vendredi 1 avril 2022

François-Vincent Raspail (1794-1878), autodidacte et contestataire

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Le Comtat Venaissin en 1745

La famille Raspail se rattachait à la Suisse du côté paternel et à l’Italie du côté maternel. Elle s’était établie au pays de Sault [Vaucluse], dans le Comtat Venaissin, terre d’Église, au cours des guerres de religion, au XVIe siècle.



Du village d’Aurel [Vaucluse], la famille passa à Carpentras [Vaucluse], à l’occasion du mariage de Jean-Joseph Raspail (1696-1766) avec Marie-Angélique-Louise Thomas (1700-1779), qui eut lieu le 4 mai 1720.

Joseph-Vincent-Marie Raspail, né le 10 juin 1735 à Carpentras, y épousa, le 17 mai 1761, Jeanne Mounier, qui mourut en couches, avec son dixième garçon, le 9 août 1777, âgée de 36 ans. Le 27 octobre 1779, à Pernes-les-Fontaines [Vaucluse], Joseph-Vincent Raspail épousa en secondes noces Marie-Magdelaine Laty, née le 10 décembre 1757 à Malemort-du-Comtat [Vaucluse], qui lui donna huit enfants. Traiteur, Joseph-Vincent Raspail mourut à Carpentras le 12 messidor An IV [30 juin 1796], ruiné par la dévaluation de l’assignat, Marie Laty le 9 mars 1837.

J. Liabastres. Histoire de Carpentras (Carpentras, Léon Barrier, 1891, p. 188) 

Maison natale en janvier 2021

 


Septième de la fratrie, François-Vincent Raspail naquit le 5 pluviôse An II [24 janvier 1794], à Carpentras, 185 rue du Collège.

Outre quelques généalogistes amateurs, quelques journalistes anonymes et quelques institutions [Wikipédia, Le Maitron, BnF, Base de données Léonore, Base de données des députés], nombreux sont les biographes qui ont proposé des dates de naissance fantaisistes [14, 20, 25, 27 ou 29 janvier 1794], sans compter leurs erreurs de conversion du calendrier républicain. Parmi ceux qui n’ont pas pris la peine de lire l’acte de naissance de François-Vincent Raspail : Alphonse Rabbe, Claude-Augustin Vieilh de Boisjolin et François de Sainte-Preuve (1834), Joseph-Marie Quérard (1835), Albert Deville (1851), Édouard-Marie Oettinger (1854), Eugène de Mirecourt (1856), Félix Bourquelot (1857), Gustave Vapereau (1858), Hippolyte Kluyskens (1859), Dr Hoefer (1862), Victor Frond (1866), Pierre Larousse (1866), Auguste Vermorel (1869), Onésime Monprofit (1874), Georges d’Heylli (1878), Adolphe Bitard (1878), Auguste Deloye (1881), Guillaume Edard (1885), Adolphe Robert, Edgar Bourloton et Gaston Cougny (1891), Elphège Boursin (1893), Louis Sassani (1907), Noë Legrand (1911), Anfos Martin (1936), Jules Wogue (1939), Léon-Louis Veyssière (1947), Georges Duveau (1948), Jean Valbonne (1966), Daniel Ligou (1968), Demeter-Gérard-Roger Serbanesco (1969), Simone Raspail (1978), Claire Tiévant (1984), Jacques Michel (1993), Pierre Dejours (1996), Claude Schopp (1998), Marthe Saquet-Coulomb (2002), Patrick Thiébaut (2012), Michel Langlois (2015), Gilles Castroviejo (2016), Edwy Plenel (2016), Patrick Sbalchiero (2017).

Orphelin de père au cours de sa troisième année, François-Vincent Raspail fut formé par un prêtre janséniste et républicain, l’abbé Joseph-Siffrein-François Eysséric (1745-1822). 

Raspail en 1809

Il entra en 1810 au grand séminaire Saint-Charles d’Avignon [Vaucluse]. En désaccord avec l’archevêque, auquel il refusa obéissance, il quitta le séminaire en 1813 pour enseigner au collège de Carpentras.

