mercredi 27 juillet 2016

Philippe Durand de Lançon (1786-1869), « bibliophile selon la vraie science » *

* Baron de Reiffenberg (Annuaire de la Bibliothèque royale de Belgique. Bruxelles et Leipzig, C. Muquardt, 1850, p. 212)
          


Château de Tichémont


Le 26 novembre 1853, est décédé au château de Tichémont, écart de Giraumont [Meurthe-et-Moselle], François-Benoît-Charles-Pantaléon Durand, né à Metz le 20 janvier 1765, veuf de dame Anne-Charlotte Lançon (1765-1851), fille unique de Pierre-Philippe-Clément Lançon (1732-1799), seigneur de Sainte-Catherine [Moselle], conseiller du Roi et son procureur général au Parlement de Metz, qu’il avait épousée à Metz, le 5 juillet 1785. Ils avaient eu sept enfants. La terre de Tichémont était passée entre leurs mains le 6 prairial An XI [26 mai 1803].

Arbre généalogique simplifié


Durand de Tichémont appartenait à l’une des plus anciennes familles du pays, originaire de Commercy [Meuse], au XVe siècle. 

Château de Distroff (rasé en 1985)


Son arrière-grand-père avait reconstitué l’intégralité de la seigneurie de Distroff [Moselle], cédée à la France par le Luxembourg, en 1659.
Durand de Tichémont était entré aux pages de Monsieur, frère du Roi [futur Louis XVIII] et en était sorti officier au régiment de dragons de ce prince. Sur les conseils de ses parents, il fit son droit à Strasbourg [Bas-Rhin], puis fut reçu avocat général au Parlement de Metz, le 4 décembre 1786. La suppression des Cours souveraines, en 1790, interrompit sa carrière dans la magistrature.  
Il devint maire de sa ville natale en l’An IX ; commissaire du gouvernement près le Conseil des prises, en 1800 ; chef de la 22e Conservation forestière, de 1801 à 1815 ; député de Sarreguemines [Moselle], en 1823 ; créé officier de la Légion d’honneur en 1825, et réélu député par le Grand Collège de la Moselle, en 1827. Elu de nouveau par la ville de Metz en 1831, il ne se représenta pas l’année suivante et renonça à la vie politique, préférant des occupations agronomiques.

Vierge allaitante (XVe s.)
Eglise Saint-Martin, Metz


Son fils aîné, Pierre-Philippe-Clément Durand, était né à Metz [Moselle], le 21 mai 1786, et avait été baptisé le lendemain en l’église Saint-Martin.
Devenu receveur particulier des Finances, Philippe Durand épousa, à Paris, Jeanne-Antoinette-Palmyre Tempier (1800-1866), fille de Charles Tempier et d’Antoinette-Adélaïde Moynier.
Il prit quelque liberté avec l’ordonnance royale du 4 novembre 1818, qui ne l’autorisait qu’à ajouter à son nom celui de sa mère, sans particule.
Durand de Lançon exerça successivement à Lure [Haute-Saône] de 1825 à 1831, à Coutances [Manche] de 1832 à 1837, de nouveau à Lure de 1838 à 1842, et à Béthune [Pas-de-Calais] de 1843 à 1856.
Après avoir pris sa retraite, il demeura à Pont-à-Mousson [Meurthe-et-Moselle] en 1858 et 1859, puis à Heugnes [Indre] en 1860, à Choisy-le-Roi [Val-de-Marne] de 1861 à 1864 et à Lignières [Cher], où décéda son épouse, le 29 mai 1866.

Eglise Saint-Martin et Saint-Roch, Ids-Saint-Roch


Durand de Lançon mourut le 23 novembre 1869, à La Gonnerie, commune d’Ids-Saint-Roch [Cher], chez son fils Charles-Alphonse Durand de Lançon. Celui-ci, né à Lure [Haute-Saône] le 30 mai 1828, s’était marié le 11 novembre 1852 à Morlac [Cher], avec sa cousine germaine Catherine-Delphine-Pauline Durand, née à Couddes [Loir-et-Cher] le 19 mai 1830, qui lui avait donné six enfants ; capitaine de la Garde nationale mobile du département du Cher, il fut blessé le 9 janvier 1871, à la bataille de Villersexel [Haute-Saône], et décéda des suites de ses blessures, le 19 janvier 1871, à Rougemont [Doubs]. 

Membre fondateur de la Société des Bibliophiles français, le 1er janvier 1820, Philippe Durand de Lançon avait été élu membre de la Société de l’Histoire de France le 8 janvier 1838, présenté par le marquis de Fortia. Il avait démissionné de la Société des Bibliophiles français le 2 août 1844, et avait été remplacé par la vicomtesse de Noailles, le 17 juin 1846.

Il avait édité des « Lettres de Leibniz au P. Malebranche et au P. Lelong » (88 p.), dans les Mélanges publiés par la Société des Bibliophiles français (Paris, Imprimerie de Firmin Didot, 1820, in-8), 



Moralité de Mundus, Caro, Demonia. - Farce des deux savetiers (Paris, Imprimerie de Firmin Didot, 1827, in-4, [15] f., caractères gothiques, 2 gravures sur bois, 100 ex. numérotés, dont 4 sur vélin, 4 sur papier vélin anglais, 2 sur papier de couleur), 



Complainte et enseignements de Françoys Garin (Paris, Silvestre, Imprimerie de Crapelet, 1832, in-4, [2]-10 p.-XLI f.-[1]-[1 bl.] p., caractères gothiques, 1 gravure sur bois, 100 ex. numérotés, dont 1 sur vélin, 10 sur papier vélin anglais, 89 sur papier de Hollande),  



L’Histoire tragique de la Pucelle d’Orléans, par le P. Fronton du Duc, représentée à Pont-à-Mousson, le VII sept. M. D. LXXX, devant Charles III, duc de Lorraine, et publiée en M. D. LXXXI par J. Barnet (Pont-à-Mousson, Imprimerie de P. Toussaint, 1859, in-4, [28]-102-[5]-[1 bl.] p., 105 exemplaires, dont les 15 premiers sur papier d’Annonay supérieur).

En 1828, l’abbé Vital Chouvy (1752-1835), professeur d’histoire à Lyon, avait confié à Durand de Lançon, trois volumes d’œuvres manuscrites de Simon Chardon de La Rochette (1753-1824), pour les publier, en vain.



La bibliothèque de Durand de Lançon fut vendue à la Maison Silvestre, en 3 vacations, du lundi 30 mai au mercredi 1er juin 1870 : Catalogue de livres rares et curieux, opuscules tirés à petit nombre, ouvrages de bibliographie et d’histoire, dépendant de la succession de feu M. Ph. Durand de Lançon, ancien membre de la Société des Bibliophiles français (Paris, A. Claudin, 1870, in-8, 56 p., 563 lots [numéros 80 et 91 absents]).

Théologie et Histoire des religions [15 lots = 2,66 %], Jurisprudence [9 lots = 1,59 %], Sciences et Arts [65 lots = 11,54 %], Belles-Lettres [194 lots = 34,45 %], Histoire [268 lots = 47,60 %], Œuvres des polygraphes, Mélanges curieux [11 lots = 1,95 %]. Seuls 169 lots [30,01 %] sont des livres antérieurs à 1800, dont un manuscrit du XVIIIe siècle [n° 49], et les tirés à part et tirages à petit nombre du XIXe siècle sont nombreux.

La « Bibliographie » [numéros 417 à 525] compte 109 lots, soit 19,36 % du total de la vente.
Dans la « Bibliographie », les « Catalogues » [numéros 479 à 525] comptent 47 lots, représentant 8,34 % du total de la vente, dont les catalogues de Bluet (1667), Giraud (1707), Longuerue (1735), Hoym (1738), Lancelot (1748), Floncel (1774), Le Tellier (1782), Sarolea (1785), Bolongaro-Crevenna (1793), Patu de Mello (1799), Mercier de Saint-Léger (An VIII), Bonnier (1800), Duquesnoy (1803), Servais (1808), Naigeon (1810), Ourches (1811), Chardin (1811), Van Bavière (1816), Galitzin (1820), Morel-Vindé (1822), Langlès (1825), Duriez (1827), Van de Velde (1831), Courcelles (1834), La Bédoyère (1837), Libri (1847), Coste (1853).















vendredi 22 juillet 2016

Louis Duriez (1753-1825), de Lille et de la Société des Bibliophiles français



Louis-Marie-Joseph Duriez est né à Lille [Nord], le 30 avril 1753, et fut baptisé le même jour en l’église Saint-Étienne [détruite le 29 septembre 1792 par un bombardement autrichien], fils de Louis-François-Joseph Duriez († 1787), notaire, et d’Angélique-Jeanne-Éléonore Bureau :

« Le trente d’avril Mil Sept Cent Cinquante trois fut Baptizé Louis Marie joseph Né le Meme jour, fils Legitime de Me. Louis françois joseph duriez Marguiller de cette paroisse et delle angelique jeanne eleonore Bureau, Le Parain M: michel joseph duriez oncle, vicaire de cette Paroisse La Maraine marie theresse deleporte veuve du Sr. jacque Bureau » [sic]



Avocat au Parlement de Douai en 1774, il succéda à son père, après sa démission, le 5 juin 1776, et exerça jusqu’en 1789. Le 3 septembre 1776, il épousa, en l’église Saint-Maurice, Cécile-Joseph Pottier, née le 22 avril 1753, troisième fille de Jacques-François-Joseph Pottier († 1816), négociant, et d’Angélique-Charlotte Tresca (1726-1809).



