Rue Saint-Leu au XIXe siècle, par Chapuy. Hôtel-Dieu à droite, église Saint-Leu à gauche, cathédrale au fond. |
Louis-François-André
Gaudefroy est né à Amiens [Somme], le 20 septembre 1758, rue
Saint-Leu, et a été baptisé le même jour en l'église Saint-Leu.
Ses parents, André Gaudefroy, marchand épicier, et Marie-Geneviève
Petit, s'étaient mariés le 26 avril 1755, en l'église
Saint-Firmin-le-Confesseur [détruite en 1798].
Il fut reçu libraire à
la Chambre syndicale de Paris en 1787.
Sous la Révolution, il
fut nommé commissaire littéraire à la Bibliothèque du district de
sa ville natale. C'est sous sa direction que fonctionna la Commission
formée le 26 floréal an II, pour la recherche, le transport,
l'inventaire, le récolement et la conservation des monuments des
arts appartenant à la Nation, dans l'étendue du district. C'est en
cette qualité qu'il a rédigé les catalogues alphabétiques des
livres des bibliothèques de l'abbaye de Saint-Jean d'Amiens, des
religieux Dominicains d'Amiens et du marquis de Vérac, émigré,
trouvés en son château d'Orival [Somme, détruit].
Les fonctions de la
Commission des arts ayant cessé avec la suppression du district, le
10 frimaire an IV, Gaudefroy ouvrit un magasin de librairie à
Amiens, rue des Rabuissons [rue de la République], n° 5.395, au
premier, près le Département. Il annonçait « que son magasin est
des mieux fournis dans toutes les classes bibliographiques, même en
ouvrages secrets parus à l'étranger sous Louis XV et Louis XVI,
écrits de mains de maîtres, prohibés sous l'ancien régime,
présentant un tableau fidèle et exact des anecdotes secrètes les
plus piquantes, et la chronique scandaleuse de la cour et de la
ville, etc. » Il offrait de ranger dans le meilleur ordre
bibliographique les bibliothèques qu'on voudrait bien lui confier et
d'en dresser les catalogues.
Dès le début du siècle
suivant, n'ayant pas trouvé le succès qu'il espérait, Gaudefroy
retourna s'installer à Paris, 32 rue de Grenelle-Saint-Honoré
[partie sud de la rue Jean-Jacques-Rousseau, Ier],
vis-à-vis la rue des Deux-Écus.
Il profita des lumières du bibliothécaire Louis Ripault
(1775-1823), qui l'appela quand il fut chargé, en juillet 1800, de
constituer à Saint-Cloud une bibliothèque pour le Premier Consul.
Il rédigea divers catalogues d'ouvrages dont il opérait la vente
aux enchères, entre autres celui de Le Monnier :
Catalogue des livres
de la bibliothèque, et notice d'instruments de physique,
d'astronomie, etc. provenants [sic] du
cabinet de feu L. G. Le Monnier, docteur régent de la Faculté
de médecine de Paris, membre de l'Académie des sciences de
Paris, et autres, premier médecin de Louis XVI ;
[…] : le tout disposé et mis en ordre par L. F. A. Gaudefroy.
(Paris, Gaudefroy, an XII-1803, in-8, xxij-[1]-[1 bl.]-226-4- p.,
2.176 + 21 = 2.197 lots).
Vente en 23 vacations, du
lundi 11 nivose-2 janvier au vendredi 6 pluviose-27 janvier an
XII-1804, Salle de vente rue des Bons-Enfants, 19 et 36, en face de
l'entrée de la cour des Fontaines.
D'une famille originaire
de Saint-Sever-Calvados, Louis-Guillaume Le Monnier est né à Paris
le 27 juin 1717, de Pierre Le Monnier (1675-1757), professeur de
philosophie au Collège d'Harcourt, et de Marie-Louise Gaillard
(1685-1757).
Physicien et botaniste,
il fut placé dès 1739 à Saint-Germain-en-Laye, comme médecin de
l'hôpital. Membre de l'Académie des sciences, comme son père et
son frère, en 1743, il fit l'herborisation de la forêt de
Fontainebleau en 1745, avec Linné et Antoine et Bernard de Jussieu.
En 1755, il fut nommé professeur au Jardin des plantes. En 1771,
Louis XV lui donna les fonctions et les honneurs de la place de
premier médecin du Roi, dont il ne prit le titre que sous Louis XVI,
en 1788.
Le 2 octobre 1773, il
épousa, à Versailles, Marie-Ursule Durant Demonville (1727-1793),
première femme de chambre de Madame Victoire de France et veuve de
Jean-André Martin (1725-1762), commissaire de guerres. Remarié le
26 pluviose an VI [14 février 1798], à Versailles, avec une de ses
nièces, Renée-Michelle Le Monnier (1769-1820), fille de l'astronome
Pierre-Charles Le Monnier (1715-1799), il mourut à Versailles, en
son domicile du 18 rue Michel Montaigne, le 21 fructidor an VII [7
septembre 1799].