Accusé de bonapartisme, il dut fuir les meneurs de la terreur blanche et monta à Paris en 1816. Il donna des leçons particulières, puis devint répétiteur de philosophie à l’Institution Stadler, rue Notre-Dame-des-Champs [VIe]. Il suivit les cours des Facultés de droit, des sciences et de médecine, mais sans jamais prendre de diplôme. Professeur au collège Sainte-Barbe, rue de Reims [disparue, Ve] en 1820, il fut révoqué l’année suivante pour ses opinions républicaines.

Henriette Troussot et sa fille Marie-Apolline

Ce fut alors qu’il rencontra Henriette-Adélaïde Troussot, née à Paris le 29 germinal An VII [18 avril 1799], fille d’un tonnelier de Pontaubert [Yonne], Edme Troussot (1766-1846), et de Marie-Geneviève-Apolline Brosset († 1807). Elle devint sa compagne et lui donna cinq enfants : François-Vincent-Benjamin, né le 20 août 1823 à Paris ; François-Camille, né le 18 août 1827 à Paris, 168 rue Saint-Jacques [Ve] ; Émile-Jules, né le 11 mai 1831 à Paris ; Marie-Apolline, née le 24 octobre 1836 à Paris ; François-Xavier, né le 2 décembre 1840 au quartier du Petit-Montrouge, 64 rue Neuve d’Orléans [rue Du Couédic depuis 1864, XIVe]. Ces enfants ne seront légitimés que lors de leur mariage, le 2 juin 1847, au Grand-Montrouge [Montrouge, Hauts-de-Seine].

Raspail collabora, sous le pseudonyme de « l’Ermite en province », au journal La Minerve française, 18 rue des Fossés-Saint-Germain-des-Prés [rue de l’Ancienne Comédie, VIe], et s’occupa de sciences naturelles. 

Microscope de Raspail

Il inventa un microscope très simple qu’il fit réaliser par Louis-Joseph Deleuil (1795-1862), mécanicien, 21 rue Mazarine [VIe]. Il présenta à l’Académie des Sciences des mémoires rassemblés dans ses Mémoires sur la famille des graminées (Paris, Imprimerie de Fain, 1825). Avec le mathématicien Jacques Saigey (1797-1871), il fonda en 1829 les Annales des sciences d’observation, 17 rue de Vaugirard [VIe].  

Babylone, par Victor Adam
Musée Carnavalet

Il prit part à la révolution de 1830 et fut blessé le 29 juillet à l’attaque de la caserne de la rue de Babylone [VIIe]. 

Croix de Juillet

Il obtint la Croix de Juillet, mais refusa la place de conservateur au Jardin des Plantes. Inquiet pour sa famille pendant l’organisation d’une conspiration, qui avorta, il envoya sa compagne et ses trois enfants à Épinay-sur-Seine [Seine-Saint-Denis] avant de les rejoindre, pour se cacher sous le patronyme de « François ».

Nommé chevalier de la Légion d’honneur, comme naturaliste, le 12 mars 1831, il refusa la décoration :

« Je m’empresse de vous prier de rapporter cette ordonnance. Si la croix d’honneur s’était conservée la croix des Monge, des héros de Marengo, d’Austerlitz et d’Iéna, peut-être aurais-je eu la faiblesse de braver mille fois la mort pour mériter cette décoration une seule. Mais, depuis la Restauration, on l’a prodiguée à tant de bureaucrates ou de traitres, qui ont tout fait contre nos libertés, qu’en l’acceptant je semblerais insulter à la situation de mes camarades de Juillet, à ces braves qui préfèrent se laisser empoigner plutôt que d’amener la guerre civile, alors qu’il n’est pas encore démontré qu’il existe deux camps dans Paris.