Successivement lieutenant prévôt pour le Roi en sa terre domaniale d’Esquermes [village annexé à Lille en 1858] en 1784, receveur du district de Lille en 1791, il acheta, le 13 fructidor An IV [30 août 1796], le château d’Enchemont [Nord], propriété du vicomte de Tenremonde (1736-1795) devenu bien national, pour la somme de 50.000 francs : le château avec ses 3 hectares de terre, ainsi que 15 hectare de terre arable, une maison de jardinier, une écurie, une étable, un potager et un verger.
En 1799, il devint receveur général du Piémont à l’armée d’Italie, près du général Moreau, puis receveur de l’arrondissement de Lille en 1800.
Membre du Conseil de l’arrondissement de Lille et membre du Collège électoral du département du Nord, il devint receveur de l’arrondissement de Douai en 1803.
Il fut nommé chevalier de l’Ordre royal de la Légion d’honneur, le 17 décembre 1814. 

Duriez devint membre de la Société des Bibliophiles français dès le 3 avril 1820.
Les dépenses importantes engagées pour la restauration du château d’Enchemont et la réhabilitation des jardins dévastés furent un obstacle à sa restitution aux héritiers du vicomte de Tenremonde, lorsqu’ils rentrèrent en France : le 6 mai 1825, Duriez leur versa une somme de 30.000 francs en guise de dédommagement.



Duriez mourut à Lille, en son domicile, 26 rue Royale, le 22 novembre 1825. Charles Nodier le remplaça, à la Société des Bibliophiles français, le 9 janvier 1826.



Sa bibliothèque fut vendue à Paris, à la Maison Silvestre, 30 rue des Bons-Enfants, salle du premier étage, du mardi 22 janvier au mardi 1er avril 1828, en 59 vacations : Catalogue des livres imprimés et manuscrits, composant la bibliothèque de feu M. L.-M.-J. Duriez (de Lille), membre de la Société des Bibliophiles français (Paris, J.-S. Merlin, 1827, in-8, x-530-[2] p., 5.245 + 119 bis + 1 ter = 5.365 lots).

« ANNONCER le Catalogue de la bibliothèque d’un Membre de la Société des Bibliophiles français, c’est donner au Public le droit d’exiger une Collection remarquable ou par la beauté des éditions et le luxe des reliures, ou par la réunion, toujours difficile à former, de ces curiosités bibliographiques, dont la mine semble s’épuiser chaque jour de plus en plus. Les trois seules bibliothèques de membres de cette Société, qui aient été vendues jusqu’ici, ont pleinement justifié cette attente des amateurs. Bien que dans un genre différent, elles se sont fait également distinguer, la première par de nombreux manuscrits modernes et des autographes de personnages célèbres [bibliothèque du marquis Germain Garnier, 1822] ; la seconde par une spécialité nouvelle sur la littérature et l’histoire des peuples de l’Orient [bibliothèque de Louis-Mathieu Langlès, 1825] ; la troisième tant par le mérite des ouvrages, tous choisis avec goût, que par la pureté des exemplaires et l’élégance des reliures [bibliothèque du marquis Hippolyte de Châteaugiron, 1827].
D’un autre caractère que les bibliothèques de MM. Garnier, Langlès et de Ch***, celle de M. Duriez n’est pas moins précieuse ; elle offre même des richesses plus variées ; c’est en même temps et la bibliothèque d’un homme d’étude et le cabinet de l’amateur le plus recherché. On le reconnaîtra facilement à la lecture du Catalogue que nous en publions. »
(« Avertissement », p. v)

Théologie [382 lots = 7,12 %], Jurisprudence [136 lots = 2,53 %], Sciences et Arts [1.255 lots = 23,39 %], Belles-Lettres [1.741 lots = 32,45 %], Histoire [1.851 lots = 34,50 %].

Le n° 1.888, L’Odyssée d’Homère, ou les Aventures d’Ulysse, en vers burlesques (Leyde, Jean Sambix, à la Sphère, 1653, pet. in-12, mar. bleu, d. de tabis, fil., tr. dor.), relié avec L’Ovide en belle humeur, a été volé à l’exposition du matin, le lundi 24 mars 1828. 

1. Biblia sacra polyglotta complectentia textus originales hebr., chald., græcum […] ; edidit Brianus Waltonus. Londini, Roycroft, 1657, in-fol. 6 vol., v. j., tr. dor. – Lexicon heptaglotton hebraicum, chaldaicum, syriacum […] authore Edm. Castello. Londini, Roycroft, 1669, in-fol., 2 vol., v. br. 430 fr.
52. Histoire du Vieux et du Nouveau Testament (par Dav. Martin), enrichie de plus de 400 fig. Anvers (Amst.), P. Mortier, 1700, in-fol., gr. pap., 2 tomes en 1 vol., mar. r., fil., tr. dor. Avant les clous. 232 fr.
80. La Vie de la Vierge, en 20 planches, gravées par Albert Dürer, en 1509 et 1510, et peinte en or et en couleur avec le plus grand soin, en 1585 et 1586, par J. Bochesollt, qui a signé. Vol. in-fol., v. f., fil., tr. dor. Incomplet du titre. 553 fr.
83. Physique sacrée, ou Histoire naturelle de la Bible, trad. du lat. de J.-Jacq. Scheuchzer, enrichie de figures gravées par les soins de Pfeffel. Amst., Schenk, 1732-1738, in-fol., fig., 8 vol., v. f. 162 fr.
114. Heures (latines) à lusaige de Romme. Paris, Gilles Hardouyn (1516), in-8 max., goth., mar. r. à riches compart., tr. dor., fermoirs en vermeil. Imprimé sur vélin, avec 20 grandes miniatures, quelques petites, toutes les initiales peintes en or et en couleur. Ex. de Charles IX, avec son chiffre sur la couv. [la reliure, qui est du milieu du XVIIe siècle, ne peut laisser subsister cette assertion] 164 fr.
125. Offrande spirituelle du cœur, ou Prières chrétiennes pour la communion. Nuremberg, Seldecker, s. d., in-24, fig. (en allemand). Reliure en filigrane d’argent fin représentant des feuilles et des fleurs. La couverture se déboite et le livre peut être remplacé par un autre. 300 fr.
126. Officium B. Mariæ Virginis. Antverpiæ, Moretus, 1685, gr. in-8, tr. dor., rel. en chagrin noir, doublé de riches ornements en argent estampé et découpé ; au milieu des deux plats, les médaillons en cuivre doré portraits de J.-C. et de Marie. 180 fr.



632. Le Comte de Valmont, ou les Egaremens de la raison (par l’abbé Gérard). Paris, Bossange, 1807, in-8, pap. vél., 6 vol., d.-rel., dos de mar. r., non rognés. Ex. réunissant les dessins originaux de Moreau le Jeune, les épreuves avant et avec la lettre et les eaux-fortes. 263 fr.



835. Essai sur la Physiognomonie, destiné à faire connoître l’homme et à le faire aimer, par J.-G. Lavater. La Haye, 1783-1803, gr. in-4, fig., 4 vol., v. rac., fil. 152 fr.
874. De Buffon, Daubenton et Gueneau de Montbeillard : Histoire naturelle, générale et particulière. Paris, I. R., 1749-1767, 15 vol. ; Oiseaux. Ibid., 1770-1789, 9 vol. ; Supplément. Ibid., 1774-1789, 7 vol. ; Minéraux. Ibid., 1783-1788, 5 vol. – Ovipares et serpens, par de Lacépède. Paris, 1788 et 1789, 2 vol. ; Poissons et cétacées, par le même. Ibid., 1798-1804, 6 vol. ; les 44 vol. in-4, fig., mar. r., fil., tr. dor. 640 fr.
925. Histoire naturelle des oiseaux (par Buffon). Paris, I. R., 1771, in-fol., gr. pap., fig. color., 10 vol., mar. vert, dent., tr. dor. 999 fr.



