est rédigé dans une perspective de synthèse et vise à transmettre l’état des connaissances et des questions sur l’histoire de l’imprimerie et de la librairie aux débuts de l’époque moderne et à présenter les acquis de ce que la recherche anglo-saxonne appelle analytical bibliography. » (p. xxii, dernier paragraphe).
Dans l’« Introduction », l’auteur, après avoir résumé le processus de fabrication du livre, présente les six parties de son ouvrage, désignées dans le « Sommaire ».
Les trois premières parties offrent des chapitres historiques, complétés par d’autres chapitres relatifs aux méthodes de l’analyse bibliographique. La quatrième partie est consacrée au décor du livre, reflet des goûts de son époque. L’espace européen du livre, la mise en place d’une réglementation et les politiques éditoriales sont présentées dans la cinquième partie. La sixième partie étudie les rapports qu’entretiennent les auteurs et les lecteurs avec le livre.
Quelques remarques accessoires :
Les caractéristiques du livre objet ne sont pas seulement « sensibles à la vue, au toucher et à l’odorat » (p. xxvii, 2e paragraphe), mais aussi au goût : on se souvient de l’acteur Terence Stamp, qui jouait le rôle d’un éditeur anglais dans le film intitulé Tiré à part (1996), dans lequel il goûtait la colle du dos des livres.
Des éditeurs (Plein Chant, à Bassac) publient encore aujourd’hui des livres brochés et non rognés, comme autrefois (p. xxvii, 3e paragraphe).
Il faudrait corriger « ancrage » (page xxix, 3e paragraphe) et supprimer un « par » surnuméraire (même page, 4e paragraphe).
Les six parties principales de l’ouvrage, telles qu’elles ont été conçues, sont pratiquement sans défaut.
Les illustrations sont toutefois de qualité critiquable.
Certaines précisions auraient pu éclairer le lecteur : ainsi, préciser que l’exemplaire du Psautier de Mayence de 1457 de la Bibliothèque nationale d’Autriche est le seul des dix exemplaires qui ont survécu dans le monde dont le colophon contienne la double marque des presses de Fust et Schöffer (p. 156, 1er paragraphe).
On peut regretter, dans le chapitre sur la reliure, l’absence de mention des faiseurs de fausses reliures du xvie siècle, notamment du relieur français Théodore Hagué (1823-1891), dont les faux plaisaient tant au libraire londonien Bernard Quaritch (1819-1899), qui fournissait l’amateur John Blacker (1823-1896), et au bibliophile parisien Ambroise Firmin-Didot (1790-1876).
Incidemment, ne pourrait-on pas remplacer « ca » [circa] par « v » [vers] (p. xvii), « collation » [qui devrait être réservé au vocabulaire de l’alimentation] par « collationnement » (p. 127 et suivantes), « vide » par « voyez » (p. 378 et suivantes) ?
Ce n’est que dans la « Conclusion » qu’on trouve quelques erreurs, concernant le domaine bibliophilique, qui n’ont aucune incidence sur le sens du chapitre.
Page 365, 2e paragraphe : Pierre Dupuy est mort en 1651, et non en 1649 ; Menars (département du Loir-et-Cher), sans accent sur le « e », s’écrit avec un « s » et non avec un « d » ; c’est en 1706, et non entre 1713 et 1720, que le marquis de Menars céda la bibliothèque des De Thou au cardinal de Rohan, alors évêque de Strasbourg, pour la somme de 36.300 livres.
Page 365, 3e paragraphe, et p. 366, 5 premières lignes : c’était l’occasion de préciser que la bibliothèque de Jean Ballesdens, décédé en 1675, et non en 1676, contenait 9 reliures commandées par Grolier ; avant sa mort, Ballesdens avait disposé de ses manuscrits en faveur de Colbert, raison pour laquelle on les retrouva dans la Bibliothèque du Roi.
Page 369 : l’édition du Manuel de Jacques-Charles Brunet utilisée par les libraires et les amateurs est la 5e, définitive (Paris, Firmin-Didot frères, fils et Cie, 1860-1865, 6 vol. in-8, 6.000 ex.) ; la 4e, donnée en marge (note 36), est la contrefaçon belge (Bruxelles, Hauman et Cie, 1838-1845, 5 vol. in-8) de celle de Paris (Silvestre, 1842-1844, 5 vol. in-8).
Les bibliophiles ne manqueront pas d’apprécier le dernier paragraphe de l’ouvrage de Jean-Paul Pittion :
« Dans la constitution et la survie du patrimoine imprimé de la Renaissance et des siècles suivants, les collections institutionnelles, en dépit des vicissitudes de leur histoire, ont, sans aucun doute, joué un rôle essentiel. Mais, tout compte fait, la bibliophilie et la démocratisation progressive du marché du livre ancien ont elles aussi contribué de façon importante à sa sauvegarde. »
Les notes en marge et la bibliographie permettent de compléter l’étude des divers points traités.
L’ouvrage aurait eu avantage à être d’un format plus large (170 mm au lieu de 150), afin de rester ouvert sur la table, sans l’aide des mains, et à être pourvu d’un « Index des noms de personnes » et d’un « Index des termes techniques ».