La seule décoration à laquelle mes opinions, essentiellement républicaines, me permettent de prétendre, c’est la décoration spéciale des trois journées. Celle-là n’ennoblit pas, elle honore ; elle sera décernée non par le pouvoir mais par nos frères d’armes ; elle n’aura été flétrie par aucune boutonnière indigne ; mais, toute tardive qu’elle est, elle sortira vierge, je l’espère, des mains de la commission des récompenses nationales. » [sic]

(Lettre à Casimir Périer, ministre de l’Intérieur, datée de Paris le 18 mars 1831, signée « Raspail homme du peuple »)

Le 10 mai 1831, Raspail fut poursuivi pour injures publiques envers la garde nationale, dans une lettre publiée le 18 février 1831 dans La Tribune politique et littéraire [p. 3], et fut condamné à trois mois de prison et à trois cents francs d’amende :

« Hier mercredi, le général Lobau avait donné ordre à un sous-instructeur d’inviter tous les artilleurs qu’ils pourraient rencontrer à se rendre dans la caserne de la rue Neuve-de-Luxembourg en uniforme et en armes, pour être distribués de là dans les rangs de la garde nationale à pied. Quel mélange de déception et de pusillanimité de la part du gouvernement ! Quand il veut flatter les carlistes il fait traquer les artilleurs, il les désorganise comme des républicains, il les dénonce aux tribunaux comme des amis du peuple ; et lorsque le peuple indigné reprend pour un instant sa souveraineté, alors, pour flatter le peuple, il rappelle les artilleurs !

Que M. Lobau se désabuse, les artilleurs (car ils ne se croient pas dissous par une ordonnance illégale) reprendront malgré lui, s’il le faut, leur uniforme dès qu’il s’agira de défendre les intérêts de la souveraineté de la nation ; mais quand il s’agira de protéger le service funèbre d’un Bourbon, de défendre une croix, un confesseur, une fleur de lys, honte à qui se croirait encore artilleur ! Voyez la garde nationale elle-même, elle est tellement convaincue de la marche rétrograde du gouvernement, que les plus éclairés, qui de bonne foi jusqu’ici ont été dupes du juste milieu, rougissaient, ces jours passés, de reprendre l’uniforme. » [sic]

(Lettre au Rédacteur, datée de Paris, le 17 février 1831, signée « Raspail, Brigadier de la 1re pièce de la 4e batterie. - Rue S. Jacques, n° 168. »)

A la prison de Versailles

De gauche à droite : le peintre, Balthasar-Charles Larpenteur (1783-1846) ; Auguste Blanqui (1805-1881), assis, tenant une plume ; Henry Bonnias (1800-1852) ; Raspail ; ses deux fils, Camille et Benjamin ; Théophile de Kersausie (1798-1874), de profil ; au fond, Madame Raspail, tenant son dernier né, Émile.


Le 23 octobre 1831, la Société des Amis du Peuple, dont Raspail avait accepté la présidence, fut mise en cause pour publication de diverses brochures excitant à la haine et au mépris du gouvernement : Raspail fut condamné le 12 janvier 1832 à quinze mois de prison et 500 francs d’amende. Après les journées de juin, il fut ramené de Versailles à Paris : il termina à Sainte-Pélagie son Cours élémentaire d’agriculture et d’économie rurale, à l’usage des écoles primaires (Paris, L. Hachette, 1832, 5 traités en 1 vol. in-16, pl.).

Il fit l’hommage de son Nouveau système de chimie organique (Paris, J. B. Baillière, 1833, pl.) « À la mémoire d’un homme de bien, mon pauvre maître, l’Abbé Eysséric ».

Raspail en 1833
Photographie BnF

Le 30 novembre 1833, il fut de nouveau poursuivi dans le procès de la Société des Droits de l’homme, qui eut son dénouement le 22 décembre par un acquittement pour tous les accusés.

Le 1er octobre 1834, Raspail et le riche Théophile Guillard de Kersausie (1798-1874), ancien officier de hussards, neveu de La Tour d’Auvergne, fondèrent Le Réformateur, journal des nouveaux intérêts matériels et moraux, industriels et politiques, littéraires et scientifiques, 24 rue Dauphine, quotidien dont le premier numéro parut le 9 octobre. Ce fut le 29 octobre 1834 qu’eut lieu le duel entre Raspail et Louis Cauchois-Lemaire (1789-1861), fondateur en 1832 du journal Le Bon Sens, pour dissentiments politiques. La polémique adoptée par Le Réformateur finit par lui attirer de nombreuses condamnations, sous lesquelles il disparut.