« Après avoir rendu le
compte que j'ai cru nécessaire de la rédaction de notre Catalogue,
il ne me reste plus qu'à entretenir un instant les Amateurs des
articles importants qu'il présente : ils en trouveront d'excellents
dans toutes les classes.
L'Histoire Naturelle en
fournit un grand nombre dans toutes ses parties, principalement dans
la Botanique, étude chérie et adoptive de la vie paisible de M. Le
Monnier : on y verra d'abord presque tous les ouvrages de Linné,
parmi lesquels on pourra distinguer un exemplaire précieux du
Species Plantarum avec notes et additions manuscrites,
l'Histoire de la Jamaïque de Browne, Gessner historia
naturalis, le bel exemplaire du comte d'Hoym de l'Aldrovande,
la majeure partie des figures enluminées des Oiseaux de Buffon,
Oiseaux et Glanures d'histoire naturelle d'Edwards, fig.
coloriées, Morison Plantarum historia, un très bel
exemplaire de l'Hortus Malabaricus, Desfontaines Flora
Atlantica, pap. vélin, Recueil des Plantes de Robert,
Bosse et Chastillon, deux recueils très précieux de
Fleurs, Plantes, Arbres et Arbustes dessinés et peints
à la Chine. On en ajoutera de plus un troisième, qui sera
exposé sous le n° 421 bis. Il avoit été réservé par la
veuve comme le plus fini dans ce genre, du pinceau et des couleurs
les plus agréables, moins volumineux à la vérité que les deux
précédents, ne contenant que 135 dessins d'Oiseaux et 6 de
Dorades supérieurement exécutés à la Chine : cette estimable
dame vient de s'en détacher en reconnoissance des soins que j'ai
donnés à son Catalogue, raison pour laquelle il n'a pu y être
compris et annoncé.
On y trouvera encore les
descriptions de divers jardins célèbres, données par les Trew,
Commelin, Dillenius, Aïton, et autres illustres
Botanistes ; les éditions originales et très rares du Phytobazanos
et de l'Ekphrasis, l'Héritier Stirpes novæ
; un magnifique exemplaire de Schœffer
Fungi circa Ratisbonam, etc. ; l'édition rarissime de 1741 du
Dillenius historia Muscorum, Plukenet opera botanica,
Kempfer Amoenitates exoticæ,
Commentarii de rebus in
Scientiá naturali et Mediciná,
34 vol. in-8° ; ce recueil, imprimé à Leipsick,
très intéressant, et rarement aussi complet, fut porté à la vente
du médecin Baron, où il ne se trouvoit alors qu'en 28 volumes, à
160 liv.
La
Médecine, l'Anatomie, la Chirurgie, la Chimie et l'Alchimie,
contenant une collection aussi importante qu'immense d'ouvrages
estimés, curieux et piquants, je n'en extrairai ici aucun, renvoyant
les Amateurs instruits, qui voudront en prendre connoissance, aux
divisions où ils sont détaillés : je puis leur assurer d'avance
que, depuis les Ventes Baron et Petit, ils n'auront trouvé une
réunion aussi complete de bons livres sur ces parties de sciences si
utiles à l'humanité souffrante.
Les
Mathématiques et l'Astronomie offrent aussi d'excellents ouvrages.
Les
autres subdivisions de cette classe présentent encore la grande
Galerie de Versailles, et la Description des Arts et Métiers,
presque complete.
Quoique
les Belles-Lettres aient été la partie la plus négligée de
la Bibliotheque de notre célèbre Médecin, parmi les Dictionnaires
qu'il y a placés, on y remarquera un exemplaire pur du Lexicon,
grec et latin, de Constantin ; et dans les Poëtes, un
exemplaire de présent du Racine de Luneau de Boisjermain, en
pap. de Hollande, relié en mar., etc.
L'Histoire, et sur-tout
la partie des Voyages qui a une connexité plus intime avec la
Botanique, passion favorite, comme on l'a vu plus haut, de notre
savant Naturaliste, présentera une plus abondante moisson aux
Amateurs : ils distingueront d'abord, dans la Géographie, un bon
exemplaire du Strabon, grec et latin, de 1707,
le Neptune oriental de d'Après de Mannevillette, un très bel
exemplaire du Cours du Danube, etc. ; dans les Voyages,
un exemplaire de souscription de la traduction des 3 Voyages de
Cook, presque tous les Voyages savants, ceux de
Tournefort, Niébuhr, Chardin, Sonnerat, et
autres célèbres Voyageurs ; ceux de Richard Pococke, 3
vol. in-fol., en anglois, de Bruce, 5 vol.
in-4° idem, un superbe exemplaire du Voyage à Madere,
aux Barbades et à la Jamaïque, de Hans Sloane, 2 vol.
in-fol. mar. r., aussi en anglois, etc.
