mardi 22 novembre 2022

Jean-Claude Maisonneuve (1813-1884), libraire-éditeur pour les langues orientales

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Saint-Pal-de-Chalençon, Haute-Loire

Le Cros [point vert] et Trespeyres [point rouge]

La famille Maisonneuve est originaire du hameau Le Cros, sur la commune de Merle [Merle-Leignec, Loire]. Elle a formé un grand nombre de branches, dont l’une a habité le village de Trespeyres, où ses membres furent laboureurs : sous l’Ancien Régime, ce village dépendait de la commune d’Apinac [Loire] ; après la création des départements en 1790, il s’est trouvé sur le territoire de la commune de Saint-Pal-de-Chalençon [Haute-Loire], officiellement « municipalité de Montalet, ci-devant Saint-Pal-de-Chalençon » de la fin 1793 au printemps 1795.



La branche de Trespeyres remonte au moins au XVIIe siècle. Mathieu Maisonneuve épousa Marcelline Peyroche à Boisset [Haute-Loire], le 30 juin 1705.

Guillaume Maisonneuve, né à Trespeyres le 26 août 1706, y est mort subitement le 11 mai 1734, à peine six mois après avoir épousé Marie Petit à Apinac, le 17 novembre 1733.

Jacques Maisonneuve fut le premier à savoir écrire. Né et mort à Trespeyres, respectivement le 28 septembre 1734 et le 23 avril 1785, il épousa Jeanne Filiol à Apinac, le 16 septembre 1766.

Né à Trespeyres le 6 juillet 1767, Étienne Maisonneuve, cultivateur à Trespeyres, puis au village Le Mas, commune de Bas-en-Basset [Haute-Loire], se maria à Saint-Pal-de-Chalençon, le 2 pluviôse An II [21 janvier 1794], avec Catherine-Rose Joanilion, née le 5 février 1776 au village Aubissoux [Craponne-sur-Arzon, Haute-Loire]. Prématurément veuf le 20 juin 1805, Étienne Maisonneuve épousa en secondes noces, le 15 novembre 1806 à Saint-Pal-de-Chalençon, Agathe Maisonneuve, née au village Les Horts, commune de Apinac, le 9 mai 1769, fille de Pierre Maisonneuve et de Marie Giraud, mariée une première fois et devenue veuve. Étienne Maisonneuve décéda le 11 février 1840 au Mas, chez son neveu Jean-Claude Ribeyrou ; Agathe Maisonneuve mourut aux Horts le 25 novembre 1843.

Jean-Claude Maisonneuve
Coll. Claire Maisonneuve

 

Fils d’Étienne Maisonneuve et d’Agathe Maisonneuve, Jean-Claude Maisonneuve est né le 12 juin 1813 à Trespeyres. Après des débuts obscurs, entre colportage et voyages jusqu’en Russie, dit-on, la librairie Maisonneuve aurait été fondée à Paris en 1835 : information non documentée, publiée par ladite maison dans l’Almanach catholique français pour 1923 (Paris, Bloud et Gay, 1923, p. 132).

En réalité, Jean-Claude Maisonneuve fit ses débuts dans le commerce de la librairie à Lyon, en entrant comme associé dans une maison importante de cette ville, « B. Cormon et Blanc ».

Cette maison ètait née en 1798, rue Saint-Dominique, de l’association de Jacques-Louis-Barthélemy Cormon (Neuilly, Yonne, 24 août 1769 – La Croix Rousse, Rhône, 28 février 1833) et de Joseph Blanc (° Nantua, Ain, 14 septembre 1778). Elle était passée rue et vis-à-vis de l’Archevêché en 1807, rue d’Auvergne en 1812, rue Sala en 1820 et 1 rue Roger [partie de la rue Jarente] en 1830. En 1842, la maison « B. Cormon et Blanc » devint « Blanc et Hervier », 1 rue Roger, avec un dépôt à Paris [VIe], 23 rue des Grands-Augustins. En 1844, la raison sociale devint « Saint-Hilaire Blanc et Cie », avec un dépôt parisien 8 rue Richelieu [Ier] ; en 1846, « Saint-Hilaire Blanc et Cie » déménagea 2 place d’Ainay, le dépôt parisien étant transféré 26 rue Dauphine [VIe].