Soupçonné de complicité avec l’attentat de Fieschi contre Louis-Philippe le 28 juillet 1835, Raspail fut arrêté le 29 juillet et emprisonné au château de La Seilleraye [Carquefou, Loire-Atlantique], avant son arrivée à Nantes, où il devait assister à un banquet patriotique en commémoration du triomphe des trois journées ; ramené à Paris, il fut enfermé à la prison de La Force, 2-4 rue du Roi de Sicile [IVe]. Un non-lieu fut prononcé du fait de complot, mais il fut condamné pour outrage envers le juge d’instruction ; il en appela et l’arrêt fut cassé, après huit mois de prévention.

De nouveau sans ressources, Raspail se retira à Montrouge et y reprit ses travaux scientifiques. Il acheva son Nouveau système de Physiologie végétale et de Botanique (Paris, J. B. Baillière, 1837, avec un Atlas), dédia « À Kersausie, volontaire polonais » son livre intitulé De la Pologne sur les bords de la Vistule et dans l’émigration (Paris, Raspail éditeur, 1839) et publia son Mémoire à consulter, à l’appui du pourvoi en cassation de Dame Marie Cappelle, Ve Laffarge (Paris, Bureau de la Gazette des hôpitaux, 1er octobre 1840), accusée d’empoisonnement par l’arsenic, où il soutint la thèse contraire à celle de Mathieu Orfila (1787-1853), doyen de la Faculté de médecine de Paris.

5 rue de Sévigné (juillet 2020)

De 1840 à 1848, Raspail donna gratuitement ses soins aux malades, au 5 rue de Sévigné [Ve]. C’est à Montrouge qu’eut lieu, le 12 octobre 1841, l’amputation de la jambe droite de son fils Benjamin, blessé au genou à Épinay-sur-Seine.

Il publia une Histoire naturelle de la santé et de la maladie chez les végétaux et chez les animaux en général, et en particulier chez l’homme (Paris, Alphonse Levavasseur, 1843, 2 vol. in-8, pl.), complétée par Médecine des familles ou Méthode hygiénique et curative par les cigarettes de camphre (Paris, Collas, 1844).  Désirant surtout s’adresser au peuple, il publia aussi chaque année, à partir de 1845, un Manuel annuaire de la santé, ou médecine et pharmacie domestiques

L'Eclipse, 23 mai 1869
Photographie BnF

Il fut poursuivi pour exercice illégal de la médecine le 19 mai 1846 et fut condamné à 15 francs d’amende.

En 1848, Raspail reparut dans l’arène politique.

Le 25 février 1848, Raspail arriva à l’Hôtel de Ville, suivi d’un immense cortège populaire, et somma le gouvernement provisoire de proclamer la République. Le 27 février, il fonda le journal L’Ami du Peuple en 1848. An Ier de la République reconquise, 40 rue du Four-Saint-Germain [rue du Four, VIe].

Arrestation rue des Francs-Bourgeois Saint-Michel [rue Monsieur le Prince, VI]
 L'Illustration, 21 mai 1848, p.180

Le 15 mai 1848, lors d’une manifestation en faveur de la Pologne, le rassemblement a envahi la salle des séances de l’Assemblée nationale, avec Raspail à sa tête, qui fut arrêté et détenu d’abord au fort de Vincennes. Il fut élu député de la Seine le 17 septembre 1848, mais ne put siéger en raison de sa détention. Le 2 avril 1849, la Haute Cour de Bourges le condamna à six années de détention, comme coupable d’attentat ayant pour objet de changer la forme de gouvernement et de porter les citoyens à s’armer les uns contre les autres, et le transféra à Doullens.

Le 8 mars 1853, Henriette Troussot mourut à Doullens, où elle avait loué une chambre pour pouvoir visiter son mari régulièrement. 