928. Histoire naturelle des perroquets, par F. le Vaillant. Paris, Levrault, 1804, gr. in-fol., pap. vél., fig. color., 2 vol., d.-rel., dos de mar. r., non rognés. 256 fr.
931. Histoire naturelle des oiseaux d’Afrique ; par le même. Paris, Delachaussée, An XIII (1805) 1808, gr. in-fol., pap. vél., fig. doubles en noir et en couleur, 6 vol., d.-rel., dos de mar. r., non rognés. 600 fr.
932. Histoire naturelle et générale des colibris, oiseaux-mouches, jacamars et promérops, des grimpereaux et des oiseaux de Paradis, par Audebert et M. L.-P. Vieillot. Paris, Desray, An XI, gr. in-fol., pap. vél., fig. color., 2 vol., d.-rel., dos de mar. r. Légendes en lettres d’or. 360 fr.
959. Papillons exotiques des trois parties du monde, l’Asie, l’Afrique et l’Amérique, rassemblés et décrits (en holl. et en franç.) par P. Cramer, dessinés sur les originaux, gravés et enluminés sous sa direction. Amst., 1779-1782, in-4, fig. color., 4 vol. – Supplément par Stoll. Amst., Gravius, 1791, in-4, fig. color ; les 5 vol., d.-rel., dos et coins de mar. r., pap. mar. r. 470 fr.



960. Papillons d’Europe, peints d’après nature par Ernst, gravés et coloriés sous sa direction (et sous celle de Gigot d’Orcy), décrits par Engramelle. Paris, Ernst, 1779-1792, gr. in-4, fig. color., 8 vol., d.-rel., dos de mar. r., pap. mar. r. 325 fr.
977. Ichthyologie, ou Histoire naturelle générale et particulière des poissons, avec des fig. enlum., dessinées d’après nature par Marc-Eliezer Bloch. Berlin, l’auteur, 1785-1797, in-fol., gr. pap. de Holl., 6 vol., v. rac., fil., tr. dor. 801 fr.
1.035. Historia muscorum in quâ circiter sexcentæ species veteres et novæ describuntur, et iconibus genuinis illustrantur […], opera Jo.-Jac. Dillenii. Oxonii, è Theatro sheldoniano, 1741, gr. in-4, fig., pap. fin, v. m. 300 fr.
1.041. Les Liliacées par P.-J. Redouté. Paris, impr. de Didot jeune, An X-1816, gr. in-fol., pap. vél., fig. color., 80 livr. formant 8 vol., mar. r., dent., tr. dor., doublé de moire à double dent. 750 fr.
1.047. Jardin de la Malmaison, par Ventenat. Paris, Crapelet, 1803, et Herhan, 1807, in-fol., pap. vél., 2 vol., d.-rel., dos de mar. r., pap. mar., dent., non rognés, fig. color. sur les dessins de Redouté. 201 fr.
1.295. Galerie du Palais-Royal, gravée d’après les tableaux des différentes écoles qui la composent, avec un abrégé de la vie des peintres et avec une description historique de chaque tableau, par de Fontenai (et M. Morel, etc.). Paris, Couché et Boulliard, 1786-1808, gr. in-fol., 3 vol., d.-rel., dos de mar. r., pap. mar., dent., non rognés. Les 59 livraisons. 481 fr.
1.300. Cours historique et élémentaire de peinture, ou Galerie complète du Musée Napoléon, publiée par Filhol, et rédigée par Jos. Lavallée. Paris, 1804-1815, gr. in-8, 10 vol., pap. vél., d.-rel., dos de mar. r., pap. mar., dent., non rognés. 900 fr.
1.310. Recueil complet des estampes du Cabinet du Roi, 23 vol., gr. in-fol., et le Catalogue indiquant la suite et l’arrangement des volumes, in-4 : les 24 vol. mar. citr., tr. dor. (exemplaire uniforme, aux armes du Roi). 1.395 fr.
1.485. Les Hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, avec leurs portraits au naturel, par Perrault (grav. par Edelinck). Paris, Ant. Dezallier, 1696-1700, 2 tomes en 1 vol. in-fol., mar. r., fil., tr. dor. Derome. Grand papier. 175 fr.
1.906. Pindari Olympia, Pythia, Nemea, Isthmia. Callimachi Hymni qui inveniuntur. Dionysius de situ orbis. Licophronis Alexandra […], græce. Venetiis, in ædibus Aldi et Andreæ Asulani soceri, 1513, pet. in-8, rel. en bois recouvert de mar. r., fil., tr. dorée et ciselée, larges clous et fermoirs d’argent. Ex. aux armes de Henri II, avec son chiffre et celui de Diane de Poitiers. 800 fr.
2.047. P. Ovidii Nas. Opera, scilicet Metamorphoseon libri XV. Venetiis, in ædibus Aldi, 1502, 1 vol. – Libri amatorii. Venetiis, in ædibus hæredum Aldi et Andreæ soceri, 1533, 1 vol. – Fasti. Venetiis, in ædibus Aldi, 1503, 1 vol. ; les 3 vol. pet. in-8, mar. citr. marbré, tr. dor. Ex. de De Thou. 500 fr.
2.375. La Pucelle d’Orléans, par Voltaire. Kehl, 1785, gr. in-8, fig. avant la lettre, 2 vol., mar. r., dent., tr. dor. Ex. unique : sur peau de vélin, avec deux titres à la main en lettres d’or et fleuron aussi en or. 185 fr.



2.490. Recueil de pièces choisies, rassemblées par les soins du cosmopolite. Anconne, à l’enseigne de la Liberté, 1735, in-4, mar. vert, à large dent., tr. dor., avec recouvrement et serrure. Livre d’une grande rareté, imprimé au château de Verret en Touraine, et tiré à un très petit nombre d’exemplaires. 326 fr.
2.527. Petite bibliothèque des théâtres, publiée par Le Prince et Beaudrais. Paris, Belin, 1785, 78 vol. - Essais historiques sur l’origine et les progrès de l’art dramatique en France. Ibid., 1787, 2 vol. ; les 80 vol. in-18, pap. vél., v. f., fil., tr. dor. 300 fr.
2.553. Œuvres de Pierre et de Thomas Corneille. Paris, Renouard, 1817, in-8, gr. pap. vél., 12 vol., mar. r., dent., orn. en or et à froid, d. de moire, tr. dor. J. Thouvenin. 363 fr.
2.565. Œuvres de Molière. Paris, Bauche, 1739, in-12, 8 vol., mar. v., dent., tr. dor. Derome. Fig. de Punt ajoutées. 181 fr.
2.583 bis. Œuvres complètes de J. Racine. Paris, Deterville, 1796, in-8, divisé en 8 vol., mar. bleu, dent., d. de tabis, tr. dor., impr. sur peau de vélin, avec les dessins originaux de Lebarbier, et les fig. avant la lettre, et eaux fortes. 1.600 fr.
2.589. Œuvres de J. Racine, avec les notes de tous les commentateurs, publiées par M. Aimé Martin. Paris, Lefevre, 1820, in-8, fig. avant la lettre, 6 vol., d.-rel., dos de mar. or., non rognés. Grand papier vélin. Relié par Simier. Joints : les 3 suites de fig. d’après Moreau, Garnier et le Barbier, avant la lettre ; plusieurs portraits ; en tout 146 pièces. 420 fr.
2.656. Les Triumphes messire Françoys Petracque, translatez de langaige tuscan en françois. Paris, Hemon Lefevre, 1519, pet. in-fol. goth., mar. bleu, fil., tr. dor. Derome. Impr. sur vélin, 17 miniatures dont 5 grandes, initiales en or et couleur. 500 fr.
2.788. Le premier et le second volume de Merlin. Les Prophécies de Merlin. Paris, Ant. Verart, 1498, pet. in-fol. goth., fig. en bois, 3 vol., mar. r., fil., tr. dor. Derome. 800 fr.
2.790. Ysaie le Triste, filz de Tristan de Léonois et de la royne Izeut de Cornouaille, ensemble les nobles prouesses de chevallerie faictes par Marc Lexille, filz dudit Ysaye (reduite du viel langaige au langaige françoys). Paris, (P. Vidoue), pour Galiot Dupré, 1522, pet. in-fol. goth., mar. bleu, fil., tr. dor. 400 fr.