L'Histoire ancienne offre
également les bons écrivains traduits, ou originaux. Les Antiquités
et l'Histoire Littéraire présentent de même des articles, qui
eussent été très importants si la perte de la fortune de leur
propriétaire ne l'eût empêché de s'en procurer les suites : parmi
ces articles intéressants on distinguera les premiers volumes des
Antiquités Etrusques d'Hamilton, des Peintures
d'Herculanum, 131 vol. des Mémoires de l'Académie des
Sciences, 35 vol. de l'Académie de Pétersbourg, et
autres parties de diverses Académies, etc.
Enfin on trouvera dans
l'Addition nombre de bons ouvrages qui méritoient pareillement leur
place dans le présent Catalogue. Les livres en nombre et en
blanc, qui le terminent, étant d'un Astronome qui a joui d'une
grande célébrité, M. Le Monnier, frere du médecin, pourront
présenter encore de l'intérêt aux libraires qui en fonds des
articles de Sciences exactes, et qui font des échanges avec
l'étranger.
Les Instruments de
Physique, Mathématiques, Astronomie et autres, satisferont les
curieux, plusieurs étant très précieux et d'une correction
achevée. » [sic] (p. x-xiij)
Gaudefroy
fut nommé en 1810 inspecteur de la librairie et de l'imprimerie à
la résidence de Paris. Il demeurait alors 30, rue
Saint-Thomas-du-Louvre [Ier, disparue en 1850]. Quand
cette place fut supprimée en 1815, Gaudefroy reprit la confection
des catalogues, d'abord à Paris, puis à Bruxelles, de 1816 à 1823,
où il prit part à la rédaction de la Revue bibliographique des
Pays-Bas, fondée en 1822 par P. J. De Mat (+ 1828), libraire et
imprimeur sur la Grand' Place.
Catalogue raisonné de
la bibliothèque de feu C. L. Van Bavière, ancien professeur
d'histoire à l'École
centrale du département du Nord, secrétaire de l'Académie
et de la Faculté de droit de Bruxelles :
rédigé et mis en ordre par L. F. A. Gaudefroy,
ancien libraire de Paris.
Tome premier. (Bruxelles, P. J. De Mat, 1816, in-8,
xxiv-[4]-433-[2]-[1 bl.] p., 5.460 lots).
Vente en 22 vacations, du
mardi 12 novembre au vendredi 6 décembre 1816. Salles basses de
l'ancienne Cour, qui sont sous le Musée.
Charles-Louis
Van Bavière est né le 18 octobre 1765 à Cassel [Nord], de
Robert-Jean Van Bavière et de Marie-Ernestine-Claire Lombart.
Licencié
en droit de l'Université de Douai, il préféra toutefois les travaux d'érudition et les recherches
historiques et littéraires. Il fut bientôt appelé à Lille comme
professeur d'histoire à l'École centrale du département du Nord,
puis à Bruxelles comme secrétaire de l'Académie et secrétaire
général de la Faculté de droit. Il profitait du temps des vacances
pour visiter les villes les plus commerçantes en librairie, tant de
la Hollande que de la France et de l'Allemagne : Amsterdam, Leyde,
Paris, Francfort, Leipsick, etc. Ses nombreuses et riches collections
étaient distribuées dans huit pièces. Alors qu'il voulait se
retirer en France, il mourut à Bruxelles, presque subitement, le 16
mars 1815.
Depuis
Carlos-Antonio de La Serna Santander (1752-1813), il ne s'était
point formé en Belgique de bibliothèque particulière aussi riche
que celle de Van Bavière.
«
J'ai connu dans mon enfance cet excellent Van Bavière, qui était
bien le plus paresseux de tous les suppôts de l'académie de
Bruxelles, après son recteur, bien entendu. Les inscriptions, les
examens, l'expédition des diplômes l'ennuyaient à la mort ; il ne
prenait plaisir qu'aux bons dîners et aux ventes de livres. Là il
recherchait de préférence les paquets de hasard, qu'on
obtient pour quelques sous. Il comptait, en effet, sur la fortune, et
avec sa méthode de dépecer des volumes pour en extraire les pages
qui se rapportaient à certaines [sic] sujets favoris, il trouvait
toujours dans le plus affreux fatras, de quoi se satisfaire. »
(Frédéric de Reiffenberg. « Des marques et devises mises à leurs
livres par un grand nombre d'amateurs. » In Le Bibliophile belge.