Elle fut inhumée au cimetière du Père Lachaise [Division 18] le 13 mars, en présence de 50.000 personnes.

« Je viens de perdre ma compagne de trente-cinq ans, mon ange gardien, le modèle de l’amour maternel et du dévouement conjugal, la nourrice et l’idole de tous ses enfans, la providence de tous les malheureux qu’elle a pu rencontrer autour d’elle. Mme Henriette-Adélaïde Raspail, née Troussot, vient de s’éteindre, à l’âge de cinquante-trois ans, presque aux portes de ma prison, le 8 mars, à midi et demi, à la suite d’une rechute comme foudroyante et après une longue convalescence qui semblait lui promettre le retour de la santé.

Ma chaîne a pu un instant s’allonger assez pour que j’aie eu le temps de recueillir son dernier soupir et de lui fermer les yeux, entouré de trois de ses enfans.

La dispersion de la famille serait cause que nos amis et nos parens ne recevraient que bien tard, par la voie ordinaire, une nouvelle aussi désespérante ; permettez-moi de me servir de la publicité de votre feuille pour leur en faire part.

Mme Raspail a toujours manifesté le désir que ses restes mortels aillent reposer à Paris, le lieu de sa naissance et de celle de tous ses enfans ; une réclame ordinaire, insérée dans tous les journaux, indiquera le jour et l’heure de la cérémonie à ses parens et aux personnes qui auront gardé le souvenir pieux de son courage, de ses vertus et d’une vie qui ne fut que le martyre du dévouement. Aucun discours ne sera prononcé en cette circonstance ; sur une pareille tombe, les sanglots étouffent la voix. » [sic]

(Lettre de F.-V. Raspail au rédacteur de La Presse, datée de la Citadelle de Doullens, 9 mars 1853, publiée le 11 mars, p. 2)

Napoléon III commua le reste de la peine de Raspail à dix ans d’exil. Raspail arriva à Bruxelles, avec ses enfants, le 24 avril 1853. Il s’installa à Ixelles, 53 rue Sans Souci, puis à Boitsfort le 11 mai 1853, 

64 rue Victor Gambier, Uccle

et enfin à Uccle, le 12 mai 1857, dans le quartier de Stalle, 64 rue Victor Gambier.

21 rue Galliéni, Cachan

Raspail rentra en France le 27 mai 1862 et s’installa chez son fils Benjamin, à Cachan [Val-de-Marne], 13 rue des Deux Parcs [21 rue Galliéni].


Il se présenta à la députation, fut élu député du Rhône et siégea du 23 mai 1869 au 4 septembre 1870. Il resta à Paris pendant le siège et ne prit aucune part aux événements de la Commune.

Chaque année, depuis 1865, Raspail publiait un almanach. Pour 1870, il l’augmenta d’un nouveau chapitre intitulé « Calendrier ou Éphémérides des hommes et événements célèbres », qui fut reproduit dans les années 1873 et 1874, augmenté des événements de la période 1870-1871. L’almanach pour 1873 s’écoula comme d’habitude. Mais le suivant, Prévision du temps. Almanach et calendrier météorologique pour l’année 1874, à l’usage de l’homme des mers et de l’homme des champs, fut saisi comme étant un ouvrage capable de « troubler la paix publique en excitant à la haine et au mépris des citoyens les uns contre les autres ». Raspail, son fils François-Xavier, éditeur, et Paul-Auguste Dupont, imprimeur, furent déférés à la Cour d’assises de la Seine le 12 février 1874 pour répondre à l’inculpation « d’apologie de faits qualifiés crimes ». Raspail fut condamné à deux ans de prison et 1.000 francs d’amende, son fils à 6 mois de prison et 500 francs d’amende. Le 6 mars, la Cour de cassation rejeta le pourvoi de Raspail fils, cassa et annula l’arrêt qui avait condamné Raspail père. Le 2 mai, la Cour d’assises de Versailles condamna Raspail père à un an de prison, 1.000 francs d’amende et un mois de contrainte par corps : en égard pour son grand âge, il subit sa détention à Meudon [Hauts-de-Seine], dans la maison de santé de Bellevue.