2.969. Le Tiers Livre des faicts et dicts héroïques du bon Pantagruel, composé par M. Fr. Rabelais, reveu et corrigé par l’autheur sur la censure antique. Paris, Mich. Fezandat, 1552, 1 vol. – Le Quart Livre des faicts et dicts héroïques du bon Pantagruel, composé par M. Franç. Rabelais. Paris, Mich. Fezandat, 1552, 1 vol. pet. in-8 réglé, les 2 vol. mar. citr., fil. tr. dor., aux armes du comte d’Hoym. 108 fr.
2.991. Recueil général des Caquets de l’acouchée, ou Discours facecieux, où se voit les mœurs, actions et façons de faire des grands et petits de ce siècle. Imprimé au temps de ne plus se fascher, 1623, pet. in-8 réglé, mar. v., fil., tr. dor. (ancienne rel.). 179,95 fr.
3.152. Lycée, ou Cours de littérature ancienne et moderne, par La Harpe. Paris, Verdière, 1821, in-8, 16 vol. br. Grand papier vél., enrichi de 637 portraits sur Chine. De la bibliothèque de Mazoyer, de Lyon. 1.100 fr.
3.319. Œuvres de Boileau Despréaux, avec des éclaircissemens historiques donnez par lui-même. La Haye, Vaillant, 1722, in-12, fig. de B. Picart, 4 vol., mar. vert, dent. et ornem. à froid, tr. dor. Simier. Réglé, enrichi par Mazoyer, de Lyon, de 260 pièces gravées. 499 fr.
3.347. Œuvres complètes de Voltaire. Kehl, Soc. typogr., 1785-1789, gr. in-8, pap. vél., 70 vol. – Supplément au Recueil des lettres de Voltaire. Paris, Xhrouet, 1808, gr. pap. vél., 2 vol. ; les 72 vol., v. rac., tr. dor. – Table des matières, par Chantreau. Paris, Deterville, 1801, 2 vol. – Commentaire sur le Théâtre de Voltaire, par de Laharpe. Paris, Maradan, 1814, 1 vol., ces 3 vol. même reliure, mais non rognés. Renferme les deux suites de figures de Moreau le Jeune. 401 fr.
3.379. Les Œuvres de J.-F. Ducis. Paris, Nepveu, 1817-1818, in-18, pap. vél., fig., 6 vol., mar. olive, dent. à froid et compart., d. de moire, dent., tr. dor. Duplanil. On joint : fig. avant la lettre, eaux-fortes et dessins originaux de Desenne. 200 fr.
3.674. Description générale et particulière de la France (publiée par de la Borde et autres). Paris, Lamy, 1781-1800, gr. in-fol., fig., 12 vol., d.-rel., dos de mar. r., non rognés. 600 fr.

La fameuse planche, qui manque le plus souvent
(Seconde partie du Premier volume, p. 52)


3.677. Voyage pittoresque, ou Description des royaumes de Naples et de Sicile (par Saint-Non). Paris, 1781-1786, gr. in-fol., fig., 4 tom. en 5 vol., v. éc., dent., tr. dor. 338,05 fr.
3.681. Voyage pittoresque de la Grèce (par de Choisel-Gouffier). Paris, 1782-1822, gr. in-fol., fig., 2 vol., mar. r., fil., tr. dor. 350 fr.



3.684. Voyage dans la Basse et la Haute-Egypte pendant les campagnes de Bonaparte, par Vivant Denon. Paris, P. Didot l’aîné, An X (1802), in-fol., atl. max., fig., 2 vol., v. rac., dent., tr. dor. 299 fr.
3.704. Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde, représentées par des figures dessinées de la main de B. Picart, avec des explications historiques. Amst., Bernard, 1723-1743, 8 tom. en 9 vol. – Superstitions anciennes et modernes. Ibid., 1733-1736, 2 vol. ; les 11 vol., in-fol., v. br., gr. pap. 600 fr.
3.894. Justini Historiæ, ex Trogo Pompeio in epitomen redactæ, et libris XLIV distinctæ. Venetiis, per Nicolaum Jenson, anno Domini 1470, gr. in-4, mar. bleu, d. de tab., tr. dor. 400 fr.
4.064. Les Monumens de la monarchie françoise qui comprennent l’histoire de France, avec les figures de chaque règne que l’injure du temps a épargnées, par D. Bernard de Montfaucon. Paris, Gandouin, 1729-1733, in-fol., fig., 5 vol., v. m., gr. pap. 509 fr.
4.778. L’Antiquité expliquée (en franç. et en latin), et représentée en fig., par D. Bernard de Montfaucon. Paris, Delaulne, 1719, 5 tom. en 10 vol. – Supplément. Ibid., veuve Delaulne, 1724, 5 vol. ; les 15 vol. in-fol., v. m., gr. pap. 363 fr.
4.816. Antiquités étrusques, grecques et romaines, tirées du cabinet d’Hamilton (avec des explications en angl. et en franç. par d’Hancarville). Naples, 1766-1767, in-fol. atlant., fig. noires et en coul., 4 vol., mar. r., fil., d. de moire bleue, tr. dor. 701 fr.



4.823. Le Antichita d’Ercolano incise con qualche spigazione. Napoli, R. St., 1755-1792, gr. in-fol., fig., 9 vol., mar. r., dent., tr. dor. Les 8 premiers vol. sont de la bibliothèque du duc de La Vallière. 599,95 fr.
4.873. Description des médailles antiques, grecques et romaines, avec leur degré de rareté et leur estimation, par M. T.-E. Mionnet. Paris, Testu, 1806-1813, in-8, 6 vol. et 1 vol. de planches, d.-rel., dos de mar. r., non rognés. 199 fr.
5.100. Mélanges publiés par la Société des Bibliophiles français. Paris, Impr. F. Didot, 1820, 1822, 1825 et 1826, gr. in-8, pap. vél., 4 vol., pliés, non cousus. 669 fr.
5.117. Collection dite de Barbou, 68 vol. in-12, v. porph., fil., tr. dor. 150 fr.

Le cabinet d’antiquités et de curiosités de Duriez, remarquable surtout par une belle suite de coquillages, fut vendu en 1829.
Son épouse lui survivra jusqu’au 14 janvier 1842. En 1842, ses héritiers vendirent le château d’Enchemont [détruit en 1940] et le reste de la bibliothèque, à Lille, du 17 juin au 9 juillet : Catalogue des livres faisant partie de la bibliothèque de feu M. Duriez, membre de la Société des Bibliophiles français (Lille, Danel, 1842, in-8, 826 lots).






vendredi 15 juillet 2016

L’Italianiste Pierre-Louis Ginguené (1748-1816), ami de Chamfort


Portrait de Ginguené
Dessiné et gravé par Jouannin

Pierre-Louis Ginguené, aîné des sept enfants de Pierre-François Ginguené (1714-1791), procureur au siège présidial de Rennes [Ille-et-Vilaine], et de Marie-Anne Gagon († 10 septembre 1778), est né à Rennes, le 26 avril 1748, et fut baptisé le lendemain en l’église Saint-Sauveur :


« Piere Louis fils de me piere francois Ginguené Escuyer procureur au Siege presidial de Rennes Et de dame marie anne Gagon Ses peres et meres né Le Jour de hyer a Esté par moy prestre de cette paroisse baptisé du consentement de mr Le Recteur Et tenu sur Les Saints fond de bapteme ce Jour vingt Septieme année 1748 par noble me Louis Gagon miseur de La ville Et communauté de dinan oncle maternel dudt Enfant Et par dame Louise malescot ve du sieur guy thebaut aussy tante maternel dudt Enfant Le père present qui Signe avec nous Et les autres Soussignants Interligne prestre aprouvé Raturé deux mot nuls aprouvé » [sic]   

Il fit de bonnes études au collège Saint-Thomas de Rennes [détruit], tenu par les Jésuites, où il eut comme condisciples le futur poète Évariste Parny (1753-1814) et le futur orientaliste Claude-Étienne Savary (1750-1788). Son père lui apprit les langues anglaise et italienne et lui donna le goût pour la peinture et la musique. Ses études terminées, il composa des airs de musique et des pièces de vers, dont la meilleure fut la Confession de Zulmé, qui eurent quelques succès dans les salons de la société rennaise.

Arrivé à Paris en 1772, comme précepteur dans une maison particulière, il publia quelques poésies dans l’Almanach des Muses et, avant de la publier, communiqua la Confession de Zulmé à l’helléniste Guillaume Dubois de Rochefort (1731-1788). Celui-ci voulut en avoir une copie, la lut dans plusieurs maisons et la laissa copier. Cette pièce circulait toujours applaudie et anonyme : certains auteurs, comme Alexandre-Frédéric-Jacques Masson (1741-1777), dit « marquis de Pezay », à Paris, le comte de La Fare, à Saint-Germain, et Charles Bordes (1711-1781), à Lyon, se l’attribuèrent ; d’autres, comme le duc de Nivernais (1716-1798), se la laissèrent attribuer. 