Bruxelles, A. Van Dale, 1845 [i.e. 1844], t. I, p. 172)
Pour
détailler le contenu de 80 caisses dans lesquelles se trouvaient
toutes les collections, Gaudefroy fut aidé, pendant les cinq
premiers mois, par Pierre-François De Goesin-Verhaeghe, imprimeur,
rue Hautport, à Gand.
«
D'après un simple apperçu de la main du propriétaire, nous voyons
que sa bibliothèque est composée de 40,000 articles au moins : nous
ferons nos efforts pour en présenter au Public le choix dans un
Catalogue raisonné, que nous réduirons, si faire se peut, à 4
Volumes in-8° d'environ 500 pages chacun. » [sic] (p. xij)
Outre
le tome 1er, consacré aux ouvrages de Théologie, le
catalogue devait comprendre un tome 2 [Sciences et Arts, Codes
religieux et Histoire des religions et des superstitions, Histoire de
la Belgique, de la Hollande, de la France et des pays du Nord de
l'Europe], un tome 3 [Géographie et Voyages, Chronologie, Histoire
universelle et ancienne, Histoire des autres pays de l'Europe,
Histoire de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique, Histoire
héraldique et Antiquités, Histoire littéraire et Biographie], un
tome 4 [Belles-Lettres] et un tome 5 [Subdivisions des
Belles-Lettres, Histoire littéraire et bibliographique].
Gaudefroy
n'a mis en ordre que la première partie du tome 2, qui fut imprimée,
en son absence, sur très mauvais papier, ainsi que les suivants
publiés de 1817 à 1820. Les dix ou onze ventes successives
réussirent mal. De surcroit, les créanciers opérèrent une saisie
judiciaire sur les débris de la bibliothèque : Catalogue des
livres saisis de Ch. Van Bavière (Bruxelles, 1818, in-8).
Van
Bavière utilisait un ex-libris typographié [50 x 45 mm.], avec une
couronne d'olivier, gravée sur bois : au centre, « EX
BIBLIOTHECA C. VAN BAVIÈRE,
FACULT. JURIS ACAD. BRUXELL. A
SECRETIS » ; au bas, « FRANC et LOYAL
».
Description
bibliographique d'une très-belle collection de livres rares et
curieux, provenant de
la bibliothèque de Melle la comtesse d'Yve,
rédigée par feu M. D. L. S. [De
La Serna] ; revue et achevée par L. F. A. Gaudefroy,
ancien libraire de Paris. Tome premier. (Bruxelles,
Aug. Wahlen et Compe,
1819, in-8, [1]-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-[2]-xix-[1 bl.]-338-[1]-[1 bl.]
p., 2.915 lots).
Vente
en 15 vacations, du lundi 4 au mercredi 20 octobre 1819, en son
hôtel, 29 rue de Louvain.
Auguste
Wahlen (Bruxelles, 1785-Paris, 1849), imprimeur-libraire de 1817 à
1830, rue de l'Evêque, à Bruxelles, fut le régénérateur de
l'imprimerie en Belgique. Son nom fut utilisé comme pseudonyme par
Jean-François-Nicolas Loumyer (1801-1875).
Anne-Thérèse-Philippine
d'Yve (Bruxelles, 28 juillet 1738-25 mars 1814), fille de
Gaspard-Henri-René d'Yve (-1749), comte de Ruysbroeck, et de
Anne-Philippine-Antoinette Van der Noot (1715-), s'était d'abord
vouée à la politique et fut une des héroïnes de la révolution
brabançonne de 1789. Elle est morte sans alliance. Sa bibliothèque
passait pour l'une des plus riches de l'Europe.
Son ex-libris portait
ses armes, « Palé de gueules et de vair ».
«
Sous le n° 6 la Bible de Mayence, sans date (vers
1455), dans sa première reliure, dont les catalogues des plus beaux
cabinets, publiés depuis 60 ans, n'ont offert que 3 exemplaires sur
papier.
Sous
le n° 7, la première Bible avec date fixe, celle de 1462,
aussi imprimée à Mayence par Fust et Schoiffer.
L'exemplaire de M. Crevenna, coupé en 4 vol. et relié en maroquin,
conséquemment en seconde reliure, fut porté à sa vente, en 1790, à
1460 flor. Notre exemplaire est en 2 voL, dans sa première reliure
en bois. […].
On
trouvera dans la JURISPRUDENCE, sous le n° 555, la Bulle du Pape
Pie II contre les Turcs, imprimée à Mayence, en 1460,
par P. Schoiffer ; […].