En 1848, Jean-Claude Maisonneuve entra dans la Librairie étrangère et française « Blanc, Maisonneuve et Cie », en s’associant avec Jean-Hilaire Blanc (Lyon, Division du Midi, 8 floréal An XIII [28 avril 1805] – Cannes, Alpes-Maritimes, 22 août 1890), fils de Joseph Blanc et auteur de plusieurs dictionnaires et grammaires sous le nom de « Saint-Hilaire Blanc ».

Dès le début de l’année 1849, le dépôt parisien fut transporté quai Voltaire [VIIe], à la Librairie étrangère et orientale, « À la Tour de Babel », ancien magasin de librairie de Louis-Théophile Barrois (Paris, 10 octobre 1780 – 27 janvier 1851), qui était à louer depuis un an.

En 1851, à la mort de Théophile Barrois, Maisonneuve se rendit acquéreur de ses principales publications de linguistique arabe, persane et turque. 



Il finit par quitter définitivement Lyon en 1854, pour s’installer « À la Tour de Babel », 15 quai Voltaire, dans sa « Librairie pour les langues orientales, étrangères et comparées ». Son associé lyonnais, « S. H. Blanc et Cie », rue de Bourbon [rue Victor Hugo], trouva un autre associé en 1855, Nicolas Scheuring, qui lui succéda l’année suivante et s’installa 9 rue Boissac.



 
Photographie BnF

En peu d’années, « À la Tour de Babel » devint la plus importante librairie de linguistique orientale et américaine de Paris.




Jean-Claude Maisonneuve devint le libraire de « L’Athénée oriental », Société fondée en 1864 pour la décentralisation des études asiatiques, africaines et océaniennes en France, dont l’emblème portait la devise « SOL ORIENS DISCUTIT UMBRAS » [le soleil levant chasse les ombres].

En 1867, une spécialité nouvelle fut introduite dans la librairie « Maisonneuve et Cie » : des ouvrages relatifs à l’histoire et à la linguistique des deux Amériques. 



Charles-Alfred Leclerc (1843-1889) publia alors sa Bibliotheca americana.

Le samedi 8 juin 1867, à Paris [VIIe], Jean-Claude Maisonneuve épousa Aimée-Florence Leclerc, née à Courpalay [Seine-et-Marne] le 10 avril 1824, fille de Pierre-Amable-Félix Leclerc, maçon en plâtre, et de Marie-Louise Vilpelle. Aimée-Florence Leclerc était la mère de Charles Leclerc, né de père inconnu, le 2 avril 1843, sur l’ancien XIIe arrondissement de Paris.  

Photographie BnF



Jean-Claude Maisonneuve fut le libraire du Congrès des Orientalistes et du Congrès des Américanistes, dont il publia les travaux : Congrès international des orientalistesCompte-rendu de la première session, Paris-1873 (1874-1876, 3 vol. in-8) et Congrès international des américanistesCompte-rendu de la première session, Paris-1875 (1875, 2 vol. in-8).



L’achat des collections basque et patoises de Henri Burgaud des Marets (1806-1873) en 1873 vint s’ajouter aux différentes branches de l’établissement.








À partir du 1er janvier 1876, la Librairie orientale de « Maisonneuve et Cie » fut transférée au 25 quai Voltaire. Charles Leclerc fonda en 1881 la collection Les Littératures populaires de toutes les nations et épousa, le 1er mars 1883 à Paris [VIe], Thérèse-Mathilde Lacave, née le 12 septembre 1848 à Bordeaux [Gironde] ; le couple légitima le même jour leur fille Marguerite-Berthe-Thérèse, née sur le même arrondissement le 14 octobre 1881. Veuf depuis le 5 février 1878, Jean-Claude Maisonneuve décéda en son domicile le 30 janvier 1884.