Ginguené la fit enfin imprimer sous son nom dans l’Almanach des Muses de 1779 (p. 129-132), mais ce ne fut pas sans contestation qu’il parvint à s’en faire reconnaitre pour l’auteur :

« 1 Février [1779]. Une querelle fort singuliere s’est élevée entre deux petits auteurs : on connoissoit depuis plusieurs années une piece de vers très-agréables, intitulée Confession de Zulmé. Comme elle est dans la manière de M. Dorat, on la lui attribuoit ; d’autres la donnoient au Duc de Nivernois ; enfin M. de Pezay l’a réclamée dans le tems & on la lui a laissée. Un nommé Guinguené, mauvais poëte arrivé de Bretagne par le coche, s’est avisé de vouloir se faire une réputation & a fait insérer dans l’Almanach des Muses de cette année, différens morceaux de poésie pillés de côté & d’autre, entr’autres celui-là. Un autre poëte, appelé Merard de St. Just, a crié au vol & a prétendu que l’ouvrage étoit de lui : il en a résulté une querelle très-ridicule, où chaque partie a produit les preuves de sa propriété ; mais comme aucune n’a ébranlé la réclamation plus antérieure du défunt, tous deux sont reconnus pour plagiaires.
Ce Guinguené a fait exécuter, il y a deux ans, à la cour, un mauvais opéra-comique, intitulé Pomponin, qui est bien la plus détestable chose qu’on puisse lire & qui n’a pas reparu heureusement. » [sic]
([Petit de Bachaumont, Pidansat de Mairobert et Moufle d’Angerville]. Mémoires secrets pour servir à l’histoire de la République des Lettres en France, depuis MDCCLXII jusqu’à nos jours. Londres, John Adamson, 1780, t. XIII, p. 270-271)

Dans la fameuse querelle des Gluckistes et des Piccinnistes, polémique qui se déroula de 1776 à 1779 et qui opposa moins les compositeurs Christoph-Willibald Gluck (1714-1787) et Niccolo Piccinni (1728-1800) que leurs partisans respectifs, Ginguené se déclara le champion de Piccinni et triompha dans des lettres ou des articles signés « Mélophile », qui lui firent quelque réputation.
Entre-temps, en 1778, Ginguené avait obtenu un emploi de commis au Ministère des Finances, qu’on appelait alors le Contrôle général, et ses relations lui avaient assuré des collaborations occasionnelles à des périodiques tels que le Mercure de France et le Journal de Paris.   

Jeton édité en 1783 par la loge des Neuf Soeurs,
en l'honneur de son ancien vénérable Benjamin Franklin

En 1782, il fut reçu franc-maçon dans la loge des Neuf Sœurs que fréquentait alors l’élite littéraire et politique. Il habitait alors dans la maison de Monsieur Louis, rue de La Michodière [IIe].

Portrait de "Nancy", par Jean-Joseph Bernard (1740-1809)

Il revint à Rennes pour se marier, le 21 novembre 1786, en l’église de Toussaints [incendiée en 1793 et démolie de 1801 à 1807], avec Anne-Jeanne-Françoise Poullet (1753-1832), fille de Joseph Poullet, procureur de Dol-de-Bretagne [Ille-et-Vilaine], et veuve de François Avice, capitaine de navire marchand, décédé à bord, le 1er juillet 1774, qu’elle avait épousé à Dol, le 12 janvier 1773. Ginguené appelait son épouse « Nancy », abréviation de « Suzanne », prénom alors fort à la mode.

Rentré à Paris, Ginguené échoua aux concours académiques de poésie, avec Léopold, Poëme (Paris, Prault, 1787, in-8), puis d’éloquence, avec son Éloge de Louis XII, Père du peuple (Paris, Debray, 1788, in-8).

Il accueillit avec enthousiasme les premiers symptômes de la Révolution et célébra l’ouverture des États Généraux avec une ode médiocre. Dès 1790, et jusqu’à l’automne 1793, il collabora à la rédaction de la Gazette nationale, ou Le Moniteur universel


Il publia ensuite ses Lettres sur les Confessions de J. J. Rousseau (Paris, Barois [sic] l’Aîné, 1791, in-8), De l’autorité de Rabelais dans la Révolution présente, et dans la Constitution civile du clergé, ou Institutions royales, politiques et ecclésiastiques, tirées de Gargantua et de Pantagruel (Paris, Gattey, 1791, in-8) et participa, avec Nicolas-Étienne Framery et Jérôme-Joseph de Momigny, à l’Encyclopédie méthodique. Musique (Paris, Panckoucke et veuve Agasse, 1791-1718, 2 vol. in-4). À partir du mois d’août 1791, Ginguené fut associé à la direction du Mercure de France.


Après la mort de son fondateur, Joseph-Antoine Cerutti (1738-1792), Ginguené prit la direction, avec Philippe-Antoine Grouvelle (1758-1806), de l’hebdomadaire La Feuille villageoise


Il fonda, en floréal An II [avril 1794], La Décade philosophique, littéraire et politique, qui parut trois fois par mois, puis fut continuée, à partir de 1805, sous le titre de La Revue, philosophique, littéraire et politique, avant d’être supprimée en 1807.

Cellule à la Prison Saint-Lazare en 1793

Pendant la deuxième Terreur, Ginguené fut arrêté à Noisy-le-Sec [Seine-Saint-Denis] le 14 floréal An II [3 mai 1794] et incarcéré à Saint-Lazare. Libéré le 23 thermidor An II [10 août 1794], il fut adjoint à Dominique-Joseph Garat (1749-1833), en septembre 1794, pour la réforme de l’Instruction publique et la réorganisation des écoles ; il fut seul commissaire à partir d’août 1795.


En publiant les Œuvres de Chamfort, recueillies et publiées par un de ses amis (Paris, Directeur de l’Imprimerie des sciences et des arts, An III [1795], 4 vol. in-8), Ginguené rendit hommage à la mémoire de son ami Sébastien-Roch Nicolas (1740-1794), dit « Chamfort », mort cinq mois après un suicide raté, pour échapper aux bourreaux.

Après être entré à l’Institut le 10 décembre 1795, élu membre de la Classe des sciences morales et politiques, il fut nommé, le 18 décembre 1797, ministre plénipotentiaire près du roi de Sardaigne à Turin [Italie]. Cette ambassade lui causa bien des déboires, et il ne tarda pas, après sept mois, à revenir reprendre ses travaux littéraires, à Paris et dans sa maison de campagne.
À Paris, il logea d’abord chez Garat, 13 rue Jacob [VIe], puis rue de Grenelle-Saint-Germain [rue de Grenelle, VIIe], où on pouvait lire sur la loge de son concierge : « Ici on s’honore du titre de citoyen, et on se tutoie. Ferme la porte, s’il vous plaît. »



À Saint-Prix [Val-d’Oise], il acheta l’ancien « Prieuré blanc », rue de la Croix Saint-Jacques, en face de l’église Saint-Germain, le 13 prairial An VII [1er juin 1799] ; il sera revendu par sa veuve le 13 juin 1817.

Nommé membre du Tribunat en 1800, il se fit remarquer par son opposition à plusieurs des projets de Bonaparte, qui affectait de l’appeler « Guinguené » et le rangeait parmi les idéologues, et fut éliminé en 1802. Dans les quatorze années suivantes de sa vie, il n’est plus jamais rentré dans la carrière politique.

Sa santé avait paru s’altérer, peu après son retour de Turin. En 1801, une faiblesse de la vue, qui le força d’interrompre ses études, fut guérie par son ami le Docteur Alphonse-Louis Leroy (1742-1816). De 1802 à 1806, Ginguené professa à l’Athénée de Paris un cours de littérature italienne dont il tirera une Histoire littéraire d’Italie, inachevée et en partie posthume. En 1804, il fut obligé d’aller se reposer un mois à Laon [Aisne], chez son frère Gaspard-François Ginguené, directeur des Domaines.  
Sans enfant, Ginguené devint, en 1805, le tuteur d’un orphelin anglais, James Parry, alors âgé de six ans. 

Bas-relief représentant un astronome habillé à l'antique,
cherchant à déterminer la ligne de midi, à l'aide d'un compas.
19, rue du Cherche-Midi, Paris VI


À partir de 1808, il dut faire soigner une maladie pulmonaire chronique par le Docteur Jacques-Louis Moreau (1771-1826), dit « Moreau de la Sarthe ». Il demeurait alors 19 rue du Cherche-Midi [VIe].