On
remarquera d'abord dans les SCIENCES ET ARTS, la première édition
de l'Encyclopédie, en 35 vol. in-fol., sous le n° 1167 ; à
l'HISTOIRE NATURELLE, celle de Buffon et
Daubenton, édition de l'impr. royale, 37 vol. in-4,
sous le n° 1813 ; l'Aldrovande, édition de Bologne,
1599, 13 vol. in-fol. sous le n° 1820 ; […].
Quoique
les BELLES-LETTRES paraissent avoir été la partie la plus négligée
de cette Bibliothèque, on y rencontrera encore d'excellens ouvrages
: d'abord sous le n° 2409, Le Glossaire de Ducange, avec
le Supplément de Carpentier, 10 vol. in-fol., et quelques autres
articles très-rares qui se trouvent décrits depuis le n° 2516,
jusqu'au n° 2530 ; […].
Reste
à parler de la rédaction du catalogue : je l'ai trouvé tout fait,
et je n'en ai même eu connaissance qu'entre les mains de
l'imprimeur, quand il en avait déjà fait composer 4 feuilles, par
son invitation, à l'effet d'en coordonnancer les divisions et d'en
corriger les épreuves. » (p. i-v)
Description
bibliographique d'une très-belle collection de livres rares et
curieux, provenant de
la bibliothèque de Melle la comtesse d'Yve
; rédigée et mise en ordre par L. F. A. Gaudefroy,
bibliographe. Tome second. (Bruxelles,
Aug. Wahlen et Compe,
1820, in-8, [1]-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-[6]-xvij-[1
bl.]-561-[1 bl.] p., 3.906 [numérotés 2.916-6.821] lots).
Vente
en 19 vacations, du lundi 9 au lundi 30 octobre 1820, en son hôtel,
29 rue de Louvain.
«
quoique ce volume n'offre pas au premier abord, comme notre
précédent, des articles de la première rareté, […] qui se
trouvaient principalement dans la THÉOLOGIE,
on verra, dans ce tome 2, après plusieurs articles des premières
éditions de l'HISTOIRE UNIVERSELLE, ou
CHRONIQUES, […], une version latine de Flavius
Josephus : Argentinæ,
typis Mentellianis
(circà 1472).
Cette édition est aussi rare
que celles qui viennent d'être citées, quoiqu'elle soit inférieure
en prix. » (p. i-ij)
Gaudefroy a revu la 3e
édition du Manuel du libraire et de l'amateur de livres
(Paris, chez l'auteur, 1820, 4 vol. in-8), par
Jacques-Charles Brunet (1780-1867), contrefaite par
l’imprimeur-libraire bruxellois H. Remy, rue de l'Empereur, en 1821
:
Manuel du libraire et de l'amateur de livres (Bruxelles, P.
J. De Mat et H. Remy, 1821, 4 vol. in-8). Le premier volume a paru en
janvier, les trois autres ont suivi régulièrement de deux en deux
mois. Informé que cette édition avait rectifié un grand nombre de
numéros de renvoi fautifs, l'imprimeur-libraire P. J. De Mat traita
avec son confrère du restant de l’édition, un mois après la mise
en vente du dernier volume :
Dans cette édition de
Bruxelles, les signatures sont placées de huit pages en huit pages
et en chiffres, au lieu d’être en lettres et de seize pages en
seize pages.
Le tome I de l’édition
de Paris finit à la page 616. Celui de l’édition de Bruxelles a
sa pagination continuée jusqu’à 620 : les deux derniers feuillets
contenant les additions du même volume qui sont placés, avec celles
des tomes II et III de l’édition de Paris.
Le tome II de l’édition
de Paris est terminé à la page 608. L’édition de Bruxelles a 610
pages, deux pages de plus pour les additions de ce volume.
Le tome III de l’édition
de Paris, ayant à la fin toutes les corrections et additions de ses
trois volumes, a 644 pages, tandis que le même volume de l’édition
de Bruxelles a 638 pages. Les corrections de l’édition de Paris,
ayant été rectifiées à leur place dans l’édition de Bruxelles,
ne se trouvent conséquemment pas à la fin de chacun des volumes de
cette édition.
Au tome IV, édition de
Paris, la page vij des pièces préliminaires se termine par une
table de 13 lignes dont la dernière est : « Classiques italiens,
imprimés à Milan … 588 ». Dans l’édition de Bruxelles, après
cette même ligne, on a ajouté un « AVIS
ESSENTIEL. », contenu en 14 lignes, qui indique sommairement
une partie des corrections faites dans les trois précédents volumes
; plus, la manière qu’on a été obligé d’employer dans ce
volume pour rectifier les erreurs des chiffres de renvoi du tome I ;
c’est-à-dire qu’on a placé, entre deux crochets, le vrai
chiffre de renvoi, après celui de la série qui se trouve être
fautif dans l’édition de Paris. Le tome IV dans les deux éditions
finit à la page 589 : dans celle de Paris, au verso, est une
correction pour la « Page 9, n° 339 », qui a été faite à sa
place dans l’édition de Bruxelles ; cette dernière a, sur le
verso de la page 589, une « ADDITION AU TOME QUATRIEME.