Il fut élu député des Bouches-du-Rhône du 5 mars 1876 au 25 juin 1877 et fut signataire du « Manifeste des 363 députés républicains », le 18 mai 1877, qui exprimait leur opposition à la politique du président de la République, Patrice de Mac Mahon, et à l’instauration du monarchiste duc de Broglie à la présidence du Conseil. 

51 avenue Laplace, Arcueil

Réélu le 14 octobre 1877, il succomba à une pneumonie, le 7 janvier 1878, chez son fils Émile, 15 route Laplace [51 avenue Laplace], à Arcueil [Val-de-Marne]. 

Tombe de Raspail le jour de ses funérailles
Photographie F. Kempter

Les obsèques de ce libre penseur eurent lieu le 13 janvier : de la maison mortuaire au Père Lachaise, en passant par la place de la Bastille, la foule fut considérable ; le char funèbre, modestement attelé de deux chevaux, n’était plus qu’une masse de couronnes, qui portaient presque toutes une inscription ; le cercueil descendu dans la tombe, Louis Blanc, député de la Seine, commença son discours, suivi par les discours d’Émile Bouchet, député de Marseille, et d’Alfred Naquet, député du Vaucluse.


 

La bibliothèque de Raspail fut vendue du lundi 19 au samedi 31 janvier 1880, en 12 vacations, à la Maison Silvestre, 28 rue des Bons Enfants, salle n° 1 : Catalogue des livres, principalement sur les sciences et sur la Révolution française, composant la bibliothèque de feu M. F.-V. Raspail (Paris, Adolphe Labitte, 1879, in-8, [3]-[1 bl.]-[4]-XL-259-[1 bl.] p., 2.227 + 15 doubles [bis] = 2.242 lots), avec une « Notice sur F.-V. Raspail », dont Théologie [60 lots = 2,67 %], Jurisprudence [22 lots = 0,98 %], Sciences [864 lots = 38,53 %], Arts et Métiers [59 lots = 2,63 %], Belles-Lettres [387 lots = 17,26 %], Histoire [802 lots = 35,77 %], Supplément [38 lots = 1,69 %].

 


2. Quadernos Ystoricos de la Biblia. Leon de Francia [Lyon], Iuan de Tournes, 1553, pet. in-8, 180 fig. par Salomon Bernard, demi-rel. mar. br. (Belz-Niedrée).



75. Lettres [par Daniel Bargeton]. Londres [Paris], 1750, in-12, veau, fil.

Photographie BnF


246. Nouveau Système de chimie organique, fondé sur des méthodes nouvelles d’observation ; par F. V. Raspail. Paris et Londres, J. B. Baillière, 1833, in-8, 12 pl. gravées dont 6 coloriées, demi-rel., veau olive.



278. Specimen geographiæ physicæ quo agitur de Terra [par John Woodward]. Tiguri [Zurich], David Gessner, 1704, pet. in-8, vélin. De la bibliothèque du Dr. Antoine Louis, secrétaire perpétuel de l’Académie royale de chirurgie.



317. De corporibus marinis lapidescentibus quæ defossa reperiuntur [par Augustin Scilla]. Romæ, Antonii de Rubeis, 1747, in-4, portr. et 28 pl., veau. De la bibliothèque de Lavoisier.



341. Vinetum [par Charles Estienne]. Paris, François Estienne, 1537, in-8, veau, fil. (Rel. moderne). Première édition.



362. Mémoires pour servir à l’histoire anatomique et physiologique des végétaux et des animaux, par M. H. Dutrochet. Paris et Londres, J.-B. Baillière, 1837, 2 vol. in-8 et Atlas de 30 pl., demi-rel. veau (Belz-Niedrée).



381. Nova plantarum genera iuxta Tournefortii methodum disposita […]. Auctore Petro Antonio Michelio Flor. Florence, Bernardi Paperinii, 1729, in-fol., 108 pl., veau.

