Gravé par Simon Thomassin, d'après Hyacinthe Rigaud. |
L’acte de baptême
d’Étienne Baluze n’existe plus aux Archives municipales de
Tulle, ni aux Archives départementales de la Corrèze : le
registre baptistaire de la paroisse de Saint-Julien pour l’année
1630 a disparu.
Tulle en 1890. |
Maison natale de Baluze. Quartier de Redole-Peyre, à Tulle. |
Étienne Baluze est né le 24 novembre 1630, comme il l’a écrit dans son autobiographie latine placée en-tête du catalogue de sa bibliothèque et comme il résulte du livre de raison tenu par son père. La généralité des biographes et des bibliographes a reproduit la date erronée, donnée par la traduction de l’autobiographie par Pierre de Chiniac [Histoire des capitulaires des rois françois de la première et seconde race. Paris, Benoît Morin, 1779, p. 157], sans prendre la précaution de recourir à la source :
« Igitur
natus sum Tutelæ Lemovicum in prima
Aquitania anno MDCXXX.
ante diem VIII.
Kal. Decembris ex clara & antiqua apud nostrates familia,
patre Joanne Karolo Baluzio præstantissimo Jurisconsulto, matre
Catharina Teyssieria singularis profecto exempli femina. »
[Je suis né à Tulle
ville du Limousin dans la première Aquitaine l’an 1630 le 24 de
Novembre d’une des plus illustres et anciennes familles, j’eus
pour père Jean Charles Baluze très savant Jurisconsulte, et pour
mère Catherine Teyssier femme d’une conduite irréprochable et
d’une piété exemplaire.]
Le 8 des Calendes de
décembre [ou avant les Calendes de décembre, c’est la même
chose] est le 24 novembre et non le 24 décembre, comme le savent
ceux qui ont la moindre notion du calendrier en usage chez les
Romains.
Après des études à
Toulouse, où il acheta une bulle originale de Grégoire XIII, le
savant Pierre de Marca l’attira à Paris en 1656, le prit comme
secrétaire et lui légua ses papiers.
En 1667, Colbert l’appela
pour avoir soin de sa magnifique bibliothèque. Pendant les 33 ans
qu’il administra la bibliothèque Colbertine, il ne négligea pas
son propre cabinet : c’est lui qui posséda les carnets de
Mazarin et la cassette de Fouquet. En 1670, il devint professeur de
droit canon au Collège royal. C’est surtout à lui qu’on doit
l’introduction en France des soupers littéraires, dont l’usage
se prolongea jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.
Bibliotheca Coisliniana, olim Segueriana (Paris, Guérin et Robustel, 1715, p. 1) |
Avancé en âge, il se
retira en 1700 dans une très belle maison, hors des murs de Paris,
proche du collège des Écossais, à qui cette maison appartenait. En
1707, après la mort de son ami Jean Gallois, il fut nommé
inspecteur du Collège royal. L’année suivante, il donna une
Histoire généalogique de la maison d’Auvergne qui lui
valut d’être envoyé en exil à Rouen, puis Blois, Tours et
Orléans, de 1710 à 1713, accusé injustement d’avoir inséré des
pièces fausses dans son ouvrage, pour soutenir les prétentions du
cardinal de Bouillon. Il fit imprimer en 1717 une Histoire de la
ville de Tulle, en latin, gage de son amour pour sa patrie.