Portrait de Ginguené
In Histoire littéraire d'Italie (2e éd., 1824, t. I, frontispice)


Photographie Librairie Koegui, Bayonne [Pyrénées-Atlantiques]



Membre, en 1809, de la commission pour continuer l’Histoire litéraire [sic] de la France (Paris, 1733-1763, 12 vol. in-4), par des religieux Bénédictins de la Congrégation de Saint-Maur, il publia une importante Histoire littéraire d’Italie (Paris, Michaud frères, 1811-1819, 9 vol. in-8). Il échoua dans une candidature à l’Académie française en 1812, fut chargé d’une mission en Suisse pendant les Cent jours, d’où il revint très fatigué, et mourut d’une tuberculose pulmonaire à Paris le 16 novembre 1816.

Il était membre associé de l’Académie de la Crusca, correspondant de l’Académie impériale de Turin, des Athénées de Niort et de Vaucluse, membre de l’Académie celtique de Paris.








Il fut inhumé au cimetière du Père Lachaise [division 11], le 18 novembre : son tombeau fut placé près de ceux de Delille et de Parny. L’inscription qu’on y lit est celle qu’il avait composée lui-même et qui termine l’une de ses pièces de vers :


« Celui dont la cendre est ici,
Ne sut, dans le cours de sa vie,
Qu’aimer ses amis, sa patrie,
Les arts, l’étude et sa Nancy. »



Hôtel de Bullion, en 1825

Sa bibliothèque fut vendue en 30 vacations, du lundi 2 mars au jeudi 9 avril 1818, en l’une des salles de l’hôtel de Bullion [détruit en 1890], 3 rue J. J. Rousseau [Ier] : 





Catalogue des livres de la bibliothèque de feu M. P. L. Ginguené, membre de l’Institut de France, de l’Académie della Crusca, de l’académie de Turin, etc. (Paris, Merlin, 1817, in-8, xxiv-352-[2] p., 2.686 + 1.675 + 8 bis + 2 ter = 4.371 lots). Avec une « Notice sur M. Ginguené et sur ses ouvrages. », par Garat (p. v-xv), le « Discours prononcé par M. Daunou, aux funérailles de M. Ginguené, le 18 novembre 1816. » (p. xvij-xviij) et un « Avis » du libraire (p. xix) :

« M. GINGUENÉ avait rédigé lui-même le Catalogue d’une grande partie de sa Bibliothéque, particulièrement de ses livres italiens, dont la collection est l’une des plus considérables, et surtout des mieux choisies qu’on ait formée en France, depuis celle de Floncel. Elle contient des articles rares, mais elle se compose essentiellement des meilleures éditions des meilleurs ouvrages. On y distinguera beaucoup d’éditions des Aldes, des Juntes, de Giolito de’ Ferrari, de Torrentino.…. de Comino, de Bodoni. M. Ginguené écrivait son Histoire littéraire d’Italie, non d’après les autres historiens de cette littérature, mais en étudiant et en appréciant les productions de tous les âges et de tous les genres. Il avait ainsi rassemblé des séries volumineuses de grammairiens, de rhéteurs, d’épistolaires, de traducteurs…..et principalement de poëtes.
Quelque nombreux que soient ces livres italiens, ils le sont pourtant moins que ceux qui, écrits en d’autres langues, anciennes ou modernes, forment la première partie de la bibliothéque de M. Ginguené. Il y a fort peu d’ouvrages véritablement classiques qu’il n’y ait fait entrer ; et cet excellent choix pourrait attester la pureté de son goût, la variété et la profondeur de ses connaissances, s’il n’en avait donné, durant toute sa vie, de bien meilleures preuves. Les amateurs remarqueront, dans cette première partie du Catalogue, quelques éditions du quinzième siècle, plusieurs des Aldes et des Estiennes, un plus grand nombre des Elzévirs, plusieurs aussi des imprimeurs célèbres du dix-huitième siècle. Les genres dont M. Ginguené s’est particulièrement occupé, comme l’instruction publique, la musique, l’apologue, l’histoire littéraire, sont ici plus riches qu’on ne les trouve communément dans les bibliothéques des hommes de lettres.
On traitera avec les personnes qui voudraient acquérir la bibliothéque entière ou toute la partie italienne.
La vente publique, s’il y a lieu, commencera au mois de février 1818, et sera annoncée par la distribution d’une feuille de vacations. » [sic]

Cette bibliothèque, qui comportait de nombreux volumes annotés par Ginguené, était une bibliothèque de travail. Elle fut acquise en bloc par le British Museum, pour la somme de 25.000 francs [1.000 £ sterling].
Livres grecs, latins, français, anglais, etc. : Théologie [80 lots = 2,96 %], Jurisprudence [36 lots = 1,33 %], Sciences et Arts [468 lots = 17,35 %], Belles-Lettres [1.412 lots = 52,37 %], Histoire [700 lots = 25,96 %].
Livres italiens : Teologia [14 lots = 0,83 %], Scienze ed Arti [98 lots = 5,93 %], Lettere Humane [1.092 lots = 65,19 %], Storia [278 lots = 16,59 %], Traduzioni [193 lots = 11,52 %].

Les livres italiens constituaient 38,32 % de la totalité du catalogue. 


Ginguené possédait un exemplaire [n° 1.471] du catalogue de la bibliothèque d’Albert-François Floncel (1697-1773), avocat au Parlement de Paris et censeur royal, qui était devenu l’ouvrage de référence en matière de littérature italienne : Catalogo della libreria Floncel (Paris, Jean-Gabriel Cressonnier, 1774, 2 vol. in-4, vj-[1]-[1 bl.]-xxvj-[2]-378 p. et [3]-[1 bl.]-346 p., 5.287 et 2.697 [numérotés 5.288-7984] lots), avec un « Index alphabétique des noms des auteurs et des titres sans nom d’auteur » (t. II, p. 227-346). La poésie [655 lots, numérotés 308-962 = 39,10 %] dominait dans la bibliothèque italienne de Ginguené : après les traités d’art poétique et les recueils collectifs, les œuvres des poètes italiens étaient réparties par siècles ; les grands auteurs étaient évidemment bien représentés, mais aussi les auteurs de moindre envergure, confirmant la mauvaise foi de Chateaubriand.
En effet, dans les portraits que Chateaubriand trace des hommes de lettres qu’il a connus à Paris en 1788, dans les Mémoires d’outre-tombe (Liège, J.-G. Lardinois, 1849, t. I, p. 102), on peut lire ce jugement amer et inique sur Ginguené :

« L’auteur de l’Histoire de la littérature italienne, qui s’insinua dans la révolution à la suite de Chamfort, nous arriva par ce cousinage que tous les Bretons ont entre eux. Ginguené vivait dans le monde sur la réputation d’une pièce de vers assez gracieuse, la Confession de Zulmé, qui lui valut une chétive place dans les bureaux de M. de Necker ; de là sa pièce sur son entrée au contrôle-général. Je ne sais qui disputait à Ginguené son titre de gloire, la Confesion de Zulmé ; mais dans le fait il lui appartenait.
Le poète rennais savait bien la musique et composait des romances. D’humble qu’il était, nous vîmes croître son orgueil, à mesure qu’il s’accrochait à quelqu’un de connu. Vers le temps de la convocation des Etats-Généraux, Chamfort l’employa à barbouiller des articles pour des journaux et des discours pour des clubs : il se fit superbe. […]
Ginguené eut une connaissance anticipée des meurtres révolutionnaires. Madame Ginguené prévint mes sœurs et ma femme du massacre qui devait avoir lieu aux Carmes, et leur donna asile ; elles demeuraient cul-de-sac Férou, dans le voisinage du lieu où l’on devait égorger.
Après la terreur, Ginguené devint quasi chef de l’instruction publique ; ce fut alors qu’il chanta l’Arbre de la liberté au Cadran-Bleu, sur l’air : Je l’ai planté, je l’ai vu naître. On le jugea assez béat de philosophie pour une ambassade auprès d’un de ces rois qu’on découronnait. Il écrivait de Turin à M. de Talleyrand qu’il avait vaincu un préjugé : il avait fait recevoir sa femme en pet-en-l’air à la cour. Tombé de la médiocrité dans l’importance, de l’importance dans la niaiserie, et de la niaiserie dans le ridicule, il a fini ses jours littérateur distingué comme critique, et, ce qu’il y a de mieux, écrivain indépendant dans la Décade : la nature l’avait remis à la place d’où la société l’avait mal à propos tiré. Son savoir est de seconde main, sa prose lourde, sa poésie correcte et quelquefois agréable. »


Chateaubriand en voulait probablement à Ginguené d’avoir traité sévèrement Atala, puis le Génie du christianisme, paru dans La Décade philosophique, du 19 juin au 9 juillet 1802.  

vendredi 8 juillet 2016

Le Chevalier Delambre (1749-1822), le plus grand astronome de l’Europe

Le Système métrique décimal imposé à partir du 1er janvier 1840


D’une famille originaire de l’Artois [Pas-de-Calais], installée au tout début du XVIIIe siècle à Amiens [Somme], sur la paroisse Saint-Rémi, pour y exercer le commerce de vêtements d’occasion, Jean-Baptiste-Joseph Delambre naquit à Amiens, rue de la Viéserie [rue Delambre], le 19 septembre 1749, et fut baptisé le même jour en l’église Saint-Firmin-en-Castillon [détruite en 1806]. Il fut l’aîné des sept enfants de Jean-Nicolas-Joseph Delambre, né le 28 décembre 1718 et décédé le 23 thermidor An VIII [11 août 1800], marchand fripier, puis drapier, et de Marie-Élisabeth Devismes, née le 22 février 1717 et décédée le 28 brumaire An VI [18 novembre 1797], mariés depuis le 27 janvier 1749 et domiciliés, à leur décès, rue des Sœurs grises [rue Condé].