Jean-Victor Maisonneuve
Coll. Claire Maisonneuve

 


Par suite de ce décès, ses neveux, Georges-Victor Maisonneuve et Jean-Victor [dit « Jean »] Maisonneuve, et son beau-fils, Charles Leclerc, formèrent, le 1er mars 1884, une Société pour la continuation de la Librairie orientale et américaine de Maisonneuve & Cie, sous la raison sociale « Maisonneuve Frères et Ch. Leclerc », 25 quai Voltaire et 5 quai Malaquais [VIe].

Fils de Pierre Maisonneuve (1816-1896), cultivateur, et de Marguerite Thiolière (1826-1851), sa première épouse, Georges-Victor Maisonneuve était né au village Les Horts, commune de Apinac, le 23 juillet 1848 ; il avait épousé, le 24 mai 1879 à Paris [VIIe], Clarisse Leclerc, née à Rozay-en-Brie [Seine-et-Marne], fille de Henri-Félix Leclerc, maçon, et de Angélina Richer. Fils de Pierre Maisonneuve et de sa seconde épouse, Jeanne-Marie Vignal (1823-1887), Jean-Victor Maisonneuve était né à Apinac le 6 janvier 1860.


 

Après le décès prématuré de Charles Leclerc, le 9 janvier 1889, dans sa 46e année, Jean-Victor Maisonneuve resta seul. Le 30 octobre 1890, à Saint-Bonnet-le-Château [Loire], il épousa Elisa Cussonnet, née au même lieu le 23 août 1870, fille de Claude Cussonnet, négociant, et de Mariette Bret. 



Le 1er janvier 1895, il transféra la Librairie orientale et américaine au 6 rue de Mézières [VIe] et 26 rue Madame [VIe].

Le 15 février 1900, dans le but d’étendre les affaires de la librairie, Jean-Victor Maisonneuve s’associa avec Louis Marceau, ancien imprimeur orientaliste à Chalon-sur-Saône [Saône-et-Loire], dans la Société « J. Maisonneuve & L. Marceau ». Mais cette Société fut dissoute dès le 4 avril suivant et Jean-Victor Maisonneuve redevint seul propriétaire de la Librairie orientale et américaine. 



À la fin de l’année 1903, E. Guilmoto succéda à Jean-Victor Maisonneuve.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

vendredi 11 novembre 2022

Henri Burgaud (1806-1873), dit « des Marets », philologue, traducteur de Mickiewicz et commentateur de Rabelais

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Eglise Saint-Martin, Aujac

D’une famille de commerçants, de père en fils, originaire d’Aujac [Charente-Maritime], en pleine Saintonge, Jean Burgaud est né à Jarnac [Charente], 15 rue Basse, le 2 novembre 1806. Il était le deuxième enfant de François Burgaud, né le 4 septembre 1780 à Jarnac, marchand de toiles et de draperies, qui avait épousé à Jarnac, le 28 thermidor An XII [16 août 1804], Mathurine-Félicité Chemineau, née à Jarnac le 11 janvier 1783. Le 4 novembre 1806, Jean Burgaud reçut à son baptême un second prénom, Henri. François Burgaud mourut à Jarnac le 24 août 1862, veuf depuis le 13 mars 1855.



Au début du XVIIIe siècle, Jean Burgaud, arrière-grand-père de Jean-Henri Burgaud, avait ajouté à son patronyme l’épithète « des Marais » [sic], pour se distinguer d’autres membres de sa famille.

Rue Saint-Jacques (1866)
Photographie Charles Marville

Après de brillantes études au collège de Bordeaux, Henri Burgaud fut reçu bachelier ès lettres en 1824 et partit aussitôt faire son droit à Paris, se logeant dans une chambre du 48 rue Saint-Jacques [Ve]. Licencié en droit en 1829, il devint avocat à la Cour de Paris. Il avait le don des langues : possédant le latin et le grec, il y ajouta l’anglais, l’espagnol, le portugais, l’italien, l’allemand et le polonais.