», composée seulement de trois lignes dans la première colonne et
de quatre dans la seconde ; plus, un « ERRATA. »
aussi de quatre lignes ; enfin il a été ajouté dans cette dernière
édition des « NOUVELLES ADDITIONS AU TOME PREMIER.
», sur les traductions françaises de deux ouvrages d’Aristote,
données par Oresme, et imprimées chez Antoine Vérard, en 1488 et
1489, signées « L.-F.-A. GAUDEFROY,
bibliographe. »
« En
s’emparant ainsi de ma propriété, ces messieurs ont usé d’un
droit que je ne puis légalement leur contester hors de France ; mais
en même temps ils ont fait une chose qui n’est loyale nulle part :
c’est d’avoir mis en circulation une partie des exemplaires de
leur contrefaçon avec des titres portant l’indication de Paris
et mon adresse, et d’avoir donné ainsi à certains libraires
anglais qui me sont bien connus, le moyen de les vendre pour
l’édition originale. Or, comme je ne veux répondre que de mes
propres fautes, je désavoue entièrement cette édition de
Bruxelles, qui se distingue de la mienne au premier coup d’œil […]
» (J.-C. Brunet. Nouvelles recherches bibliographiques.
Paris, Silvestre, 1834, t. I, p. xj)
Le
dernier travail de Gaudefroy en Belgique fut le Catalogue
de la bibliothèque d'un amateur, […]. Tome premier.
[Tome second.] (Bruxelles, P. J. De Mat, 1823, 2 vol. in-8,
[1]-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-iv-lxxxviij-20-318 et [1]-[1 bl.]-[1]-[1
bl.]-490 [chiffrées 319-808] p., 2.834 et 4.084 [numérotés
2.835-6.918] lots). Avec une « Table alphabétique des noms des
auteurs, et titres des ouvrages anonymes. »
L'amateur est P. J. De
Mat.
La vente n'eut lieu qu'en 1841, en 19 vacations, du jeudi 5 au
mercredi 26 mai, 24 rue de Batterie : Catalogue des livres anciens
et modernes composant la collection connue depuis 1823 sous la
dénomination de : Bibliothèque d'un amateur belge,
collection délaissée par feu P.-J. De Mat, ancien
libraire, à Bruxelles, décédé le 24 février 1828
(Bruxelles, Imprimerie de Jean De Mat, 1841, in-8, VIII-361-[1 bl.]
p., 6.084 + 403 = 6.487 lots).
« Après les collections
de MM. Van Hulthem et Lammens, le catalogue que nous présentons
aujourd'hui au public est un des plus complets qui aient été
exposés en vente publique dans notre royaume. […]
Cette collection, fruit
de 30 années de recherches et de la fréquentation des plus belles
ventes faites en Belgique depuis 1805 jusqu'à nos jours, a été
enrichie successivement par son fondateur, feu P.-J. De Mat, d'une
foule d'excellentes éditions ; on retrouve dans la partie des
Belles-Lettres beaucoup de ces ouvrages si purs de texte, édités
par les Elzevir, les Plantin, les Alde, les Wettstein, les Verdussen,
les Baskerville et autres imprimeurs célèbres, dont les
chefs-d'œuvre deviennent
plus rares de jour en jour. » (p. I)
41, quai des Grands-Augustins |
Revenu de nouveau à
Paris en 1824, il s'installa dans un immeuble construit en 1680, 41
quai des Augustins [quai des Grands-Augustins, VIe], y
vendit des livres et y dressa des catalogues.
Catalogue des livres
composant la bibliothèque de feu M. le chevalier Delambre
(Paris, L. F. A. Gaudefroy et Bachelier, 1824, in-8, [1]-[1
bl.]-[1]-[1 bl.]-xiv-[2]-100 p., 1.554 + 9 = 1.563 lots).
Vente en 15 vacations, du
lundi 10 au mercredi 26 mai 1824, en sa maison du 10 rue du Dragon
[VIe].
Fils
aîné de Jean-Nicolas-Joseph Delambre (1718-1800), drapier rue de la
Viéserie [rue Delambre], et d'Élisabeth
Devismes, Jean-Baptiste-Joseph Delambre est né à Amiens [Somme], le
19 septembre 1749. Il a été baptisé le même jour en l'église de
Saint-Firmin-en-Castillon [détruite en 1806].