Rue des Soeurs grises, Amiens

Delambre fut atteint, vers l’âge de 13 mois, de la petite vérole [variole, officiellement éradiquée en 1978], maladie infectieuse qui occasionnait alors 10 % des décès : on crut, pendant huit jours, qu’il avait perdu entièrement la vue. On comprend pourquoi il devint membre de la « Société pour l’extinction de la petite Vérole en France, par la propagation de la Vaccine », quand elle fut créée le 14 germinal An XII [4 avril 1804].

Arbre généalogique simplifié

Destiné à la prêtrise par ses parents, il entra en 1758 au collège des Jésuites d’Amiens, où un Père lui donna le goût de la littérature et où, après l’expulsion des Jésuites, il connut Jacques Delille (1738-1813), comme professeur, futur confrère au Collège de France et à l’Institut.
Delambre avait tant d’ardeur et de facilité pour le travail, qu’il occupait toujours le premier rang dans ses classes, et Jean-Baptiste Gossart, son professeur de rhétorique, mit tout en œuvre pour le faire aller à Paris : le grammairien Noël-François de Wailly (1724-1801), natif d’Amiens, lui fit obtenir une bourse pour recommencer sa rhétorique au collège du Plessis, rue Saint-Jacques [Ve].

Sorti du collège sans ressources et sans protecteurs, il s’imposa les plus dures privations pour rester à Paris, dans l’attente d’une meilleure situation, et étudia l’histoire, la littérature, les sciences et les langues anciennes et modernes.
En 1770, Charles-Simon Favart (1710-1792), célèbre auteur d’opéras-comiques et père de son ami Charles-Nicolas Favart (1749-1806), le fit entrer comme précepteur chez Le Féron, à Compiègne, puis, l’année suivante à Paris, chez Jean-Claude Geoffroy d’Assy (1729-1794), receveur général des finances, dont la générosité et l’amitié lui assurèrent une existence indépendante.


Delambre commença à s’intéresser à l’astronomie vers 1780 et se présenta aux leçons du Collège de France le 10 décembre 1782 : à compter du 10 décembre 1782, l’élève de Joseph-Jérôme Lefrançois de Lalande (1732-1807) fut son collaborateur et son ami.
En 1788, dans son hôtel acheté l’année précédente, rue de Paradis [58 bis rue des Francs-Bourgeois, IIIe], Geoffroy d’Assy fit construire un observatoire [disparu vers 1912], que Delambre garnit d’instruments et où il fit beaucoup d’observations.

Le 15 février 1792, il fut élu à l’Académie des sciences, dont il deviendra le secrétaire perpétuel pour les sciences mathématiques le 11 pluviôse An XI [31 janvier 1803].
La même année 1792, il fut chargé, avec Pierre Méchain (1744-1804), de mesurer l’arc du méridien compris entre Dunkerque et Barcelone, afin de réformer le système de mesure et d’adopter comme unité de longueur, baptisée « mètre », la dix-millionième partie du quart du méridien ; 

In Jules Verne. Aventures de trois Russes et de trois Anglais dans l'Afrique australe
(Paris, J. Hetzel et Cie, s. d. [1872], p. 49)

cette opération, faite à l’aide d’un instrument nouveau, le cercle répétiteur de Jean-Charles de Borda (1733-1799), fut sans cesse interrompue par les vicissitudes de la Révolution et ne put être terminée qu’en 1799. 

Côté route, avec l'inscription "TERME BOREAL" [Nord]
Côté vers Melun, avec l'inscription "BASE DE LIEUSAINT A MELUN"

Le pyramidion ou borne de Lieusaint [Seine-et-Marne], face au 96 rue de Paris, classé monument historique en 1994, témoigne de la mesure de la distance entre Melun [Seine-et-Marne] et Lieusaint faite en 1798.

In Vulfranc Warmé. Opuscules (Amiens, R. Machart, 1835, p. 32)

Entre-temps, Delambre était entré au Bureau des longitudes, à sa création, le 25 juin 1795, et, de février 1796 à décembre 1797, un mètre étalon, gravé par le marbrier Jean-Baptiste-François Corbel, d’après le dessin de l’architecte Jean-François Chalgrin (1739-1811), avait été placé dans les 16 lieux les plus fréquentés de Paris, pour familiariser la population avec la nouvelle mesure ; il n’en reste que 4 exemplaires : 


36 rue de Vaugirard [VIe], le seul qui soit encore sur son site originel, et 13 place Vendôme [Ier], à Paris ; celui de la rue au Mètre, à Croissy-sur-Seine [Yvelines], est une copie dont l’original, rapporté par le maire de la ville en 1888, est conservé à la Mairie ; celui rapporté à Sceaux [Hauts-de-Seine], est conservé à l’ancienne Mairie, 68 rue Houdan.  

En 1802, Delambre fut nommé l’un des trois Inspecteurs généraux des Études et organisa le lycée de Moulins [Allier] en 1802, et celui de Lyon en 1803.

Delambre finit par se marier, dans un âge assez avancé : le 30 janvier 1804, il épousa sa compagne de longue date, Élisabeth-Aglaé Sinfray, née à Paris le 5 août 1761, veuve d'Achille-Claude-Étienne-François Leblanc, sieur de Pommard [Côte-d'Or], ancien prévôt général de la maréchaussée de Touraine. 

Observatoire de Paris, côté Nord (v. 1820)

La même année, il succéda à Méchain, à la direction de l’Observatoire de Paris.
En 1807, il succéda à Lalande, comme professeur d’astronomie au Collège de France.
Nommé trésorier de l’Université en 1808, il dut quitter la rue de Paradis et renoncer à son observatoire, pour aller demeurer 10 rue du Dragon [VIe]. Il fut fait chevalier de l’Empire le 10 septembre 1808, puis baron de l’Empire le 24 août 1811.

Nommé membre du Conseil royal de l’Instruction publique en 1814, Delambre n’exerça plus de fonctions publiques après 1815. Il fut cependant fait, par le gouvernement royal, chevalier de Saint-Michel en 1817 et officier de la Légion d’honneur en 1821 ; il en était chevalier depuis la fondation de l’Ordre.

Membre des Sociétés royales de Londres, d’Uppsala, de Copenhague et d’Edimbourg, des Académies de Saint-Pétersbourg, de Berlin, de Stockholm, de Naples et de Philadelphie, de la Société astronomique de Londres, etc., Delambre consacra les loisirs de ses dernières années à écrire l’histoire de l’astronomie.
Malade depuis le mois de juillet 1822, il mourut à Paris, le 19 août 1822, à 10 heures du matin, en son domicile, 10 rue du Dragon [VIe]. Il fut inhumé le 21 août 1822 au cimetière du Père Lachaise [10e division].


Sa veuve, civilement séparée de son mari depuis 1811, décéda le 28 septembre 1833, au château d’Antiville [Bréauté, Seine-Maritime], qu’elle avait acheté le 2 ventôse An VIII [21 février 1800] pour 90.000 francs, dont 75.000 « payés en espèces sonnantes », au marquis d’Héricy ; elle fut inhumée dans l’enfeu du chevet de l’église Saint-Georges de Bréauté.

Outre ses « Mémoires », « Extraits », « Notices », « Éloges », etc., insérés en grand nombre dans la Connoissance des temps, à l’usage des astronomes er des navigateurs, de 1788 à 1822, et dans diverses collections académiques, on doit à Delambre :

Tables de Jupiter et de Saturne, par M. de Lambre (Paris, Moutard, 1789, in-4)

Tables du Soleil, de Jupiter, de Saturne, d’Uranus et des satellites de Jupiter (In Astronomie par Jérôme Le Français [sic] (La Lande). Paris, Veuve Desaint, 1792, 3e édition, 3 vol. in-4).