Il résolut de faire connaitre en France le poète polonais Adam Mickiewicz [Prononcez Mitzkiévitch] (1798-1855) et le traduisit, anonymement : Konrad Wallenrod. Roman historique traduit du polonais d’A. Mickiewicz (Paris, Gagniard et A.-J. Dénain, 1830, in-18, tiré à petit nombre). Deux ans plus tard, Burgaud devenait l’ami de Mickiewicz, exilé à Paris après la défaite de la Pologne contre la Russie. Dès sa fondation en 1832, la Société historique et littéraire polonaise accueillit Burgaud comme membre. Puis parut, encore anonymement, Dziady [Les Aïeux] ou la Fête des Morts, Poème traduit du Polonais d’Adam Mickiewicz. 2e et 3e parties (Paris, Clétienne, 1834, in-16, 60 ex., dont quelques-uns sur pap. coul.).

21 rue La Bruyère (mai 2022)

Admis docteur en droit en 1837, Burgaud quitta son domicile du 33 bis rue du Faubourg Poissonnière [IXe] pour un grand appartement situé au premier étage du 21 rue La Bruyère [IXe].

« Burgaud passait la plus grande partie de son temps dans les bibliothèques, n’en sortant que pour aller au Collège de France écouter une leçon d’Ampère ou de Mickiewicz, ou pour visiter les librairies [surtout celle de Ernest Caen, établi depuis 1854 au 55 passage des Panoramas], rapportant presque toujours, de cette chasse aux livres, quelques raretés qui venaient enrichir sa collection patoise. Les soirées s’écoulaient en compagnie d’intimes : l’érudition, la poésie et surtout la musique en faisaient les frais. Dilettante passionné, Burgaud prenait part lui-même à des séances de musique de chambre où ses connaissances musicales et son talent de flûtiste lui réservaient une première place. »

(Camille Beaulieu. Vie et travaux de Burgaud des Marets. La Rochelle, Éditions Rupella, 1928, p. 64)

 


Burgaud commença par écrire ses œuvres patoises en patois jarnacais : Fables en patois charentais. (dialecte du canton de Jarnac) (Paris, Firmin-Didot Frères, 1849, in-8, tiré à petit nombre, dont 1 ex. sur pap. Whatman et quelques-uns sur pap. coul.). Publiées à petit nombre d’exemplaires, elles sont depuis longtemps introuvables.

Les journaux et les diverses publications de la Charente, Le Charentais, L’Indicateur de Cognac, Jean qui pleure et Jean qui rit, l’Almanach de Cognac, l’Annuaire de Cognac, L’Illustration cognaçaise, etc. ont tour à tour publié ses compositions patoises.


 

Grâce à Burgaud et à Edme-Jacques-Benoît Rathery (1807-1875), bibliothécaire à la Bibliothèque impériale du Louvre, Rabelais eut enfin une édition digne de lui : Œuvres de Rabelais, collationnées pour la première fois, sur les éditions originales, accompagnées de notes nouvelles, et ramenées à une orthographe qui facilite la lecture, bien que choisie exclusivement dans les anciens textes, par MM. Burgaud des Marets et Rathery (Paris, Firmin Didot Frères, Fils et CIE, 1857-1858, 2 vol. gr. in-18).