Il
eut dans le collège de cette ville le poète Jacques Delille
(1738-1813) pour professeur. Il devint ensuite l'élève de Jérôme
Lefrançois de Lalande (1732-1807) dont il fut le collaborateur et
l'ami. Précepteur des enfants de Jean-Claude Geoffroy d'Assy
(1729-1794), receveur général des Finances, qui mit à sa
disposition un petit observatoire [détruit vers 1912] sur le toit de
son propre hôtel, rue de Paradis [58 bis rue des Francs-Bourgeois,
IIIe, dépendance des Archives nationales], Delambre y
dressa ses tables astronomiques, qui lui ouvrirent les portes de
l'Académie des sciences dès 1792. Dans la même année 1792, il fut
chargé avec Pierre Méchain (1744-1804) de mesurer un arc du
méridien depuis Dunkerque jusqu'à Barcelone, et il est généralement
considéré comme ayant fixé la base du système métrique. Entré
au Bureau des Longitudes à sa création en 1795, il fut nommé en
1802 un des trois inspecteurs généraux des études. En 1804, il
épousa sa compagne de longue date, Élisabeth-Aglaé
Sinfray, veuve d'Achille Leblanc de Pommard, ancien prévôt général
de la maréchaussée de Touraine. Élu
par la classe des sciences de l'Institut secrétaire perpétuel en
1805, il fut appelé au Collège de France en 1807 pour remplacer
Lalande dont il prononça l'éloge. Son rapport sur les progrès des
sciences mathématiques, de 1789 à 1807, jouit d'une estime méritée,
et son grand ouvrage sur l'histoire de l'astronomie, est un livre
classique. Delambre mourut à Paris, le 19 août 1822, et fut inhumé
au cimetière du Père-Lachaise [10e div.]. Sa veuve, née
à Paris le 5 août 1761, décéda le 28 septembre 1833 et fut
inhumée au chevet de l'église de Bréauté [Seine-Maritime].
«
Chargé, en 1815, de faire le Catalogue de la Bibliothèque de
l'illustre Lagrange, je fus obligé d'en abandonner bientôt la
rédaction pour me livrer à d'autres travaux bibliographiques
beaucoup plus considérables, qui m'ont retenu à Bruxelles pendant
huit ans. Maintenant que je viens reprendre à Paris les occupations
auxquelles je m'étais livré pendant 30 années, je me trouve très
flatté d'avoir été choisi pour rédiger le Catalogue de la
Bibliothèque de mon savant Compatriote qui m'a honoré de son
amitié, et qui fut mon premier protecteur. […]
Riche
d'ouvrages du premier ordre, mais modeste dans ses apparences, j'ai
contribué depuis 1781 à l'augmenter, en procurant à M. Delambre
les livres relatifs aux divers genres d'études qu'il embrassait.
Aussi la collection que nous allons offrir, beaucoup plus complète,
en livres de Mathématiques et d'Astronomie, que ne l'était celle de
son collègue De Lalande, et qu'aucune des bibliothèques de ce genre
qui les précédèrent, pourra devenir un Répertoire classique pour
les Amateurs de la Science » (p. xii)
Gaudefroy
a coopéré à la rédaction du catalogue d'Antoine Boulard, pour les
tomes I, II et IV.
Catalogue des livres
de la bibliothèque de feu Mr. A. M. H.
Boulard, notaire honoraire à Paris, […]. Première
partie, contenant la théologie, la jurisprudence et
les sciences et arts ; rédigée par L. F. Gaudefroy et J. A.
Bleuet, anciens libraires. (Paris, L. F. A. Gaudefroy et
J. A. Bleuet, 1828, in-8, xxxij-507-[1 bl.]-[4] p., 5.146 lots).
Vente en 60 vacations, du
lundi 19 mai au samedi 26 juillet 1828, en sa demeure, 21 rue des
Petits-Augustins [rue Bonaparte, VIe].
Catalogue des livres
de la bibliothèque de feu Mr. A. M. H.
Boulard, notaire honoraire à Paris, […]. Tome II,
comprenant les belles-lettres ; rédigé par L. F. A.
Gaudefroy, libraire.
(Paris, L. F. A. Gaudefroy, 1829, in-8, xvi-287-[1 bl.] p., 4.205
lots).
Vente en 42 vacations, du
lundi 18 mai au lundi 6 juillet 1829.
Catalogue des livres
de la bibliothèque de feu Mr. A. M. H.
Boulard […] comprenant un supplément aux trois premiers
volumes, une collection d'ouvrages relatifs à la Révolution
française, et les manuscrits (Paris, L. F. A. Gaudefroy,
1833, in-8, 172 p., 1.899 lots).
Vente du 3 au 25 juin
1833.