Méthodes analytiques pour la détermination d’un arc du méridien (Paris, Duprat, An VII, in-4)

Tables trigonométriques décimales, ou Table des logarithmes des sinus, sécantes et tangentes (Paris, Duprat, An IX, in-4)

Tables astronomiques publiées par le Bureau des longitudes de France. Première partie. Tables du Soleil, par M. Delambre. Tables de la Lune, par M. Bürg (Paris, Courcier, 1806, in-4)

Base du système métrique décimal, ou Mesure de l’arc du méridien compris entre les parallèles de Dunkerque et Barcelone (Paris, Baudouin, janvier 1806-juillet 1807-novembre 1810, 3 vol. in-4)

Rapport historique sur les progrès des sciences mathématiques depuis 1789, et sur leur état actuel (Paris, Imprimerie impériale, 1810, in-4)

Etiquette de libraire sur un exemplaire de l' Abrégé d'astronomie

Abrégé d’astronomie, ou Leçons élémentaires d’astronomie théorique et pratique (Paris, Mme Ve Courcier, 1813, in-8, 14 pl.)

Astronomie théorique et pratique (Paris, Mme Ve Courcier, 1814, 3 vol. in-4, 29 pl.)

Tables écliptiques des satellites de Jupiter (Paris, Mme Ve Courcier, 1817, in-4)

Histoire de l’astronomie ancienne (Paris, Mme Ve Courcier, 1817, 2 vol. in-4, 17 pl.)

Histoire de l’astronomie du Moyen Âge (Paris, Mme Ve Courcier, 1819, in-4, 17 pl.)

Histoire de l’astronomie moderne (Paris, Mme Ve Courcier, 1821, 2 vol. in-4, 17 pl.)

Delambre a laissé deux ouvrages inédits : une « Histoire de l’astronomie au 18e siècle » et une « Histoire de la mesure de la Terre ».

Frontispice. In Histoire de l'astronomie au dix-huitième siècle

Il avait commencé, au mois de juin 1822, l’impression du premier ouvrage, mais des souffrances qui s’aggravaient chaque jour le forcèrent, un mois avant sa mort, de l’abandonner à la huitième feuille. Elle n’a pu être reprise que longtemps après et fut publiée par Claude-Louis Mathieu (1783-1875), de l’Académie des sciences et du Bureau des longitudes, sous le titre Histoire de l’astronomie au dix-huitième siècle (Paris, Bachelier, Successeur de Mme Ve Courcier, 1827, in-4, 3 pl.).
Le deuxième ouvrage fut publié encore plus tard, augmenté de notes et de cartes, par Guillaume Bigourdan (1851-1932), membre de l’Institut, sous le titre adopté par l’auteur Grandeur et figure de la Terre (Paris, Gauthier-Villars, 1912, in-8, 29 fig.).


La bibliothèque de Delambre fut vendue après sa mort, en 15 vacations, du lundi 10 au mercredi 26 mai 1824, en sa maison du 10 rue du Dragon. Le Catalogue des livres composant la bibliothèque de feu M. le chevalier Delambre (Paris, L. F. A. Gaudefroy et Bachelier, 1824, in-8, [1]-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-xiv-[2]-100 p., 1.554 + 9 = 1.563 lots) fut rédigé par le libraire Louis-François-André Gaudefroy (1758-1839), natif d’Amiens :

« Chargé, en 1815, de faire le Catalogue de la Bibliothèque de l’illustre Lagrange, je fus obligé d’en abandonner bientôt la rédaction pour me livrer à d’autres travaux bibliographiques beaucoup plus considérables, qui m’ont retenu à Bruxelles pendant huit ans. Maintenant que je viens reprendre à Paris les occupations auxquelles je m’étais livré pendant 30 années, je me trouve très flatté d’avoir été choisi pour rédiger le Catalogue de la Bibliothèque de mon savant Compatriote qui m’a honoré de son amitié, et qui fut mon premier protecteur. […]
Riche d’ouvrages du premier ordre, mais modeste dans ses apparences, j’ai contribué depuis 1781 à l’augmenter, en procurant à M. Delambre les livres relatifs aux divers genres d’études qu’il embrassait. Aussi la collection que nous allons offrir, beaucoup plus complète, en livres de Mathématiques et d’Astronomie, que ne l’était celle de son collègue De Lalande, et qu’aucune des bibliothèques de ce genre qui les précédèrent, pourra devenir un Répertoire classique pour les Amateurs de la Science » (« Avertissement de l’éditeur du catalogue », p. xii)

150. Archimedis quæ supersunt omnia, græcè et lat., cum Eutocii Ascalonitæ commentariis, ex recensione Jos. Torelli, cum nova versione lat. Oxonii, 1692 [i.e. 1792], in-fol., br.
155. Euclidis quæ supersunt omnia, græcè et lat., ex recensione Dav. Gregorii. Oxoniæ, 1703, in-fol., bas.
164. Apollonii Pergæi conicorum libri octo, cum Pappi Alexandrini Lemmatis et Eutocii Ascalonitæ commentariis ; accedunt Sereni Antissensis de sectione cylindri et coni libri duo, gr. et lat., edente Edm. Halleio. Oxoniæ, 1710, in-fol. cart. magn. v. j.
171. Diophanti Alexandrini arithmeticorum libri VI et de numeris multangulis liber unus, gr. et lat., cum commentariis C. G. Bachet et observationibus P. de Fermat. Tolosæ, 1670, in-fol., cartâ magnâ. v. b.

« Parmi les Mathématiciens modernes, compris depuis le n°. 178 jusqu’au n°. 454, on remarquera les œuvres de Stévin, Viete, Tacquet, de Fermat, Huygens, Wallis, Newton, Leibnitz, Bernoulli, Horrebow, Simpson, Euler, D’Alembert, Lagrange, De Prony, Lacroix, Laplace, Legendre et autres. » (Ibid., p. xiij)


371. Opus palatinum de triangulis a G. J. Rhetico coeptum : L. Valentinus Otho, mathematicus, consummavit. Neostadii, 1596, in-fol. vél.


372. Thesaurus Mathematicus, sive canon sinuum ad radium 1,00000,00000,00000, et ad dena quæque scrupula secunda quadrantis ; una cum sinibus primi et postremi gradus, ad eundem radium, et ad singula scrupula secunda quadrantis : adjunctis ubique differentiis primis et secundis atque ubi res tulit, etiam tertiis ; supputatus a G. J. Rhetico, et editus à B. Pitisco. Francofurti, 1613, in-fol. Ouvrage légué à Delambre par Lalande : ex. en veau fauve aux armes d’Auguste de Thou.

« Dans la division ASTRONOMIE, qui s’étend du n°. 455 à 1020, on trouvera d’abord les ouvrages des Astronomes anciens, et ensuite les meilleurs traités qui ont paru sur cette science depuis le commencement du 16e. siècle jusqu’à ce jour. Parmi tous ces articles, beaucoup sont enrichis des notes de M. Delambre : nous avons indiqué ceux où elles étaient plus considérables. Dans cette partie, ainsi que dans la division MATHÉMATIQUES, sont classées toutes les Œuvres de M. Delambre, publiées de son vivant […].
Les autres Classes offriront presque tous les bons auteurs grecs et latins : » (Ibid., p. xiij)
  
1.080. M. Tullii Ciceronis opera omnia. Lugd. Batav. ex offic. Elseviriana, 1642, 10 vol. pet. in-12, mar. r. à compart.
1.197. Collection des Auteurs Italiens, dite de Prault et Molini. Paris, 1767-1778, 44 vol. pet. in-12, v. ec. fil.

« L’HISTOIRE présente plusieurs Atlas et des Cartes particulières estimés, ainsi que divers Voyages savans [sic] qui ont eu pour objet des observations ou des découvertes astronomiques. » (Ibid., p. xiv)

1.515. Histoire et Mémoires de l’Académie royale des Inscriptions et Belles-lettres, depuis son établissement. Paris, imp. roy. 1736, et ann. suiv., 50 vol. in-4, v. m.
1.516. Histoire et Mémoires de l’Académie des Sciences, depuis son établissement en 1666 jusqu’en 1790. Paris, 1701-1793, 154 vol. in-4, fig. v. m. et dem. rel.
1.518. Mémoires de l’Institut de France. Paris, 1796 et années suiv., 39 vol. in-4, br. en cart., et dem. rel.