« MM. Rathery et Burgaud ne se sont pas bornés à offrir au public lettré un bon texte de Rabelais ; ils se sont appliqués à en faciliter la lecture et l’intelligence. Sous prétexte de suivre l’orthographe d’un temps où l’orthographe n’existait pas, les éditeurs modernes avaient prêté à leur auteur un air rébarbatif et pédantesque. Sans commettre d’anachronisme, MM. Rathery et Burgaud nous le montrent tout différent. Il leur a suffi pour cela d’adopter constamment, entre les diverses manières dont un même mot se trouve écrit dans les éditions originales, la forme qui se rapproche le plus de notre usage actuel. Grâce à cette orthographe, non pas inventée mais choisie, Rabelais, qu’on nous avait fait aussi vieux que Villehardouin, n’est plus que l’aîné de Montaigne. »

(Vallery-Radot. « Œuvres de Rabelais ». Dans Le Constitutionnel, 9 février 1857, p. 3)

Bibliothèque du Louvre incendiée (juin 1871)
Musée Carnavalet

La Bibliothèque du Louvre fut incendiée par les communards dans la nuit du 23 au 24 mai 1871. Le 1er octobre suivant, un Comité de reconstitution de la Bibliothèque du Louvre, composé de trois bibliophiles, Émile Bégin (1802-1888), François de Caussade (1841-1894) et Burgaud des Marets, publia un appel « À Messieurs les Secrétaires d’académie, Bibliothécaires, Bibliophiles, Libraires-Éditeurs et Journalistes de l’Europe et des États-Unis d’Amérique ». Après l’enthousiasme des premiers mois, le Comité dut abandonner le projet, qui avait reçu pourtant un très large commencement d’exécution, et suscité la générosité de plusieurs bibliophiles éminents.

Henri Burgaud des Marets, par Achille Devéria (1856)

La vanité n’avait pas de part dans la passion du bibliophile Burgaud, qui ne mit aucune marque de possession sur ses livres.

« C’était un bibliophile consciencieux et ardent ; qui ne considérait point le prix auquel lui revenaient ses trouvailles, tant le plaisir de les posséder lui paraissait au-dessus de tout dans le monde, et qui, bien que profondément instruit, aimait à s’entourer de livres capables d’augmenter ses connaissances. Il était constamment en quête d’ouvrages célèbres, uniques dans l’espèce, introuvables… Les in-folios séculaires s’entassaient dans sa riche bibliothèque. Il affirmait un goût intelligent pour la possession des plus merveilleuses productions du génie humain, et, collectionneur de beaux livres, il se délassait de ses travaux par la lecture des ouvrages qu’il avait choisis avec soin et groupés avec méthode en obéissant à des idées littéraires préconçues. […]

Son séjour constant à Paris pendant le siège et sous la Commune, les fatigues, les vexations, les persécutions de toutes sortes qu’il essuya, les pénibles travaux qu’il dut s’imposer pour la réorganisation d’une de nos grandes bibliothèques nationales avaient rapidement usé une santé qui paraissait robuste. Au mois de juillet 1872, une première attaque de paralysie le cloua sur son lit ; il perdit un œil et l’usage du bras gauche. Depuis cette époque, le mieux fut si faible et si rare qu’il ne put jamais retourner à la Bibliothèque et qu’il n’ajouta rien à ses œuvres littéraires. En septembre 1873, une rechute terrible le frappa, et, quelques jours après, il disparut de ce monde après de cruelles souffrances !...

Quelques mois avant sa mort, sentant ses forces diminuer et agité par de sombres pressentiments, M. Burgaud des Marets avait jeté au feu ses manuscrits inachevés, afin de soustraire le fruit de ses travaux à une paternité collective et aux remaniements d’une collaboration posthume. »

(Eutrope Lambert. « Burgaud des Marets. Étude littéraire et biographique » Dans Le Charentais, 24 septembre 1874, p. 2)

 