Fils de notaire,
Antoine-Marie-Henri Boulard est né à Paris, le 5 septembre 1754. En
1782, son père lui céda son étude de la rue Saint-André-des-Arts
[VIe] et il épousa Marie Chrestien des Ruflais
(1765-1858). Passionné par la littérature et les langues
étrangères, il forma une bibliothèque dès les premières années
de la Révolution, qui devint la plus nombreuse de Paris, après
celle du Roi. Nommé maire du XIe [VIe],
arrondissement de Paris en 1800, député du département de la Seine
en 1803, il
21, rue Bonaparte |
fit l'acquisition de l'immeuble du 21 rue des
Petits-Augustins [rue Bonaparte], à l'angle de la rue des Marais
[rue Visconti], en 1804 et remit sa charge à l'aîné de ses fils en
1808.
Il faisait chaque jour
des acquisitions, sur les quais ou à la salle Silvestre. Il mourut
d'une pleurésie le 8 mai 1825, et fut inhumé au cimetière du
Père-Lachaise. Il laissa une bibliothèque d'environ 500.000
volumes, entassés dans plusieurs maisons. La plus grande partie,
particulièrement riche en ouvrages de la période révolutionnaire
et en ouvrages de littérature anglaise et allemande, fut vendue en
sa demeure et forma 5 catalogues, rédigés par Gaudefroy,
Jean-Antoine Bleuet (v. 1750-v. 1828), André-Thomas Barbier, neveu
du bibliographe, et Jean-Pierre Parison (1771-1855) pour les
manuscrits.
Dans le Feuilleton du
Journal de la Librairie du 28 avril 1838, l'éditeur de
Jacques-Charles Brunet, Louis-Catherine Silvestre (1792-1867),
libraire rue des Bons-Enfants [Ier], fit paraître un «
Avis aux bibliophiles et aux libraires de tous les pays » :
« Il vient de paraître
à Bruxelles, une nouvelle contrefaçon du Manuel du Libraire et
de l’Amateur de livres de M. Brunet, et des Nouvelles
Recherches du même bibliographe, le tout, à ce que porte le
titre, rédigé et mis en ordre (lisez désordre) par
une société de bibliophiles belges [Bruxelles, 4e
éd., Société belge de librairie, Hauman et Compe.,
Meline, Cans et Compe., 1838-1845, 5 vol. in-8, dont 1
vol. de « Table méthodique » complétée et mise en
ordre par le Bibliophile Jacob]. Or, le travail de cette société
anonyme, ou plutôt du plagiaire qui s’est caché sous un nom
collectif, s’est réduit à intercaler, tant bien que mal, les
articles des Nouvelles recherches dans le Dictionnaire formant la
première partie du Manuel, en conservant du reste, sans autre
changement que quelques coupures assez maladroites, le texte de
l’édition de 1820. […] Encore si quelque intelligence avait
présidé à cette déplorable opération […] nous nous serions
contentés de gémir de ce nouvel attentat porté à la propriété
litéraire [sic] et de prendre des mesures pour en atténuer l’effet
[…]. Mais dans l’état de mutilation et d’absurdité où l’on
a réduit le grand travail de M. Brunet, nous devons hautement
protester, au nom de l’auteur et de tous ceux qui apprécient
l’utilité de son ouvrage, contre un abus aussi intolérable, et
signaler aux pays étrangers comme à la France ce nouveau forfait de
la piraterie belge. »
À Bruxelles en effet, le
baron Frédéric de Reiffenberg (1795-1850) s’était chargé de
revoir et de compléter le Manuel et son supplément dans la
contrefaçon du libraire Louis Hauman (1810-1872), sur les instances
d’un littérateur distingué, ami de Brunet, qui lui avait affirmé
que cette entreprise était désirée par l’auteur. Mais averti par
Joseph-Marie Quérard (1796-1865) qu’au contraire Brunet la
désavouait, il rompit les engagements qui pouvaient porter atteinte
à une propriété littéraire sacrée, et écrivit, le 20 octobre
1836, à Quérard : « j’aime mieux payer au
libraire avec qui j’avais traité, des dommages et intérêts assez
considérables que de faire quelque chose de désagréable à un
homme pour qui j’ai une grande estime. » Hauman mit alors,
sur le titre de son édition, qu’elle était rédigée par une
Société de bibliophiles belges : cette société belge se
réduisait en réalité à un ancien libraire parisien, Gaudefroy,
qui envoyait ses notes à Hauman.
Louis-François-André
Gaudefroy mourut à Paris, le 25 mars 1839. Il avait formé une
collection de 825 catalogues de bibliothèques ou notices de ventes
de livres faites à Paris de 1784 à 1831, avec les prix et les noms
des acquéreurs, qui fut dispersée en vente publique en 1839.