Rue de Tournon (Plan Turgot). |
Hôtel Terrat, 6 rue de Tournon. |
« Il gît ici le
sire Étienne ;
Il a consommé ses
travaux :
En ce monde il eut tant de
maux,
Qu’on ne croit pas qu’il
y revienne. »
Dans son testament du 25
mai 1716, il avait instituée pour légataire universelle
Geneviève-Magdeleine Muguet, veuve Le Maire, fille de son ami
imprimeur François Muguet (1630-1702), et, au lieu d’imiter
presque tous les bibliophiles de son temps, avait ordonné :
« Je deffends et
prohibe expressément la vente de ma bibliothèque en gros, volant
qu’elle soit vendue en détail au plus offrant et dernier
enchérisseur, afin que les curieux puissent en avoir leur part, y
ayant une très-grande quantité de livres rares, difficiles à
trouver, que les gens de lettres seront bien aises d’avoir occasion
d’acquérir. J’excepte néantmoins de cette prohibition ma
bibliothèque de manuscrits, au cas qu’il se trouve quelqu’un qui
les veuille acheter en gros et en donner un prix raisonnable, dont ma
légatrice universelle puisse estre contente. » [sic]
La veuve Le Maire fit
imprimer la Bibliotheca Baluziana : seu Catalogus
librorum bibliothecae V. Cl. D. Steph. Baluzii Tutelensis (Paris,
Gabriel Martin et Jean Boudot, 1719, 3 parties en 2 vol. in-12,
[1]-[1 bl.]-[14]-XXXII-[1]-[1 bl.]-527-[1 bl.]-[1]-[1 bl.]-497
[chiffrées 601-1.097]-[1 bl.] p., avec erreurs de pagination, 10.799
lots + « Reliqua » et [1]-[1 bl.]-[2]-136-116 p., 1.672
lots + « Armoires »).
Christie's, Londres, 9 juin 2015 : £ 3.250 |
Après un avis aux lecteurs [« Lectori. »], on trouve l’autobiographie de Baluze [« Fragmentum De vitâ, moribus & scriptis Viri Cl. Stephani Baluzii, ex ipsius autographo editum. »] et un catalogue de ses œuvres [« Catalogus operum viri clarissimi Stephani Baluzii Tutelensis, quæ hactenùs edita sunt. »]. Les ouvrages sont classés par formats : in-folio et in-quarto [« Pars prima »], in-octavo, in-12 et petits formats [« Pars secunda »], la « Pars tertia » contenant l’ensemble des collections manuscrites, et en 5 classes : « Theologia », « Jurisprudentia », « Historia », « Humaniores litteræ » et « Miscellanei ». Le catalogue se termine par le « Catalogus collectaneorum V. C. Stephani Baluzii », mélanges rangés dans sept armoires.
Les ouvrages utiles
étaient facilement identifiables grâce à l’ex-libris manuscrit
qui figurait à l’extrémité inférieure de la page de titre :
« Stephanus Baluzius Tutelensis ». La vente eut lieu au
domicile du défunt, à partir du 8 mai 1719. L’abbé Bignon acheta
la « Pars tertia » : 957 manuscrits, 715 actes ou
diplômes [dont 249 bulles des papes] et le contenu des 7 armoires,
payés 30.000 livres, pour la Bibliothèque du Roi.
"Le dimanche, XXIIIIe de novembre 1630, entre troys et quatre heures du matin, nasquit Estienne Baluze, premier filz de Me Jean Charles de Baluze, advocat en parlement, mon fils unique, et de Catherine de Teyssier, sa femme; et fust baptizé en l’esglize Saint Jullien le mecredy au soir, sur la nuict, par Mre Jean de la Salvanye, curé dud. Saint Jullien. Je fus parrin et damoyzelle Marguerite du Verdier, veufve de feu Mr Jean Teyssier, vivant conseiller du Roy et son recepveur general en la generalité de Limoges, mere de lad. Catherine, marrine. Dieu le fasse homme de bien".
RépondreSupprimerTel est l'acte de naissance que l'on trouve dans le livre de raison des Baluze, récemment retrouvé par Michel Cassan aux archives départementales de la Corrèze. Il est tout aussi précis qu'un registre baptistaire. Celui de la paroisse Saint-Julien est en effet en déficit aux archives communales (déficit: années 1627-1632), et ce au moins depuis le XIXe siècle.
Belle biographie!
Jean Boutier