La guerre, la Commune et la perte de sa fortune contribuèrent à aggraver sa santé déjà très précaire. Espérant que le produit de la vente de ses livres suffirait à dédommager ses créanciers, Burgaud résolut de vendre sa bibliothèque, du lundi 5 au samedi 17 mai 1873, en 12 vacations, Salle Silvestre, 28 rue des Bons Enfants, salle n° 1, au premier étage : Bibliothèque patoise de M. Burgaud des MaretsLivres rares et précieux, la plupart avec reliure de Capé et de Trautz-BauzonnetImpressions sur peau de vélin, papier de Chine et de couleur (Paris, A. Maisonneuve et CIE, 1873, in-8, VII-[1 bl.]-222 p., 2.275 – 3 manquants + 2 doubles [a et bis] + 1 triple [b] + 1 quadruple [c] + 1 quintuple [d] = 2.277 lots), dont Langue basque [293 lots = 12,86 %], Dialectes et patois français [1.286 lots = 56,47 %], Dialectes espagnols [69 lots = 3,03 %], Dialectes italiens [200 lots = 8,78 %], Rhéto-Romanche ou Grison [61 lots = 2,67 %], Langues celtiques [280 lots = 12,29 %], Patois anglais [55 lots = 2,41 %], Patois allemands [6 lots = 0,26 %], Argot des voleurs [24 lots = 1,05 %], Langue des Cigains ou Gitanos [3 lots = 0,13 %]. La courte introduction est signée « C. L. » [Charles Leclerc (1843-1889)].  

La vente eut peu de succès : au lendemain de la guerre et de la Commune, beaucoup d’amateurs ne vinrent pas. Jean-Claude Maisonneuve (1813-1884), 15 quai Voltaire [VIIe], acheta pour son compte 1.367 numéros. Au cours de la vente, 173 numéros furent retirés et il y eut 11 manquants. Le produit total de la vente s’éleva à la somme dérisoire de 21.778 fr. 75 c.


 

27. Guero bi partetan partitua et a bereoia. Bordelen, G. Milanges, 1643, in-8, mar. r., d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



33. Bible Saindua, edo Testament Zahar eta Berria, Duvoisin kapitainak latinezko Bulgatatik lehembiziko aldiko Laphurdiko eskarara itzulia. Londresen, Impensis Ludovici Luciani Bonaparte, 1859-1865, in-8, br., 251 ex. La Sainte Bible, traduite pour la première fois en langue basque du Labourd.



62. Senar emazte santuac. Necazari ezcondu, ta beste guciac, lurrean ceruco bicitza eguiteco Ispillu eder biciac. Iruñean, Antonio Castillaren, 1766, in-8, fig., mar. vert, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).

Photographie BnF


87. Jesu-Christoren Imitacionea, M. Chourio Donibaneco Erretorac, Escararat itçulia. Bayonan, Fauvet-Duhart, 1769, in-8, mar. bleu, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



107. Manual devotionezcoa, edo ezperen, oren oro escuetan erabilltçeco liburutchoa. Bordelen, I. Mongiron. Millanges, 1669, in-8, mar. La Vallière, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



150. Philotea edo devocioneraco bide erakuscaillea S. Franses Salescoac. Tolosan, Joannes Franses Robert, 1749, in-8, mar. corinthe, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



166. Gramatica escuaraz eta francesez. Bayonan, Fauvet, 1741, in-8, veau fauve, dos orné, d. s. t. (Closs).



168. Averiguaciones de las antiguedades de Cantabria. Salamanca, Eugenio Antonio Garcia, 1689, in-fol., vél. blanc.

Photographie Musée basque


193. Kalendrera, bazco noiz daten. Rochellan, Pierre Hautin, 1571, pet. in-12, mar. La Vallière, d. s. t. (Capé).

Photographie BnF


202. De la antiguedad, y universalidad del Bascuenze en España. Salamanca, Antonio Joseph Villargordo, s. d. [1729], pet. in-8, pl. armes, mar. chocolat, milieu en or, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).

Photographie BnF


203. De la antiguedad, y universalidad del Bascuenze en España. Salamanca, Eugenio Garcia de Honorato, 1728, pet. in-8, mar. r., fil., d. s. t. (Capé).



208. Diccionario trilingue del castellano, bascuence, y latin. San Sebastian, Bartholomé Riesgo y Montero, 1745, 2 vol. in-fol., non relié.