Photographie BnF


410. Plantarum succulentarum historia. Histoire des plantes grasses, par A.-P. de Candolle […]. Avec leurs figures en couleur dessinées par P.-J. Redouté. Paris, Garnery, 1837, 2 vol. gr. in-fol., 171 pl., demi-rel. ch. v.



506. Faune française, ou Histoire naturelle, générale et particulière des animaux qui se trouvent en France. Paris et Strasbourg, F.-G. Levrault, 6 vol. in-8, pl. coloriées, demi-rel. mar. violet.



564. Histoire des insectes de l’Europe, dessinée d’après nature & expliquée par Marie Sibille Mérian. Amsterdam, Jean Frédéric Bernard, 1730, gr. in-fol., front. et pl. color. – Dissertation sur la génération et les transformations des insectes de Surinam […]. Par Marie Sibille Mérian. La Haye, Pierre Gosse, 1726, gr. in-fol., 72 pl. color. Les deux ouvrages en 1 vol., veau, large dent. ext., double encadrement fleurd., fleurons sur les plats, tr. dor. (Rel. anc.).  

Photographie Fondation Calvet


663. Saigey et Raspail. Annales des Sciences d’observation. Paris, Baudouin, 1829 [t. I et II] ; Paris, Rouen frères et Bruxelles, 1830 [t. III et IV]. 4 vol. in-4, pl. dont plusieurs coloriées, demi-rel. basane. Exemplaire de Robyns, de Bruxelles.



672. Locupletissimi rerum naturalium thesauri accurata descriptio et iconibus artificiosissimis expressio per universam physices historiam [par Albertus Seba]. Amstelædami, Janssonio-Waesbergios, 1734-1765, 4 vol. gr. in-fol., front., portr., 449 pl. coloriées, demi-rel.



694. A. Corn. Celsi De medicina libri octo, ex recognitione Joh. Antonidæ Vander Linden. Lugduni Batav., Johannem Elsevirium, 1657, in-12, front., mar. r., dent. int., tr. dor. (Belz-Niedrée).



706. Opere fisico-mediche stampate e manoscritte del kavalier Antonio Vallisneri. Venise, Sebastiano Coleti, 1733, 3 vol. in-fol., fig., demi-rel. veau.



714. Tractatus anatomicus triplex […] : magno labore ac Studio Clarissimi Experientissimiq. viri Dni Hieronimi Fabricy. [Francfort], per Iohann Theodorum de Bry, 1613, in-4, fig., demi-rel.



756. Traitez Nouveaux & curieux du café, du thé et du chocolate […]. Par Philippe Sylvestre Dufour. Suivant la copie de Lyon, La Haye, Adrian Moetjens, 1685, in-12, fig., fil., dent. int., tr. dor. (Belz-Niedrée).  



998. Hypomneses de gall. lingua, peregrinis eam discentibus necessariæ. [Paris, Henri Estienne], 1582, demi-rel. mar. (Belz-Niedrée).  



1.128. Posteritati. J. Aug. Thuani poematum. Amstelodami, Daniel Elsevir, 1678, in-12, veau.

Photographie Antiquariat Burgverlag, Wien


1.131. Joannis Secundi opera. Paris, 1748, in-12, mar. r., tr. dor.



1.231. Euphormionis Lusinini sive Ioannis Barclaii satyricon. Amstelodami, Elizei Weyerstraeten, 1664, in-12, front., vélin.



1.329. Les Œuvres De Monsieur Scarron. Reveues, corrigées & augmentées de Nouveau. Amsterdam, Pierre Mortier, 1695, 5 vol. in-12, front., veau.

Photographie Livre Rare Book


1.377. Politique du médecin de Machiavel [par De La Métrie]. Amsterdam, Frères Bernard, s. d. [1746], pet. in-8, veau.



1.476. La Morale des Jésuites [par Nicolas Perrault]. Mons, Veuve Waudret, 1667, in-4, vélin.



1.518. C. Iulii Cæsaris quæ extant. Lugduni Batavorum, Ex officina Elzeviriana, 1635, in-12, front., cartes, mar. r., fil., tr. dor.