230. Annales del reyno de Navarra. Pamplona, Pascual Ibañez, 1766, 5 vol. in-fol., vél.



237. Notitia utriusque Vasconiæ, tum Ibericæ, tum Aquitanicæ. Parisiis, Sebastiani Cramoisy, 1638, in-4, mar. corinthe, d. s. t. (Capé).



286. De literis & lingua getarum, sive gothorum. Lugduni Batavorum, Franciscum Raphelengium, 1597, pet. in-8, demi-mar. r.




288. Cristau dotrinaren esplicacioa. Madrillen, Antonio Sancharen, 1773, in-8, mar. La Vallière, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet). En basque et en espagnol.



506. Essai sur le patois lorrain des environs du comté du Ban de La Roche. Strasbourg, Jean Fred. Stein, 1775, in-12, demi-mar. r., doré en tête, non rogné (Capé).

Photographie Déjà-Jadis, Fréjus


549. Virgille virai en borguignon. Dijon, Antone de Fay, 1718, pet. in-12, demi-mar. vert (Capé).

Photographie BnF


558. Inventaire général de la Muse normande. Rouen, Chez l’Autheur, 1655, in-8, mar. La Vallière, d. s. t. (Capé).

Photographie BnF


672. La Moirie de Sen-Moixont o lez vervedé de tretoute lez autre. Poictiers, Pierre Amassard, 1661, pet. in-4, mar. citron, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



769. Choix des poésies originales des troubadours. Par M. Raynouard. Paris, Imprimerie de Firmin Didot, 1816-1821, 6 vol. in-8, demi-mar. r., d. s. t.



776. Statuta provinciæ Forcalquieriique comitatum. Aix, Nicolas Pillehotte et Jean Tholosan, 1598, in-4, vél. blanc.

Photographie Université Toulouse


801. La Henriade de Voltaire, mise en vers burlesques auvergnats. S. l., 1798, pet. in-12, mar. r., fil., d. s. t., non rogné (Trautz-Bauzonnet).

Photographie BnF


846. Lo guémen don pouro labory de Breissy su la pav que la de la garra. S. l., 1615, in-4, demi-mar. r. (Capé).



875. Recueil de diverses pieces faites à l’antien langage de Grenoble. Grenoble, Philippe Charvys, 1662, in-8, non rogné, mar. bleu clair (Trautz-Bauzonnet).



984. L’Antiquité du triomphe de Besiers, au iour de l’Ascension. Besiers, Jean Martel, 1628, in-12, mar. r. doublé de mar. vert (Thouvenin). Ex. Soleinne.



1.139. Le dret Cami del Cél dins le pays moundi. Toulouso, Frances Boude, 1659, in-8, mar. vert, d. s. t. (Rel. anc.).



1.179. Dictionnaire provençal-français ou Dictionnaire de la langue d’Oc, ancienne et moderne, suivi d’un Vocabulaire français-provençal […]. Par S.-J. Honnorat, Docteur en Médecine. Digne, Repos, 1846-1848, 4 vol. in-4, demi-mar.

Photographie Université Bordeaux


1.430. Los Fors, et Costumas de Bearn. Pau, Johan de Vingles et Henry Poyvre, 1552, in-4, cart.



1.586. Aureum opus regalium privilegiorum civitatis et regni Valentie. [f. CCXLVI :] Valencie, 1515, in-fol. goth., fig., demi-rel. Seconde partie en dialecte valencien.



1.627. Chronica, o Descripcio dels fets, e hazanyes del inclyt rey Don Iaume Primer Rey Darago. Valencia, Joan Mey Flandro, 1558, in-fol., portr. en pied, vél. En langue catalane.



1.628. Chronica, o Descripcio dels fets, e hazanyes del inclyt rey Don Iaume Primer Rey Darago. Barcelona, Jaume Cortey, 1562, in-fol., bas. rac., tr. r.