1.564. La Minorité de Saint Louis […]. Par le Sieur Varillas. La Haye, Adrian Moetjens, 1685, cartonné.



1.603. Les Amours d’Anne d’Autriche Epouse de Louïs XIII. Cologne, Pierre Marteau, 1693, in-12, veau. « L’auteur s’est trompé de cardinal. Richelieu fut joué par Anne d’Autriche ; c’est Mazarin qui fut le père du Masque de fer et de Louis XIV, ainsi que de son frère. » [note de Raspail en tête du livre].



1.611. Annales de la Cour et de Paris [par Courtilz de Sandras]. Cologne, Pierre Marteau, 1701, pet. in-8, veau.

Photographie Le Feu Follet


1.625. Mémoires de la minorité de Louis XIV. Villefranche, Jean de Paul, 1690, in-12, veau.



1.633. Mémoires de M. D. L. R. [Rochefoucauld]. Cologne, Pierre van Dyck, 1662, in-12, vélin.



1.651. Testament politique du marquis de Louvois [par Courtilz de Sandras]. Cologne, Chez le Politique, 1695, in-12, front., bas.



1.781. Compte rendu aux sans-culottes de la République française, Par très-haute, très-puissante et très-expéditive Dame Guillotine, Dame du Carrousel, de la place de la Révolution, de la Grève, et autres lieux ; Contenant le nom et surnom de ceux à qui elle a accordé des passe-ports pour l’autre monde […]. Rédigé & présenté aux amis de ses prouesses, par le citoyen Tisset. Paris, Petit, Denné et la citoyenne Toubon, de l’Imprimerie du Calculateur patriote, au corps sans tête, An II, in-8, demi-rel., chagr. noir.



1.886. Collection des mémoires relatifs à la Révolution française. Mémoires sur les prisons. Paris, Baudouin frères, 1823, 2 vol. in-8, demirel. chagr.



1.955. Le Courrier de Versailles à Paris, et De Paris à Versailles. Par M. Gorsas. Paris, 1789-1790, 14 vol. reliés en 7 vol. in-8, veau. 

Photographie British Museum


2.030. Pacificatores orbis christiani, sive Icones principum, ducum, et legatorum, qui monasterii atque Osnabrugæ pacem Europæ reconciliarunt. Rotterodami, typis Petri vander Slaart, 1697, in-fol., front., 123 portr., veau. De la bibliothèque du comte Vilain XIIII.



2.080. Histoire philosophique et politique Des Établissemens et du Commerce des Européens dans les deux Indes. Par Guillaume-Thomas Raynal. Genève, Jean-Léonard Pellet, 1780, 5 vol. in-4, dont 1 de planches, portraits et gravures, veau.



2.143. Catalogus librorum qui in bibliopolio Danielis Elsevirii Venales extant. Amstelodami, 1681, in-12, veau.



2.175. Histoire Des plus Illustres Favoris anciens et modernes [par P. Du Puy]. Leide, Jean Elsevier, 1659, gr. in-12, veau, dent. int., fil. dor., encadr. à froid.


 

Les invendus furent joints à d’autres livres ayant appartenu à Raspail pour une vente dans les Salles Silvestre, 28 rue des Bons Enfants, salle n° 3, du lundi 16 au mardi 24 décembre 1912 : Catalogue de livres anciens Ayant fait partie de la Bibliothèque de F.-V. Raspail (Paris, André Desvouges et Albert du May, 1912, in-8, [1 bl.]-[1]-XLV-[1 bl.]-256 p., 2.115 + 1 double [bis] = 2.116 lots), avec un portrait-frontispice et une « Notice sur F.-V. Raspail », dont Théologie [59 lots = 2,78 %], Jurisprudence [22 lots = 1,03 %], Sciences [854 lots = 40,35 %], Arts et Métiers, Beaux-Arts [49 lots = 2,31 %], Belles-Lettres [368 lots = 17,39 %], Histoire [759 lots = 35, 86 %], Supplément [5 lots = 0,23 %].

 

 

 

 

 

 

 

 


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