1.647. Escritores del reyno de Valencia. Valencia, Joseph Estevan Dolz, 1747-1749, 2 vol. in-fol., vél. – Biblioteca Valentina. Valencia, Joseph Thomas Lucas, 1747, in-fol., vél. – Biblioteca Valenciana. Valencia, Ildefonso Mompié, 1827-1830, 2 vol. in-fol., br.



1.695. Rime diverse, in lingua genovese. Pavia, Gieronimo Bartoli, 1588, in-8, mar. violet, milieu en or, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



1.745. Lo Tasso napoletano ; zoè la Gierosalemme libberata. Napole, Jacovo Raillardo, 15 avril 1689, in-fol., mar. r., fil., d. s. t. (Capé).



1.849. Oratiuns christiaunas. Turi, Henric Muller, 1680, in-18, mar. bleu, fil., d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



1.852. La Sacra Bibla ; quai ais tuotla sancta scrittüra. Scuol, Jacob Dorta à Vulpera, 1679, in-fol., rel. en bois, fermoirs. En dialecte des Grisons.



1.853. La Sacra Biblia quai ais tuot la sonchia scrittüra. Scuol, Jacobo N. Gatina et Jacobo M. Wilhelm Rauch, 1743, rel., d. s. t., fermoirs.



1.900. L’Nouf S. Testamaint. Basel, Georg Decker, 1640, in-8, vél.



1.904. Unna informatiun in la vaira, vêlgia, Christiaunna Religiun. Puschlaff, Dolfin et Dolfin Landolffs, 1613, in-8.



1.905. Informatiun Chrastiauna. Tiguri, Wolphianis, 1613, rel., fermoirs.



2.038. Nouvelles recherches Sur la Langue, l’Origine & les Antiquités des Bretons. Bayonne, Pierre Fauvet jeune, 1792, pet. in-8, demi-mar. r., doré en tête, non rogné. De la plus grande rareté, l’auteur ayant racheté presque tous les exemplaires pour les détruire.

Photographie BnF


2.083. Le Sacré College de Iesus divisé en cinq classes. Quimper-Corentin, Jean Hardouyn, 1659, in-8, mar. vert, d. s. t. (Trautz-Bauzonnet).



2.137. Tragedien Sant Guillarm. Montroules, Guilmer, 1815, in-8, mar. r., d. s. t. (Capé).



2.155. Dictionarium scoto-celticum : a Dictionary of the gaelic language. Edinburgh, William Blackwood, et London, T. Cadell, 1828, 2 vol. in-4, demi-mar. r. (Capé).

 

Victime d’un accident vasculaire cérébral ayant constitué une hémiplégie gauche, Henri Burgaud des Marets mourut le 6 octobre 1873, en son domicile parisien. 



Suivant son désir plusieurs fois exprimé, son corps fut déposé dans le tombeau de sa mère, au cimetière des Grands-Maisons, à Jarnac, le vendredi 10 octobre 1873. Les journaux de Paris n’ont pas dit un mot de la mort de Burgaud des Marets ; ceux de la région saintongeaise n’ont guère été plus loquaces.


 

Lui restaient des ouvrages, qui furent achetés en bloc par Maisonneuve et qui formèrent un catalogue à prix marqués : Bibliothèque patoise de feu M. Burgaud des Marets. – Livres rares et précieux, la plupart avec reliure de Capé et de Trautz-Bauzonnet, impressions sur peau de vélin, etc., etc. – Deuxième partie (Paris, Maisonneuve et Cie, 1874, in-8, [3]-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-130-[2]-[1 bl.]-[1] p., 1.286 [chiffrés 2.276-3.561] lots), avec, à la fin, la « Liste et prix des numéros de la première partie du Catalogue de la bibliothèque de M. Burgaud des Marets – Ouvrages encore en vente ».


15 rue Basse, Jarnac (juillet 2021)

 

Le dimanche 20 septembre 1931, à Jarnac, fut apposée une plaque commémorative sur l’immeuble élevé sur l’emplacement de sa maison natale et fut inauguré le monument élevé à sa mémoire, place de l’Ancien Marché.